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VELÁZQUEZ DIEGO (1599-1660)

Portraits du peuple de Séville, portraits de la famille royale, peinture religieuse, scènes mythologiques, nus, paysages, natures mortes, sujets historiques : Velázquez a dominé tous les genres picturaux pratiqués en Europe au xviie siècle. Son œuvre s'inspire des modèles flamands et italiens mais fait preuve d'un sens exceptionnel de la réalité – dans le traitement de l'expression, de la lumière ou de la mise en scène – qui provoqua en particulier l'admiration de Manet. Homme cultivé, Velázquez sut mener une brillante carrière de courtisan qui le conduisit aux plus hautes charges de la cour madrilène ; elle lui permit surtout de faire, pendant plus de trente ans, le portrait du roi Philippe IV confronté au déclin inéluctable de son royaume.

Apprentissage et début de carrière à Séville

<it>Vieille Femme faisant frire des œufs</it>, D. Velázquez - crédits :  Bridgeman Images

Vieille Femme faisant frire des œufs, D. Velázquez

Velázquez naît à Séville en 1599, dans une famille de petite noblesse. La ville connaît alors l'apogée d'un développement spectaculaire, fondé sur une activité portuaire tournée vers l'Amérique. L'installation de nombreux ordres religieux à vocation missionnaire favorise une intense activité artistique. Séville est en outre une ville d'humanistes et de poètes qui se réunissent dans des académies littéraires également fréquentées par le clergé érudit de la cathédrale et par les grands aristocrates. Peintre parfois maladroit mais bon théoricien, excellent pédagogue, Francisco Pacheco (1564-1644) est l'un de ces beaux esprits. Entré chez lui en apprentissage en 1611, Velázquez se fait remarquer, dans ce milieu académique, par son goût pour le travail d'après nature et pour le portrait ; il obtient sa licence de peintre en 1617 et, ayant épousé la fille de Pacheco, Juana, il mène à Séville, jusqu'en 1623, une carrière indépendante. Son goût du réel s'impose dans les tableaux de dévotion (Immaculée Conception et Saint Jean à Patmos, National Gallery, Londres) mais surtout dans deux genres précis, le portrait et le bodegón (nature morte, ou scène de cuisine ou de marché) : probablement inspiré par les peintures flamandes d'Aertsen ou de Beuckelaer et par les scènes de genre de l'Italie du Nord, influencé par le climat littéraire picaresque, Velázquez rompt avec la tradition sévillane en imaginant des scènes de cuisine ou de taverne. La Vieille Femme faisant frire des œufs (1618, National Gallery of Scotland, Édimbourg) illustre bien ce parti pris de réalisme : jeux d'éclairage appuyés sur les couleurs assourdies, fond sombre, indépendance de chaque volume – objet ou personne – imposée par la netteté des formes et par la vision rapprochée de la scène. Le Marchand d'eau (Apsley House, Wellington Museum, Londres), qui est aussi une allégorie des Trois Âges de la vie, rappelle l'importance de la littérature emblématique et morale contemporaine.

Le premier but du voyage de Velázquez à Madrid en 1622 n'est pas d'obtenir une place à la cour mais d'élargir sa culture artistique en visitant l'Escorial et Tolède ; l'influence de Greco se devine dans L'Imposition de la chasuble à saint Ildephonse (musée des Beaux-Arts, Séville) et dans Luis de Gongora (Museum of Fine Arts, Boston), œuvre qui semble sculptée dans une pâte épaisse, portrait sans concession qui révèle magistralement l'inquiétude qui ronge le poète. À peine est-il rentré à Séville que meurt l'un des peintres de la cour ; poussé par le cercle de Sévillans réunis par le Premier ministre, le comte d'Olivares, Velázquez reprend le chemin de la capitale ; il peint avec succès le portrait (perdu) du jeune Philippe IV et, en octobre 1626, il est nommé peintre du roi.

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Pour citer cet article

Véronique GERARD-POWELL. VELÁZQUEZ DIEGO (1599-1660) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

<it>Vieille Femme faisant frire des œufs</it>, D. Velázquez - crédits :  Bridgeman Images

Vieille Femme faisant frire des œufs, D. Velázquez

<it>Portrait d'un jeune homme</it>, D. Velázquez - crédits : J. Martin/ AKG-images

Portrait d'un jeune homme, D. Velázquez

<it>Scène de cuisine avec le Christ dans la maison de Marthe et Marie</it>, D. Velázquez - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Scène de cuisine avec le Christ dans la maison de Marthe et Marie, D. Velázquez

Autres références

  • VELÁZQUEZ (exposition)

    • Écrit par Bernard SESÉ
    • 1 154 mots

    Le but de l’exposition organisée par le musée du Louvre et le Grand Palais du 25 mars au 13 juillet 2015 était notamment de proposer un panorama complet et cohérent de l’évolution artistique de Velázquez. Peinture religieuse et mythologique, portraits de cour et autoportraits : grâce notamment...

  • AUTOPORTRAIT, peinture

    • Écrit par Robert FOHR
    • 3 573 mots
    • 6 médias
    ...l'image s'élargisse jusqu'à mobiliser tout l'atelier, le propos se diversifie : si, avec Jan Steen et Frans I Van Mieris, il ne dépasse guère l'anecdote, Velázquez (Les Ménines, 1656, musée du Prado, Madrid) trouve là l'occasion de se livrer à un jeu fort savant sur la continuité de l'espace réel et de...
  • BAROQUE

    • Écrit par Claude-Gilbert DUBOIS, Pierre-Paul LACAS, Victor-Lucien TAPIÉ
    • 20 831 mots
    • 23 médias
    ...Philippe III, Philippe IV furent aussi des constructeurs de résidences royales et des collectionneurs, et la commande royale appela de Séville à Madrid Velázquez (1599-1660) dont un voyage à Rome avait élargi l'expérience (son portrait du pape Innocent X). Coloriste, paysagiste et peintre épique,...
  • CASTILLE

    • Écrit par Marcel DURLIAT, Universalis, Philippe WOLFF
    • 10 285 mots
    • 12 médias
    L'époque de Philippe IV est dominée par la forte personnalité de Velázquez. Il vint de Séville et, avant de conquérir le roi lui-même, il dut sa faveur au comte-duc d'Olivares. Peintre officiel, il renouvela le genre du portrait de Cour, comme il fut aussi un maître de la peinture pure, soucieux avant...
  • ESPAGNE (Arts et culture) - L'art espagnol

    • Écrit par Marcel DURLIAT
    • 5 038 mots
    • 11 médias
    ... de l'État décline, en raison de la situation catastrophique de ses finances. Le Siècle d'or n'a connu qu'un seul grand artiste profane, Velázquez, le peintre de la cour de Philippe IV. Son rôle dépasse d'ailleurs largement celui d'un témoin de son temps, du fait de l'ampleur de sa vision...

Voir aussi