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AMÉRINDIENS Amérique du Nord

Le renouveau indien

Cependant la crise est surmontée. De façon générale, les civilisations indiennes se relèvent. Renouveau qui n'est pas retour au passé, mais assimilation des influences coloniales, émergence d'indianités nouvelles qui se développent sur la base d'une réaffirmation des valeurs traditionnelles dans les conditions nouvelles issues de la colonisation, permettant en même temps la création d'outils proprement indiens, qui rendent possible la lutte contre les influences et les menaces directes émanant du monde colonial.

La fondation des confédérations

Différents incidents marquent et symbolisent ce renouveau. Dans la région des Grands Lacs, c'est la Confédération iroquoise (1649-1655) et la constitution de la première force politique indienne, capable de traiter d'égal à égal avec les Blancs. Dans le courant du xviiie siècle, les Iroquois accueillent en leur sein de nombreux groupes d'Indiens déplacés, développent un large réseau d'alliance indienne. La force iroquoise s'appuie d'abord sur un message spirituel contenu dans le récit de la formation de la Ligue et qui est une réaffirmation des traditions indiennes. C'est en recréant les conditions d'un partage culturel, et non par une solution politique, que les Iroquois se fédèrent.

À l'exemple des Iroquois s'ébauchent ou se fondent d'autres confédérations. La vallée de l'Ohio, vidée de ses habitants au xviie siècle, est réoccupée au début du xviiie par différentes nations venues ou revenues de l'Ouest après la paix avec les Iroquois ou Delaware ou les Shawnee. La Confédération creek regroupe une quarantaine de villages-tribus de Georgie et d'Alabama. Les Creeks, d'ailleurs en contact avec les Iroquois, jouent au Sud un rôle analogue à celui des Iroquois dans le Nord. Les leaders apparus à la faveur des troubles coloniaux continuent de jouer un rôle important, mais leur pouvoir ne s'installe pas ; il y a, en revanche, un intense développement du rituel associé aux tâches politiques. Les chefs de tribus ne se rencontrent pas seuls mais avec les populations ; le politique rétablit ainsi des contacts rompus. Dans le cadre des confédérations, unions non unitaires, se détermine une efficacité politique incontestable. Les Indiens imposent sur le terrain qu'on les traite en nation. Ils imposent le traité, et la forme prédominante du traité n'est pas la forme européenne du contrat juridique mais la forme indienne de la relation et de l'échange périodique. Les Indiens tirent pleinement profit de la rivalité politique franco-anglaise. Au-delà, leur perspective, devant l'obstination des Blancs, demeure lointaine, bien qu'affirmée par de nombreux leaders : pacifier les Européens eux-mêmes, obtenir des Français et des Anglais qu'ils cessent leurs conflits et vivent en bon voisinage dans un monde où l'identité de chacun serait respectée et où les hommes et les produits pourraient circuler librement.

Un nouvel équilibre démographique

Sur le plan économique, les effets destructeurs de la traite s'apaisent. La demande indienne ne progresse plus, ne s'étend pas à de nouveaux objets ou marchandises, la mentalité économique européenne ne pénètre plus dans les tribus où l'échange reste réglé par le don. Les Indiens intègrent le fait de la présence des Blancs en intégrant les objets des Blancs, mais ils maintiennent des valeurs et un style de vie particuliers. Ils ont désormais partiellement reconnu le fait de la frontière blanche, leur communauté d'intérêts et de culture face au monde blanc.

Tel est donc le sens des renouveaux culturels indiens. Le processus de dissolution culturelle est maîtrisé : les civilisations indiennes sont formellement très différentes de ce qu'elles étaient un siècle plus tôt. Mais elles demeurent dans la lignée[...]

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Écrit par

  • : professeur adjointe, département d'anthropologie, université de Montréal
  • : maître de conférences à l'université de Paris-VII (U.F. d'anthropologie-ethnologie)
  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Pour citer cet article

Marie-Pierre BOUSQUET, Universalis et Roger RENAUD. AMÉRINDIENS - Amérique du Nord [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

États-Unis, XIX<sup>e</sup> siècle - crédits : Encyclopædia Universalis France

États-Unis, XIXe siècle

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Reddition de Geronimo

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Leçons d'agriculture

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