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THÉOPHANE LE GREC (entre 1330 et 1340-entre 1405 et 1415)

Peintre d'origine byzantine, Théophane le Grec s'est illustré en Russie. Nous connaissons assez peu de chose sur sa vie ; les faits essentiels de sa biographie sont rapportés par l'épître d'Épiphane le Très Sage (Premudryï) à Cyrille de Tver, écrite vers 1415. Son nom et son travail sont aussi mentionnés dans la troisième chronique de Novgorod et dans la chronique moscovite de la Trinité. Théophane est né dans l'Empire byzantin. Il a travaillé à Constantinople, à Chalcédoine, à Galata, à Kaffa (Théodosie, actuelle Feodossia) ; c'est probablement de Kaffa qu'il se rend à Novgorod vers 1375. Il aurait travaillé aussi à Nijni-Novgorod sur la Volga. Il vécut sans doute assez longtemps à Moscou, où son activité artistique est mentionnée : il y décore les églises de la Nativité de la Vierge (1395), de l'Archange (1399) et de l'Annonciation (1405) et, fait intéressant, orne également de fresques, malheureusement disparues, le palais de certains princes. Il se consacre aussi à l'enluminure de manuscrits (les évangiles de Kochka et de Khitrovo semblent bien être sortis de son atelier).

<it>La Transfiguration</it>, Théophane le Grec - crédits : AKG-images

La Transfiguration, Théophane le Grec

Théophane a eu une influence importante dans deux domaines : la peinture murale et les icônes. Il apportait en Russie l'expression constantinopolitaine des mouvements renaissants du xive siècle, quoiqu'il semble avoir été marqué par l'austérité du courant hésychaste. Il joint un sens profond du monumental à une grande aisance, et, dans la fresque, son art économe se limite volontairement aux traits essentiels, presque schématiques, tandis que, dans les icônes, il allie force et finesse et donne un modelé savant aux visages. Une partie des panneaux de l'iconostase de l'église de l'Annonciation au Kremlin de Moscou peut lui être attribuée, notamment la Vierge de la Déisis, œuvre de tout premier plan. On a rapproché du style de Théophane la belle icône de la Transfiguration (galerie Tretiakov, Moscou), marquée par un sens dramatique et un dynamisme profonds. Si l'art de Théophane a bénéficié des traditions de la peinture monumentale de Novgorod et de Pskov dont il voyait de nombreux exemples, il a apporté aussi aux peintres russes un style nouveau, « expressionniste ». Ses fresques extraordinaires de l'église de la Transfiguration-du-Sauveur, à Novgorod (1378), et celle qu'on attribue à son atelier ou à ses élèves à Saint-Théodore-Stratilate, également à Novgorod, introduisent une tension et un abandon du détail au profit de l'essentiel qui annoncent certaines formes d'art moderne. Ces fresques sont d'une force d'expression inhabituelle : prophètes, Pères de l'Église, stylites, anges ont les traits marqués ou relevés de touches blanches rapides qui forment une « sténographie picturale », par exemple les visages de saint Akakios et de saint Macaire.

Les fresques de l'église de la Dormition à Volotovo révèlent l'influence de Théophane le Grec sur l'école de Novgorod.

— Jean BLANKOFF

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Écrit par

  • : professeur à l'Institut de philologie et d'histoire orientales et slaves, Bruxelles

Classification

Pour citer cet article

Jean BLANKOFF. THÉOPHANE LE GREC (entre 1330 et 1340-entre 1405 et 1415) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

<it>La Transfiguration</it>, Théophane le Grec - crédits : AKG-images

La Transfiguration, Théophane le Grec

Autres références

  • ICÔNE

    • Écrit par Olivier CLÉMENT, Catherine JOLIVET-LÉVY
    • 4 805 mots
    • 3 médias
    Avec l'arrivée de Théophane le Grec, venu de Constantinople à Novgorod (vers 1378), puis à Moscou (vers 1395), une nouvelle vague d'influences byzantines (de l'époque des Paléologues) se répandit en Russie. La Transfiguration de la Galerie Tretiakov est un bel exemple du style savant...
  • ICONOSTASE

    • Écrit par Jean GOUILLARD
    • 1 217 mots
    • 1 média

    Pour les contemporains, l'iconostase évoque cet imposant dressoir d'images saintes qui, dans les communautés orthodoxes de souche gréco-byzantine, isole le fidèle de l'espace sacré par excellence, le sanctuaire. Dans l'usage originel, eikonostasion définissait le...

  • JÉSUS ou JÉSUS-CHRIST

    • Écrit par Joseph DORÉ, Pierre GEOLTRAIN, Jean-Claude MARCADÉ
    • 21 165 mots
    • 26 médias
    ...(Novgorod, Pskov, Tver, Rostov-Souzdal, Moscou). Il suffit de comparer les œuvres des trois illustres peintres de la grande époque de l'icône russe : le Pantocrator (1378) dans la fresque du Sauveur à la cathédrale de la Transfiguration de Théophane le Grec, à Novgorod, garde des accents byzantins...
  • ROUBLEV ANDREÏ (1370 env.-env. 1430)

    • Écrit par Jean BLANKOFF
    • 715 mots
    • 4 médias

    Quoique nous n'ayons aucune preuve qu'il ait été son élève, on considère parfois le peintre russe Andreï Roublev (prononcer Roubliov) comme le « continuateur » de Théophane le Grec. Il serait originaire de Pskov, selon une hypothèse que rien n'est venu confirmer. La vie et l'œuvre...

Voir aussi