CLAVECIN
Compositeurs
Au début du xvi e siècle, il ne semble pas qu'il y ait eu d'artistes possédant une individualité très marquée. Ce sont plutôt des « défricheurs » ; ils écrivent des préludes, des toccatas, des pièces à danser, ils transcrivent, réduisent des œuvres vocales pour un instrument non déterminé. Est-ce l'épinette, le clavicorde, le virginal, l'orgue ou le clavecin ? Le plus souvent pour ces deux derniers, qu'aucune barrière à l'époque de la Renaissance, ne semble séparer. Cependant l'autonomie du clavecin se dessine petit à petit grâce à l'action des Rückers ; en effet, les compositeurs s'intéressent aux améliorations apportées aux instruments, à leur facture nouvelle, et ils vont créer une véritable esthétique clavecinistique qu'illustrent les cinq grands serviteurs du clavecin : Couperin, Rameau, Haendel, Bach et Scarlatti. Mais en Angleterre comme en France, en Allemagne comme en Italie, ces « cinq grands » ont eu des précurseurs et des contemporains qu'il serait injuste de passer sous silence.
En Angleterre : William Byrd (1542-1623) fut le premier musicien à illustrer la fameuse école des virginalistes. Il eut, plus que ses contemporains et successeurs, la prescience des possibilités expressives de la variation ; John Bull (1563-1628), très grand virtuose, musicien brillant et élégant, excella lui aussi dans la variation. On lui attribua à tort la paternité du God save the King. Peter Philipps (vers 1560-1628) était très savant dans l'art polyphonique ; son séjour aux Pays-Bas laissera une forte empreinte et influencera Sweelinck. Gilles Farnaby (1569 env.-apr. 1598) dont l'une des œuvres, écrite pour deux virginals, fut l'ancêtre de toute littérature pour deux claviers. Thomas Morley (1557-1602 ou 1603), élève de Byrd, est plus célèbre peut-être pour sa musique vocale que pour ses pièces instrumentales : il écrivit des chansons pour les drames de Shakespeare. John Dowland (1562-1626), luthiste renommé, cultiva avec bonheur l'ayre où l'instrument se mêle à la voix. Orlando Gibbons (1583-1625), technicien remarquable, composa dans tous les genres avec une aisance égale. John Blow (1649-1708), organiste à Westminster, eut Purcell comme élève et lui céda sa charge pour la reprendre après la mort de celui-ci, mort qui le frappa beaucoup et lui inspira une Ode d'une très grande beauté. Enfin, Henri Purcell (1659-1695), sans nul doute le plus grand musicien de l'Angleterre, doit certainement beaucoup à l'école française, dont il emprunte la forme de la suite et une certaine manière d'orner les phrases, et aux compositeurs vénitiens qui tirent d'extraordinaires effets du chromatisme ; mais Purcell n'en possède pas moins une originalité de style remarquable, une grande vigueur d'inspiration et une émotion profonde que l'on retrouve dans toutes ses œuvres.
En Italie : les Scarlatti

Domenico Scarlatti
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Domenico Scarlatti
Le compositeur italien Domenico Scarlatti (1685-1757) écrivit 555 sonates pour clavecin.
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En Italie, les deux Gabrieli, Andrea et Giovanni, l'oncle et le neveu, sont, sous l'impulsion du Flamand Willaert, spécialiste du madrigal, les chefs de l'école vénitienne du xvi e siècle. C'est surtout le second, Giovanni (1557-1612), qui se distingua. Ses œuvres religieuses et instrumentales sont considérables et ont eu une grande répercussion internationale. Entre ces deux musiciens, Claudio Merulo (1533-1604) s'impose par sa virtuosité d'organiste, l'importance de ses compositions et son renom de professeur. Girolamo Frescobaldi (1583-1643) est leur véritable successeur. Après avoir été un enfant extraordinairement précoce, le futur maître de Ferrare voyage beaucoup et enthousiasme ses auditoires en improvisant aussi bien à l'orgue qu'au clavecin. Ses nombreuses compositions pour ces instrument sont sensibles, harmonieuses et savantes ; elles ouvrent une[...]
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Écrit par
- Josiane BRAN-RICCI : conservateur en chef honoraire du patrimoine au musée de la Musique
- Robert VEYRON-LACROIX : professeur au Conservatoire national de musique de Paris
Classification
Pour citer cet article
Josiane BRAN-RICCI, Robert VEYRON-LACROIX, « CLAVECIN », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le . URL :
Médias

La famille Bach, Rosenthal
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La famille Bach, Rosenthal
Jean-Sébastien Bach (1685-1750) en famille, dans les années 1720. Tableau de Rosenthal.
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Autres références
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CLAVECIN, en bref
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Voir aussi
- RUCKERS LES (XVIe-XVIIe s.)
- CORDES, musique
- PÉDALE, musique
- CLAVIER
- PASQUINI BERNARDO (1637-1710)
- PHILIPPS PETER (1560 env.-1628)
- ESPAGNOLE MUSIQUE
- INSTRUMENTS FACTURE D'
- COUPERIN LOUIS (1626-1661)
- ANGLAISE MUSIQUE
- ALLEMANDE MUSIQUE
- FRANÇAISE MUSIQUE
- ITALIENNE MUSIQUE
- PORTUGAISE MUSIQUE
- PIANOFORTE
- REGISTRE, musique