Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

ÉLOQUENCE

L'éloquence est ce qui fait un discours ou un orateur persuasifs. Elle a partie liée avec la rhétorique, qui enseigne l'art de persuader, qu'on la considère, ainsi que le fait Quintilien, comme le résultat de règles purement formelles ou, selon Cicéron, comme « don naturel » de l'homme cultivé : « Ce n'est pas l'éloquence qui est née de la rhétorique, mais la rhétorique qui est née de l'éloquence » (De oratore, XXXIII, 146). La persuasion est une puissance, une maîtrise d'autrui : aussi l'éloquence, politique comme celle de Démosthène, judiciaire comme celle de Lysias, ou épidictique (éloges et blâmes), représente-t-elle un but dans l'éducation du citoyen grec puis romain ; une vertu apologétique (Lacordaire : « L'éloquence est l'âme rompant toutes les digues de la chair, quittant le sein qui la porte et se jetant à corps perdu dans l'âme d'autrui ») et révolutionnaire (Danton, Saint-Just). L'histoire de la pensée valorise contradictoirement l'éloquence : Platon rattache la persuasion à l'apparence et à l'opinion par opposition au vrai, assimilant la rhétorique à la flatterie (cf. Gorgias, 463 b) et le sophiste à l'illusionniste (cf. Le Sophiste) ; Aristote en fait au contraire le complément indispensable, au même titre que la dialectique (cf. Rhétorique), de l'Organon logique. Mais dans tous ces cas, et même quand Platon dans le Phèdre jette les bases d'une rhétorique « philosophique », l'éloquence n'est pas en tant que telle dire du vrai. Or c'est ce que la pratique sophistique, comme plus tard Nietzsche, pourrait contester : qu'il y ait une autre naturalité du langage que rhétorique, une autre loquacité qu'éloquente.

— Barbara CASSIN

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Barbara CASSIN. ÉLOQUENCE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ABRAHAM A SANCTA CLARA JOHANN ULRICH MEGERLE dit (1644-1709)

    • Écrit par Hélène FEYDY
    • 643 mots

    Prédicateur populaire de l'Autriche baroque, Abraham a Sancta Clara fut aussi un grand moraliste. Apprécié pour son éloquence et sa verve caustique, il est resté célèbre pour ses effets de style.

    Son vrai nom est Johann Ulrich Megerle. Né en 1644 à Kreeheinstetten dans le pays de Bade,...

  • RHÉTORIQUE, notion de

    • Écrit par Alain BRUNN
    • 1 664 mots

    La rhétorique désigne l'art du rhéteur, de l'orateur grec : en ce sens, elle engage une définition du langage et de ses pouvoirs. Elle est l'art de bien parler, c'est-à-dire d'agir par la parole sur un auditoire, de le convaincre par l'argumentation, mais aussi par...

  • ARTS POÉTIQUES

    • Écrit par Alain MICHEL
    • 5 904 mots
    • 3 médias
    Les deux nuances vont rester confrontées à travers l'histoire. Dans le Pro Murena (62 av. J.-C.), Cicéron reprend la théorie de l'inspiration qui lui vient de Platon et d'Héraclite et tente de la concilier avec l'éloquence prônée par Aristote. Dans l'Orator, il pose...
  • ATHÈNES

    • Écrit par Guy BURGEL, Pierre LÉVÊQUE
    • 16 998 mots
    • 10 médias
    La littérature est tout entière orientée vers l'action. L'éloquence devient le genre primordial : éloquence judiciaire des logographes, ces « faiseurs de discours » qui vendent leurs plaidoyers, éloquence d'apparat avec Isocrate, éloquence politique avec Démosthène. Isocrate s'illustre...
  • Afficher les 25 références

Voir aussi