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ROUBLEV ANDREÏ (1370 env.-env. 1430)

<it>Madone</it>, entourage d'A. Roublev - crédits :  Bridgeman Images

Madone, entourage d'A. Roublev

Quoique nous n'ayons aucune preuve qu'il ait été son élève, on considère parfois le peintre russe Andreï Roublev (prononcer Roubliov) comme le « continuateur » de Théophane le Grec. Il serait originaire de Pskov, selon une hypothèse que rien n'est venu confirmer. La vie et l'œuvre de Roublev sont liées à l'école de Moscou, dont il fut le représentant le plus génial. La réputation de Roublev était solidement établie de son vivant déjà, mais on ignore presque tout de son existence. Il était moine, et son activité s'est exercée aux monastères de la Trinité-Saint-Serge (de 1930 à 1991, Zagorsk, puis Serguiev Possad) et Andronikov (Moscou, musée Roublev). Son œuvre est, en effet, liée au développement de Moscou, quoiqu'elle possède certains traits stylistiques propres à l'art de Novgorod et à la tradition de Vladimir-Souzdal. Son talent s'est affirmé au moment du développement rapide de la principauté de Moscou ; l'artiste a d'ailleurs travaillé pour le prince de Moscou et pour Youri de Zvenigorod. Assimilant les traditions dont il héritait, il a créé un art original et accompli, adouci, poétique, libéré de tout ascétisme gratuit, tout d'émotion et d'harmonie mais empreint de force.

<it>Le Sauveur</it>, A. Roublev - crédits : AKG-images

Le Sauveur, A. Roublev

La première œuvre qu'on attribue à Roublev subsiste dans les fragments de fresques, assez détériorés (les médaillons de Flor et Lavr), qui ornent les piliers de l'église de la Dormition de Zvenigorod (1400 env.). On lui attribue de même, avec une certitude presque complète, des icônes, conservés à la galerie Tretiakov, provenant d'une iconostase de Zvenigorod, peinte au début du xve siècle. Les visages, même abîmés, de l'archange Michel, de Paul et surtout du Sauveur, l'une des plus remarquables icônes russes, sont d'une exceptionnelle beauté. La fermeté et la douceur, la force et l'élégance s'y conjuguent ; le Christ Pantocrator byzantin est devenu le Sauveur russe ; les lèvres fines et le nez mince, la moustache tombante, les yeux profonds témoignent d'une grande sûreté de moyens. En 1405, Théophane le Grec, Prokhor de Gorodets et Andreï Roublev peignent l'iconostase de l'église de l'Annonciation du Kremlin de Moscou. Certaines icônes, dénotant un style plus novateur, un rythme, un mouvement et une légèreté caractéristiques de l'artiste, sont attribuées à Roublev. C'est d'après ce modèle que seront peintes ensuite les iconostases de la cathédrale de Vladimir et celle de la Trinité-Saint-Serge qui répètent celles de Moscou.

<it>Trinité, ou Philoxénie d'Abraham</it>, A. Roublev - crédits :  Bridgeman Images

Trinité, ou Philoxénie d'Abraham, A. Roublev

En 1408, le prince de Moscou envoie à Vladimir Roublev et son compagnon Daniel pour orner de fresques la cathédrale de la Dormition ; une partie de cet ensemble est conservée. Dans ces fresques qui représentent le Jugement dernier, Pierre, l'ange du Jugement et les femmes des justes sont particulièrement émouvants. Dans la maturité de son talent, Roublev crée son chef-d'œuvre, la célèbre Trinité, ou Philoxénie d'Abraham, autrefois à la Trinité-Saint-Serge, actuellement à la galerie Tretiakov, qui symbolise l'apparition de Dieu à Abraham et à Sarah sous la forme de trois anges pèlerins. Chez Roublev, ce sujet traditionnel est traité de façon nouvelle, originale, purement spirituelle, la composition comme l'exécution sont d'une perfection rarement atteinte. Le mouvement circulaire donné à l'œuvre est symbole d'unité et d'harmonie. Les couleurs sont vives, légères et transparentes, lumineuses. L'œuvre, peinte soit vers 1411, soit entre 1422 et 1423, a été analysée par de nombreux chercheurs, théologiens et historiens d'art. De 1425 à 1428, Roublev peint d'autres panneaux, notamment les Fêtes, pour la même église de la Trinité.

<it>Saint Nicolas</it>, icône - crédits : AKG-images

Saint Nicolas, icône

Roublev et son école représentent tout un mouvement dans l'art russe ancien et[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'Institut de philologie et d'histoire orientales et slaves, Bruxelles

Classification

Pour citer cet article

Jean BLANKOFF. ROUBLEV ANDREÏ (1370 env.-env. 1430) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

<it>Madone</it>, entourage d'A. Roublev - crédits :  Bridgeman Images

Madone, entourage d'A. Roublev

<it>Le Sauveur</it>, A. Roublev - crédits : AKG-images

Le Sauveur, A. Roublev

<it>Trinité, ou Philoxénie d'Abraham</it>, A. Roublev - crédits :  Bridgeman Images

Trinité, ou Philoxénie d'Abraham, A. Roublev

Autres références

  • ANNEAU D'OR

    • Écrit par Olga MEDVEDKOVA
    • 4 054 mots
    • 2 médias
    ...l'église russe « à cinq coupoles » (pjatiglavaja). Des fragments de fresques datant des années 1160 à 1180 sont encore visibles à l'intérieur. Mais la plus grande partie de la décoration picturale qui a pu être conservée jusqu'à nos jours fut réalisée bien plus tard, en 1408, par les célèbres...
  • ICÔNE

    • Écrit par Olivier CLÉMENT, Catherine JOLIVET-LÉVY
    • 4 805 mots
    • 3 médias
    ...de la Russie, va s'imposer, à la fin du xive et au xve siècle, comme la principale école de peinture d'icônes. Son meilleur représentant est Andreï Roublev (1360/1370-env. 1430), dont l'art exerça une influence importante sur la peinture du xve siècle. S'éloignant de l'intensité dramatique...
  • ICONOSTASE

    • Écrit par Jean GOUILLARD
    • 1 217 mots
    • 1 média

    Pour les contemporains, l'iconostase évoque cet imposant dressoir d'images saintes qui, dans les communautés orthodoxes de souche gréco-byzantine, isole le fidèle de l'espace sacré par excellence, le sanctuaire. Dans l'usage originel, eikonostasion définissait le...

  • JÉSUS ou JÉSUS-CHRIST

    • Écrit par Joseph DORÉ, Pierre GEOLTRAIN, Jean-Claude MARCADÉ
    • 21 165 mots
    • 26 médias
    ..., à Novgorod, garde des accents byzantins avec une violente et nerveuse expression de la touche picturale ; en revanche, quelques années plus tard, Le Sauveur de Zvénigorod (vers 1400, galerie Trétiakov, Moscou) d'AndreïRoublev reflète un type anthropologique d'homme russe qui exprime l'harmonie...

Voir aussi