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CLOWN

On se perd en conjectures sur la date et le lieu de naissance du clown, mot anglais qui signifie paysan, rustre, vilain. On lui donne, selon les pays, des ancêtres différents. Et, à défaut d'établir une filiation continue, on n'a que l'embarras du choix. Certains le font remonter aux bouffons et aux mimes de l'Antiquité ; ceux-là, aux fous des cérémonies médiévales ; ceux-ci, aux baladins du théâtre. Les derniers, plus prudents, se contentent de ressemblances, sans parler de paternité, avec les types de la commedia dell'arte. Comme tous les comiques populaires disparus avant sa naissance, le clown a trouvé en lui-même sa raison d'être, s'est inventé une technique qu'il a perfectionnée, et qui n'est ni l'appropriation de moyens tombés en déshérence, ni l'imitation d'anciennes traditions.

Naissance de l'art clownesque

Les origines de M. Claune

Les frères Fratellini, vers 1930 - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Les frères Fratellini, vers 1930

Chaque peuple crée un personnage caricatural à son image dans lequel il synthétise ses goûts et se moque de ses travers. Aussi, les Allemands rattachent le clown à Hanswurst et au loustic, les Hollandais à Pickled-Herrings, les Anglais à Jack Pudding et au jester. Les Français qui ont connu Jean Potage songent à Jean Farine et à Pierrot à cause de leur face blanche, à Arlequin et à Polichinelle pour leur costume. Les Espagnols ont eu leur gracioso, les Italiens Pagliacio, leur paillasse, mais ceux-ci possèdent tant de types locaux introduits dans le théâtre populaire qu'ils considèrent le clown comme un article d'importation d'usage accidentel. Le clown n'a jamais fait d'étincelles dans la péninsule italienne. C'est hors de leur pays natal que les Grimaldi, les Chiarini, les Cavalini, les Fratellini, les Frediani acquirent leur célébrité.

Les Anglais voient un des prédécesseurs du clown dans Merry Andrew, un valet qui n'est souvent que le serviteur mal vêtu de Pantalon et que Jimmy Warner, célèbre comique, imite en lui empruntant sa collerette et son pourpoint trop long. Ce valet de comédie dépasse bientôt son maître et occupe un rôle de premier plan dans les intermèdes insérés dans les pantomimes-féeries de Noël très goûtées sur les scènes anglaises, rôle que lui ravissent dès leur arrivée les sauteurs et les danseurs de corde de l'arlequinade italienne venus du continent.

Le plus connu des clowns anglais, celui dont des centaines de commentaires entretiennent le souvenir, est Giuseppe Grimaldi, qui a fait son apprentissage de mime sur les foires parisiennes. Il débute à Londres après 1750. Il introduit dans son jeu et ses lazzis (jokes of construction) un comique d'accessoires dont il connaît toutes les ressources pour les avoir pratiquées dans les pièces à machines du théâtre forain. Il imagine des combinaisons vestimentaires qu'il transforme à vue en matériel à surprises, qui entretient la curiosité et concourt à son succès.

On trouve le mot « clown » pour la première fois exprimé phonétiquement en France dans un petit livre daté de 1816 et consacré au cirque Franconi. Il y est question d'un certain M. Claune, comique équestre. C'est toutefois sous le qualificatif de « grotesques » ou de « paillasses » que sont désignés Philippe Laurent et les siens quand ils débutent au théâtre des Arts de Rouen, en 1820. Ils arrivent du Drury Lane de Londres, avec une pantomime mêlée de danses, Le Diable ermite ou L'Amour triomphant. Philippe Laurent descend de parents français installés en Angleterre à la fin du xviiie siècle ; c'est un spécialiste de la technique des accessoires comme son père, ancien sauteur, et comme Grimaldi. Engagé au spectacle des Funambules, Philippe Laurent conserve le premier rôle d'Arlequin en titre jusqu'à ce que Deburau le supplante en habit de Pierrot. Passé au Cirque-Olympique, Laurent est, avec Anicet Bourgeois et [...]

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Pour citer cet article

Tristan RÉMY. CLOWN [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Les frères Fratellini, vers 1930 - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Les frères Fratellini, vers 1930

<it>La Ruée vers l'or</it>, de C. Chaplin, 1925 - crédits : MPI/ Getty Images

La Ruée vers l'or, de C. Chaplin, 1925

Autres références

  • BURLESQUE COMÉDIE, cinéma

    • Écrit par Claude-Jean PHILIPPE
    • 3 086 mots
    • 10 médias
    ...(qui, au cinéma, est également un genre fécond) réduit le personnage à la réalité commune des ridicules observés et des situations qui les révèlent. Des générations d'acteurs peuvent servir le même répertoire. Leclown, au contraire, meurt en emportant le secret de son masque, si rudimentaire soit-il.
  • DEVOS RAYMOND (1922-2006)

    • Écrit par Didier MÉREUZE
    • 932 mots

    Raymond Devos était l'alchimiste du verbe, le magicien des mots, tout à la fois comédien, jongleur, rêveur, funambule, clown poète, maître en calembours, « amuseur » comme il se présentait lui-même. Se jouant des coq-à-l'âne et des paradoxes, il tenait les spectateurs en haleine au fil de monologues...

  • ÉTAIX PIERRE (1928-2016)

    • Écrit par Alain GAREL
    • 674 mots
    • 1 média

    Acteur, prestidigitateur, musicien, clown, peintre, dessinateur, sculpteur, créateur d’automates, affichiste, humoriste, écrivain, dramaturge, metteur en scène, gagman, scénariste et réalisateur de cinéma, tel était Pierre Étaix.

    Né à Roanne le 23 novembre 1928, il découvre à cinq ans le ...

  • FRATELLINI LES

    • Écrit par Pierre ÉTAIX, Annie FRATELLINI
    • 580 mots
    • 1 média

    À l'origine, les Fratellini étaient quatre frères : Louis (Florence, 1868-Varsovie, 1909) ; Paul (Catane, 1877-Le Perreux-sur-Marne, 1940) ; François (Paris, 1879-1951) et Albert (Moscou, 1885-Épinay, 1961).

    À partir de 1894, les aînés travaillèrent ensemble : Louis comme clown et...

  • Afficher les 7 références

Voir aussi