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ENVIRONNEMENT Catastrophisme environnemental

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Des craintes croissantes concernant la rapide et profonde dégradation de l'environnement

Le pessimisme, voire le catastrophisme, environnemental tel qu'il apparaît durant la première moitié du xxe siècle repose sur le constat que la dégradation provoquée par l'homme dans son environnement naturel, dans son fonctionnement et dans les services qu'il rend est désormais profonde. Paul B. Sears le résume en 1941 : « La conservation, comme la santé et la justice, prend tout son sens seulement lorsqu'elle fait défaut. L'idée ne serait pas apparue dans une société humaine qui aurait maintenu une relation favorable et bien équilibrée avec son environnement. »

L'idée qu'une forêt doit être protégée d'une trop forte exploitation pour prévenir sa disparition est très ancienne – la gestion des forêts initiée par Colbert aux fins de répondre aux besoins en bois de marine en témoigne –, mais ce qui est nouveau à la fin du xixe siècle, c'est l'inquiétude naissante pour l'ensemble des ressources, qu'elles soient marines, cynégétiques, forestières, minières, agricoles... On se soucie déjà des ressources nouvelles comme le charbon et le pétrole : des experts s'affrontent, dès les années 1880, sur la durée d'exploitation des stocks de ces sources d'énergie. Certains craignent déjà une future pénurie, tandis que d'autres affirment que l'on n'est qu'au début de cette exploitation et qu'il n'y a rien à redouter pour l'avenir.

Il faut attendre le début du xxe siècle pour que le mouvement en faveur de la conservation de l'environnement, qui constitue la réponse à ces craintes, soit véritablement audible. La personnalité et l'action du président Theodore Roosevelt (1858-1919) jouent alors un rôle essentiel. Il participe au lancement, en 1887, du Boone and Crocket Club, lequel rassemble des chasseurs soucieux de moraliser les pratiques et de sauvegarder la grande faune américaine. Dès lors, les États-Unis apparaissent aux yeux du monde à l'avant-garde de ce mouvement. Ce club pilote la création de la Société zoologique de New York et du zoo du Bronx en se donnant pour objectif la sauvegarde du bison, alors en voie d'extinction. Durant la présidence de Theodore Roosevelt (1901-1908), des mesures sont prises à la fois pour protéger le patrimoine naturel (par exemple la création d'un réseau dense de réserves ornithologiques) et pour mettre en place une gestion pérenne de certaines ressources, notamment forestières. Durant la première moitié du xxe siècle, de nombreuses organisations gouvernementales ou non gouvernementales voient le jour, constituant ainsi un ensemble unique en son genre.

L'entre-deux-guerres voit s'affirmer les inquiétudes dues à la disparité entre la croissance démographique et les ressources agricoles, ainsi qu'au gaspillage des ressources naturelles. Le phénomène du Dust Bowl (une série d'années très sèches combinées à une mauvaise utilisation des sols entraîne une formidable érosion aérienne touchant 400 000 km2 au centre des États-Unis, qui se manifeste par des tempêtes de poussière) semble être la preuve visible de la dégradation des sols décrite par de nombreux spécialistes en Afrique et en Amérique du Nord. De plus en plus, on prend conscience que les problèmes sont internationaux. La dégradation des sols fait l'objet, en 1939, du premier inventaire mondial : The Rape of the Earth : a World Survey of Soil Erosion de Graham Vernon Jacks (1901-1977) et Robert Orr Whyte (1903-1986), un ouvrage au titre choc qui marque profondément les esprits. Toujours aux États-Unis, des naturalistes issus du Boone and Crocket Club lancent, en 1930, le Comité américain pour la protection internationale de la faune sauvage. Il s'agit en quelque sorte d'exporter l'expertise[...]

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Écrit par

  • : docteur en sciences de l'environnement, historienne des sciences et de l'environnement, chercheuse associée au laboratoire SPHERE, CNRS, UMR 7219, université de Paris-VII-Denis-Diderot

Classification

Pour citer cet article

Valérie CHANSIGAUD. ENVIRONNEMENT - Catastrophisme environnemental [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 13/03/2012

Autres références

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