ÉLECTROPHYSIOLOGIE
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Les êtres vivants, végétaux et animaux, sont communément le siège de phénomènes électriques intimement liés aux activités vitales, dont ils sont un des aspects les plus révélateurs. On met ces phénomènes en évidence à l'aide d'électrodes appliquées en surface ou introduites dans la profondeur des tissus. On peut alors capter des courants ou des différences de potentiel et enregistrer leurs variations au cours du temps.
Ces phénomènes d'électrogenèse biologique, appelés aussi « bioélectriques » ou « électrophysiologiques », font, avec les techniques qui y sont associées, l'objet d'une science, l'électrophysiologie, qui en décrit les divers aspects, cherche à en découvrir les causes et à leur attribuer éventuellement un rôle fonctionnel. À ces recherches sont étroitement liées celles qui visent à analyser les actions produites sur les organismes vivants par le courant électrique, que celui-ci soit imposé de l'extérieur ou d'origine interne. Tout cela a donné lieu à de nombreuses applications pratiques, principalement médicales et chirurgicales, telles que l'électro-encéphalographie, l'électrocardiographie, l'électrologie médicale.
Bioélectrogenèse
Manifestations électriques de la vie
Le métabolisme, c'est-à-dire l'activité chimique incessante qui caractérise l'état vivant dans chaque tissu, dans chaque cellule, engendre des forces électromotrices (f.é.m.) parce qu'il existe dans chaque cellule des mécanismes physico-chimiques capables de séparer des ions de signes contraires et d'orienter des molécules polaires. La f.é.m. élémentaire ainsi produite a pu être mesurée, dans les cas favorables, en faisant pénétrer dans la cellule vivante des micro-électrodes dont la pointe peut être affinée à moins de 1 micromètre. Cette f.é.m. élémentaire peut atteindre parfois de 0,10 à 0,15 volt. Dans la plupart des cas cependant, on ne cherche pas à aller si loin dans l'analyse, et même on préfère avoir une vue globale, composite, de l'activité électrique de toute une population de cellules ou même d'un organe entier, comme le cœur ou le cerveau. On ne mesure plus alors des f.é.m., mais une partie des courants qu'elles débitent ou, mieux, les différences de potentiel (D.P.) captées sur les boucles de courant qui passent par la pointe des couples d'électrodes. Dans le langage technique, cette opération se nomme « dérivation ». Le plus souvent, on procède simultanément à plusieurs dérivations. Les électrodes sont superficielles ou profondes, et les phénomènes électriques que l'on décèle sont, selon les cas, stables, lentement variables, transitoires, plus ou moins régulièrement périodiques. Les échelles de temps utiles sont, les plus brèves, en dix-millièmes de seconde, les plus longues, en minutes, en heures ou encore en jours.
Le rôle que joue cette électrogenèse biologique dans l'économie des organismes peut présenter trois aspects différents. Parfois les courants ne semblent jouer aucun rôle bien défini : ils apparaissent comme de simples sous-produits du métabolisme et leur énergie se dissipe en chaleur. Dans un deuxième cas, au contraire, ils sont un des facteurs essentiels d'un mécanisme moléculaire important, et comme tels participent à une fonction spécifique ; en gros, c'est le cas de tous les mécanismes physiologiques où interviennent des membranes : absorptions, sécrétions, excrétions, contractions musculaires, excitations sensorielles, mécanismes de la propagation et de la transmission de l'excitation nerveuse. Le troisième cas est celui des poissons électriques, chez lesquels, grâce à l'organe hautement spécialisé qu'ils possèdent, des décharges électriques produites sous le contrôle du système nerveux servent à l'animal pour se défendre, capturer une proie ou se diriger dans l'espace environnant : c'est la bioélectrogenèse devenue forme de comportement.
Aperçu historique
La forte décharge naturelle de certains poissons électriques est le premier phénomène bioélectrique qui se manifesta – désagréablement – à l'homme qui, comme en témoignent les noms donnés à la torpille par les Indiens et les Arabes, en vint à pressentir une analogie avec la foudre. C'est en 1757 qu'Adanson, botaniste français, exprima l'idée que la décharge du silure du Sénégal pourrait être de même nature que celle d'une bouteille de Leyde, tandis que Van Musschenbroek, physicien hollandais, inventeur de cet instrument, émettait la même opinion en 1760, à propos de l'anguille é [...]
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Écrit par :
- Max DONDEY : assistant des Hôpitaux de Paris, directeur adjoint à l'École pratique des hautes études
- Jean DUMOULIN : professeur à la faculté libre de médecine de Lille
- Alfred FESSARD : professeur honoraire à la faculté des sciences de Paris
- Paul LAGET : professeur de psychophysiologie à l'université de Paris-VI-Pierre-et-Marie-Curie
- Jean LENÈGRE : ancien professeur à la faculté de médecine de Paris.
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Autres références
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Pour citer l’article
Max DONDEY, Jean DUMOULIN, Alfred FESSARD, Paul LAGET, Jean LENÈGRE, « ÉLECTROPHYSIOLOGIE », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 23 mai 2022. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/electrophysiologie/