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CLAN

Fonctions du clan

On a parfois qualifié de claniques les sociétés habituellement étudiées par l'anthropologie. C'est dire l'importance que l'on reconnaît à cette institution, mais c'est aussi entretenir une certaine confusion. Car, ce que l'on vise, c'est la place qui, dans ces sociétés, est faite aux groupes de parenté, vivants et opérants. Or, dans de nombreux cas, c'est le lignage et non le clan qui est le foyer actif de parenté essentiel au bon fonctionnement de la société globale et à la protection de d'individu.

Il ne faut pas oublier que « clan » fait partie de la terminologie de l'observateur et non de celle des sociétés étudiées – à l'exception, pour une certaine période de l'histoire, de l'Écosse et de l'Irlande. Il existe des groupes de solidarité rassemblant les descendants d'un même ancêtre, et désignés par un mot de la langue de la société en question ; la traduction de ce mot (par « clan », « lignage », ou un autre terme) proposée par un anthropologue ne s'impose pas toujours comme la meilleure. Ce qui importe, c'est le groupe concret de parenté opérant dans une certaine société. Ce groupe de parenté peut être soit unique, soit prioritaire dans une société ; très souvent, ce groupe sera un clan (au sens précisé antérieurement) ; quelquefois, il correspondra davantage à la notion de lignage.

Le groupe de parenté effectif est organisé. Ses membres sont soumis à l'autorité d'un patriarche (un des membres les plus âgés du groupe). Appartenant à la génération vivante la plus proche de l'ancêtre commun, le patriarche est en quelque sorte l'intermédiaire entre les membres morts du clan, qu'il rejoindra bientôt, et les jeunes générations. Son pouvoir ne repose pas sur la coercition, mais sur sa place dans la chaîne du sang. Il ne prend d'ailleurs ses décisions qu'après avoir recueilli l'opinion des autres anciens, et même celle de tous les hommes adultes. Ne s'appuyant pas sur la force, son autorité ne peut se dispenser de la persuasion.

Le clan remplit certaines fonctions qui, ailleurs, sont exercées par les gouvernants de la société globale. La régulation du mariage par l'exogamie est de première importance, puisqu'elle crée à l'intérieur de la société d'indispensables échanges de femmes et de biens, sans lesquels chaque groupe, se renfermant sur soi, deviendrait étranger et hostile aux autres. Entre les frères claniques, les litiges sont tranchés, les dommages réparés grâce au patriarche agissant comme juge. Même lorsque le désaccord divise des membres de clans différents, et qu'il n'y a aucune autorité politique supérieure pour l'arbitrer, les clans eux-mêmes parviennent à régler le conflit. L'importance que l'on accorde à la solidarité passive et active dans la vengeance collective donne l'impression que règne entre les clans un état endémique de violence ; on oublie que le clan lui-même exerce sur ses membres, comme le souligne fort bien Linton, une forte pression pour qu'ils n'offensent pas ceux qui sont étrangers au clan et se conduisent envers eux avec modération.

Les droits sur le sol sont habituellement aussi contrôlés par le clan. On a parlé de la propriété collective du clan s'opposant à la propriété individuelle de ses membres ; la notion occidentale de propriété foncière ne semble pas plus applicable à l'une qu'à l'autre. Les droits du clan sur un certain domaine évoquent plus la souveraineté que la propriété : le patriarche peut mettre à la disposition d'un membre une parcelle que celui-ci cultivera avec l'aide de sa famille (son ou ses épouses, leurs enfants) ; lorsque cet individu n'utilise plus cette parcelle, ses droits sur elle sont éteints et le patriarche peut en disposer à nouveau.[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Californie à Los Angeles

Classification

Pour citer cet article

Jacques MAQUET. CLAN [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Totem indien - crédits : Giulio Paletta/ Education Images/ Universal Images Group/ Getty Images

Totem indien

Autres références

  • ANTHROPOLOGIE POLITIQUE

    • Écrit par Georges BALANDIER
    • 5 811 mots
    • 1 média
    Les sociétés dites segmentaires,organisées sur la base des clans, des lignages et des alliances résultant des échanges matrimoniaux, ne sont pas dépourvues de rapports de prééminence ou de subordination. Les clans et les lignages ne sont pas tous équivalents ; les premiers peuvent être différenciés,...
  • BATAK, ethnie

    • Écrit par Roger MEUNIER
    • 336 mots

    Estimés à 6 230 000 personnes (1991), les Batak, qui vivent dans l'île de Sumatra, se divisent en plusieurs groupes : les Angkola, les Nandheling (ou Mandailing, qui sont des clans malaïcisés), les Karo, les Toba, les Timor (ou Simalungun), les Dairi et les Alas-Kluet.

    Les villages semblent...

  • BÉTÉ

    • Écrit par Alain MOREL
    • 974 mots

    Établis en Côte-d'Ivoire et appartenant au groupe des Krou, les Bété représentent, dans les années 1990, 18 p. 100 de la population ivoirienne, soit 2 millions de personnes environ. Le pays bété, qui s'étend sur la forêt et sur la savane, entre Gagnoa et Daloa, a pour capitale cette dernière...

  • BORORO, Amérique

    • Écrit par Susana MONZON
    • 362 mots

    Indiens d'Amérique du Sud, les Bororo, qui seraient moins de 1 000, habitent le Mato Grosso et le Goiás occidental au Brésil et se rencontrent également en petit nombre au-delà de la frontière bolivienne. Les Bororo ont été avant tout chasseurs, collecteurs et pêcheurs ; mais, dans la région du rio...

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Voir aussi