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LINGUISTIQUE Le langage au carrefour des disciplines

Le langage, objet complexe et multiforme, n'est pas l'apanage du linguiste. Nombre d'autres disciplines y sont confrontées : philosophie, psychologie, psychanalyse, neurophysiologie, sociologie, ethnologie, anthropologie, littérature, mais aussi mathématiques, logique, physique, informatique ; on peut dire que tous les grands secteurs scientifiques et techniques, depuis les sciences de l'homme et de la société jusqu'aux sciences de l'ingénieur, en passant par les sciences du vivant, sont convoqués par l'étude du langage et ses applications, et croisent de ce fait la réflexion linguistique.

Le langage peut en effet être abordé en tant que faculté spécifique de l'espèce humaine, ou bien en tant que phénomène social, mais aussi comme code (oral ou écrit) et comme mode d'inscription des textes (notamment littéraires), ou encore comme matière à applications pédagogiques et(ou) technologiques.

Le langage, faculté de l'espèce humaine

La faculté de langage, qui se traduit par la maîtrise d'une ou plusieurs langues, est propre à l'espèce humaine. Aucun autre être vivant ne parle, même si, à l'évidence, les animaux communiquent entre eux. La faculté de langage implique tout à la fois la capacité d'articuler des sons en les reliant à des significations, une maîtrise de la pensée abstraite et réflexive, et une créativité permettant de produire et de comprendre un nombre infini de phrases nouvelles : toutes aptitudes dont les abeilles aussi bien que les perroquets sont totalement dépourvus, et que même les chimpanzés (dont les performances dites linguistiques se heurtent très vite à des limites) semblent incapables d'acquérir. Attribuer cette faculté de langage à d’hypothétiques extra-terrestres, comme le fait la science-fiction, relève, selon Frédéric Landragin, d’une méconnaissance des mécanismes constitutifs du langage humain.

Il y a là matière à réflexion philosophique : quelles sont les conditions de possibilité du langage humain ? En quoi caractérise-t-il le fait d'être homme ? Quelles relations existe-t-il entre le langage et la pensée ? Ces questions, qui concernent aussi le neurobiologiste et le psychologue, sont typiquement de celles sur lesquelles se penche la philosophie du langage – en particulier la tradition phénoménologique issue de Husserl, qui insiste sur le rôle joué par la conscience et l'« intentionnalité » dans l'activité de langage. Notons au passage que le champ de la philosophie du langage est loin d'être clairement délimité, et que l'on trouve également sous cette dénomination des travaux de nature diverse, portant par exemple sur la conception du langage chez tel ou tel philosophe, sur les relations entre logique et langage, sur le rapport entre les expressions du « langage ordinaire » et la méthode philosophique, ou encore sur la philosophie de la linguistique.

De leur côté, la psycholinguistique et la neurolinguistique tentent de comprendre comment le langage fonctionne chez les sujets humains, et comment il peut aussi présenter des dysfonctionnements.

La psycholinguistique

La psycholinguistique s'intéresse aux processus psychologiques qui sous-tendent la production et la compréhension du langage, ainsi qu'aux modalités d'acquisition du langage, d'apprentissage de la langue maternelle et des langues secondes, et au phénomène de bilinguisme. Les théories psycholinguistiques ont connu trois grandes étapes historiques. La première, dans les années 1950, liée au structuralisme, empruntait au behaviorisme (B. F. Skinner) et à la cybernétique (C. Shannon). La deuxième, dans les années 1960, était dominée par le modèle de la grammaire générative (N. Chomsky). Enfin la troisième (à partir des années 1970), beaucoup plus diversifiée, s'est intéressée aux processus cognitifs en jeu, cherchant[...]

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Pour citer cet article

Catherine FUCHS. LINGUISTIQUE - Le langage au carrefour des disciplines [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Cerveau et langage, un fonctionnement en réseau - crédits : 2016 Vassal et al. PLoS ONE 11(3): e0152614 (CC BY 4.0)

Cerveau et langage, un fonctionnement en réseau

Ferdinand de Saussure - crédits : F.H. Jullien/ AKG Images

Ferdinand de Saussure

Orphée jouant de la lyre parmi les guerriers thraces, vase attique - crédits : AKG Images

Orphée jouant de la lyre parmi les guerriers thraces, vase attique

Autres références

  • AFFIXE, linguistique

    • Écrit par Robert SCTRICK
    • 382 mots

    Lors de l'inventaire des morphèmes d'un système linguistique, on est conduit à distinguer plusieurs sortes d'unités identifiables dans l'ordre phonétique et partageant la caractéristique de se rapporter au plan de la signification : parmi ces unités, les unes ont un contenu...

  • ALLÉGORIE, notion d'

    • Écrit par François TRÉMOLIÈRES
    • 1 454 mots
    Cette dernière lui préfère néanmoins les termes métaphore, que nous rencontrions pour commencer, et image. La linguistique et la théorie de la littérature, héritières dans une certaine mesure du romantisme, ont renouvelé l'intérêt pour ce que Tzvetan Todorov appelle « la décision d'interpréter...
  • AMBIGUÏTÉ, linguistique

    • Écrit par Pierre LE GOFFIC
    • 685 mots

    Un mot ou un énoncé sont dits ambigus quand ils sont susceptibles d'avoir plusieurs interprétations. Cette définition intuitive étant très large, on s'efforce en linguistique de la préciser en circonscrivant, parmi tous les malentendus, équivoques et autres imprécisions du langage,...

  • ANALYSE & SÉMIOLOGIE MUSICALES

    • Écrit par Jean-Jacques NATTIEZ
    • 5 124 mots
    • 1 média
    À l'époque du structuralisme triomphant, la sémiologie musicale rencontre les modèles d'analyse linguistique pour des raisons à la fois épistémologiques et esthétiques.
  • Afficher les 135 références

Voir aussi