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ÉLISABÉTHAIN THÉÂTRE

Le monde du théâtre

Les théâtres

À l'origine, les lieux scéniques étaient les églises pour les textes sacrés et le rituel, puis la rue pour les mystères, la place publique et les cours d'auberge pour les autres productions : moralités, interludes, comédies. Voilà pour les représentations publiques. L'auberge du Bull dans Bishopgate Street et du Bel Savage de Ludgate Hill étaient parmi les plus notoires pour les pièces qu'on y jouait. Les spectateurs s'installaient dans la cour rectangulaire et sur la galerie qui courait le long du premier étage. Cette disposition se retrouvera lorsqu'on construira des théâtres. Il y avait aussi des enceintes qui servaient à des spectacles populaires autres que du théâtre. Ainsi on donnait des duels au sabre ou à l'épée, des combats de taureaux et d'ours contre des chiens. L'ours était attaché à un poteau : d'où la métaphore de Macbeth acculé à la mort : « Ils m'ont attaché au poteau » (acte V, sc. vii).

Par ailleurs, les universités, les quatre écoles de droit de Londres (inns of court), la cour, les châteaux et les résidences des grands seigneurs offraient aussi des lieux scéniques dans leurs chapelles, leurs halls ou leurs réfectoires. C'étaient là des représentations privées ; des comédiens, amateurs d'abord, puis, à mesure que se formèrent des troupes, professionnels, furent invités à y présenter des spectacles.

Le premier théâtre public, appelé précisément The Theatre, fut construit en 1576, dans Shoreditch, au nord de Londres, hors de l'enceinte de la Cité, hostile au théâtre, par James Burbage ( ?-1597), dont le fils Richard, comédien lui-même, compagnon de Shakespeare, joua un rôle très important dans la vie des théâtres. L'année suivante fut construit The Curtain (La Courtine, et non pas Le Rideau, parce qu'il s'élevait près de la courtine, fortification de la Cité), puis Newington Butts un peu plus tard. Ce fut vers 1590 que d'autres théâtres furent construits, au sud de la Tamise, toujours hors de l'enceinte de la Cité : le théâtre de la Rose (1587 ?), qu'illustra Edward Alleyn (1566-1626), le grand rival de Burbage, au service du lord-amiral ; ceux du Swan (Le Cygne, 1595), de la Fortune (1599), construit par Philip Henslowe ( ?-1616), le grand entrepreneur de spectacles à qui nous devons un précieux répertoire des pièces jouées dans ses théâtres ; du Globe, enfin, qui abrita la troupe de Shakespeare dès 1598. The Hope (L'Espoir) fut construit tardivement, en 1613.

Tous ces théâtres étaient bâtis sur le même modèle : une enceinte circulaire avec galeries en bois couvertes (« this wooden O », « cet O en bois », comme dit le prologue de Henry V, ce qui a donné naissance à l'expression « théâtre en rond ») ; un parterre sur lequel se projetait le plateau scénique adossé au mur du fond et qui comportait deux ou trois étages à divers usages théâtraux. Le parterre était à ciel ouvert, et les spectateurs, debout, entouraient les tréteaux de trois côtés. Il n'y avait pas de rideau de scène, ni de décors, mais seulement des accessoires, tels que trônes, lits, autels, portes, arbres, nuages, étoiles, apparitions de la lune ou du soleil, mufles de bêtes fauves, crânes, machines diverses et même artillerie pour les batailles. Les costumes étaient soignés et parfois somptueux pour certains acteurs. Les représentations avaient lieu avant la tombée de la nuit. L'entrée au parterre coûtait un penny (un sol).

Il y eut aussi des théâtres couverts, dits privés, et notamment le célèbre Black Friars, installé dès 1576 dans un ancien monastère de dominicains que la troupe de Shakespeare utilisera après 1608. Les représentations se donnaient le soir en toute saison. On pouvait donc jouer à la lumière artificielle des flambeaux et des torches et[...]

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Écrit par

  • : doyen honoraire de la faculté des lettres et sciences humaines d'Aix-en-Provence

Classification

Pour citer cet article

Henri FLUCHÈRE. ÉLISABÉTHAIN THÉÂTRE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

William Shakespeare - crédits : Fine Art Images/ Heritage Images/ Getty Images

William Shakespeare

Christopher Marlowe - crédits : GL Archive / Alamy / Hemis

Christopher Marlowe

Autres références

  • ANGLAIS (ART ET CULTURE) - Littérature

    • Écrit par Elisabeth ANGEL-PEREZ, Jacques DARRAS, Jean GATTÉGNO, Vanessa GUIGNERY, Christine JORDIS, Ann LECERCLE, Mario PRAZ
    • 28 170 mots
    • 30 médias
    Le monde à la fois fantastique et réel du théâtre élisabéthain (ces cris du cœur qui jaillissent d'un dialogue souvent décousu ou d'une déclaration retentissante) aboutit chez Shakespeare à la sérénité du chef-d'œuvre, particulièrement dans les drames majeurs. Car le drame shakespearien est inégal,...
  • BALDWIN WILLIAM (mort en 1570?)

    • Écrit par Henri FLUCHÈRE
    • 462 mots

    Le nom de William Baldwin, poète, philosophe, historien, mais aussi imprimeur et éditeur, a survécu grâce au Miroir des magistrats (The Mirror for Magistrates, 1559), dont il fut le premier éditeur.

    Baldwin avait composé un traité de philosophie morale (1547), adapté les Cantiques de Salomon...

  • BEAUMONT FRANCIS (1584-1616)

    • Écrit par Henri FLUCHÈRE
    • 320 mots

    Le nom de Francis Beaumont est indissolublement lié à celui de John Fletcher dont il fut le collaborateur constant, de 1606 jusqu'à sa mort. D'abord étudiant à Oxford, il vint faire du droit au Middle Temple à Londres, vers 1600, où il ne manqua pas de rencontrer les brillants esprits de l'époque,...

  • BLACKFRIARS THÉÂTRE DES

    • Écrit par Universalis
    • 368 mots

    Le nom de Blackfriars désigne en fait à Londres deux théâtres distincts, dont le second est resté célèbre pour avoir abrité durant la saison d'hiver (après 1608) les King's Men, la troupe dont faisait partie Shakespeare comme dramaturge attitré mais aussi comme acteur.

    Le nom de...

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