RWANDA
Nom officiel | République rwandaise |
Chef de l'État et du gouvernement | Paul Kagame - depuis le 24 mars 2000 |
Capitale | Kigali |
Langue officielle | Français , Kinyarwanda , Swahili , Anglais |
Population |
13 954 471 habitants
(2023) |
Superficie |
26 340 km²
|
Le Rwanda, souvent nommé « pays des mille collines », est enclavé dans les hautes terres de l'Afrique des Grands Lacs, un peu au sud de l'équateur. De taille modeste, 26 338 kilomètres carrés seulement, ce pays très densément peuplé, avec 10 412 820 habitants selon les estimations de 2010, profondément rural (82,6 % de la population), dépourvu de ressources minières et énergétiques significatives, est aussi très pauvre. C'est donc sur les ressources de son agriculture et de l'aide internationale que repose son développement.
Des caractéristiques socioculturelles communes ont contribué à forger cette nation dont les diverses composantes – Hutu, Tutsi et Twa – usaient, et usent toujours, de la même langue, le kinyarwanda. Pour autant, l'histoire nationale s'est accompagnée au fil du temps, sur fond de pénurie foncière et de manque de perspectives pour les jeunes, de l'apparition et de l'exacerbation de tensions politiques et sociales internes, souvent instrumentalisées en conflits « ethniques » ; récurrentes avant, pendant et après la colonisation européenne, elles ont culminé avec le génocide de 1994.
Le défi de la reconstruction, sociale, politique, économique est aujourd'hui à l'ordre du jour : il est à la mesure, immense, du traumatisme et des destructions du génocide.
Géographie
Le Rwanda, situé à l'ouest du lac Victoria, prend place entre l'Ouganda au nord, le Burundi au sud, la Tanzanie à l'est et la République démocratique du Congo à l'ouest. Il est, par sa géographie et son histoire, à la charnière de l'Afrique orientale et de l'Afrique centrale, éloigné de plus de 1 000 kilomètres du littoral de l'océan Indien, et enclavé au cœur du continent.
Un pays de hautes terres bien arrosées
Le pays s'inscrit entièrement dans les hautes terres d'Afrique orientale où le socle précambrien a été soulevé, déformé et fracturé lors de la formation des rifts. Il se situe sur la bordure orientale du Rift occidental. D'ouest en est, sur moins de 200 kilomètres, on distingue trois ensembles topographiques :
– Le fossé d'effondrement est occupé par le lac Kivu, à 1 460 mètres d'altitude, partagé avec le Congo ; plus au sud, il se prolonge par la petite plaine de l'Imbo, qui débouche au Burundi sur le lac Tanganyika et constitue la seule portion du Rwanda située à moins de 1000 mètres.
– Le grand escarpement de la crête Congo-Nil, ligne de partage des eaux entre les deux grands fleuves, domine le lac de plus de 1000 mètres.
– Le versant oriental de cet axe montagneux a une altitude moyenne qui décroît progressivement vers l'est, de 2 000 m à 1 200 m environ. Malgré sa topographie accidentée d'innombrables collines séparées par autant de vallées à fond plat, il est souvent appelé Plateau central.
De plus, sur une zone de fracturation transversale, se dresse, sur les frontières nord, la chaîne des Virunga (4 507 m au Karisimbi), l'un des ensembles volcaniques les plus spectaculaires d'Afrique. À l'est (Mutara et Bugesera) se trouvent les rares régions au relief moins accidenté.
Les traits essentiels du climat sont liés à l'altitude : des températures modérées (moyennes de l'ordre de 20 0C à 1 500 m), des précipitations annuelles relativement abondantes, (800 mm dans l'est, de 1 000 à 1 600 mm partout ailleurs). Les deux saisons des pluies, centrées sur avril et novembre, rythment les saisons culturales et sont marquées par de fortes irrégularités interannuelles, risque récurrent pour la production agricole.
Un pays très densément peuplé
Au Rwanda, le fait démographique est tyrannique. Il est ainsi au cœur de la géographie et des questions de développement.
Le pays conserve une croissance naturelle forte (de 2 à 3 % par an). Une tendance à la baisse de certains indicateurs est néanmoins à relever : l'indice synthétique de fécondité serait passé de 8,3 enfants par femme en 1980 à 5,2 en 2008 et, dans le même temps, le taux de natalité de 52 à 39 ‰.
Les conséquences démographiques du génocide ont été d'une ampleur extrême : entre 500 000 et 1 000 000 de morts, de gigantesques déplacements de populations tant à l'intérieur des frontières qu'au-delà, des traumatismes familiaux sans précédent (orphelins, multiplication des ménages monoparentaux et des familles recomposées dans des conditions dramatiques), camps de réfugiés, regroupements de populations, etc. Si le génocide ne constitue, peut-être, qu'une parenthèse dans la dynamique démographique, il a produit incontestablement des conséquences durables, par les redistributions spatiales qu'il a engendrées et les bouleversements sociaux qu'il a provoqués.
Le processus de densification de l'espace, entamé après la Seconde Guerre mondiale, se poursuit donc : 77 hab./km2 en 1948, 183 en 1978, 283 en 1991, 395 en 2009. Le Rwanda est plus que jamais le pays le plus densément peuplé du continent africain.
L'habitat dispersé prédomine. La cellule de base de l'habitat rural est le rugo, l'enclos familial entouré par les parcelles cultivées ; les campagnes sont traditionnellement dépourvues de formes d'habitat aggloméré de type village. Cette dispersion n'exclut pas, au contraire, une forte structuration de l'espace rural par les collines, espaces de proximité où s'entremêlent de nombreuses relations de solidarité et de compétition. Cette caractéristique essentielle évolue actuellement : d'une part, l'amélioration du réseau routier a stimulé des processus de regroupement linéaire ou agglomérés autour des marchés, des paroisses, des équipements de santé, des services administratifs ; d'autre part, surtout depuis le génocide, une politique forte de villagisation a été mise en place dans certaines régions.
Comme le village, la ville est encore rare : le taux d'urbanisation, de 6 % seulement au recensement de 1991, n'était encore que de 17,6 % en 2009. Le fait urbain, malgré la croissance spectaculaire récente de la capitale, Kigali (la circonscription de Kigali ville comptait 947 000 habitants en 2010, soit 47,3 % de la population urbaine de tout le pays), demeure un phénomène ponctuel dans la mesure où la trame des villes secondaires est peu fournie. Cette nouvelle donne urbaine sera sans doute le vecteur de mutations de fond dans un proche avenir, ne serait-ce qu'en raison de la médiocrité des perspectives de progrès dans ces campagnes aux effectifs pléthoriques, offrant bien peu d'espoir aux générations nouvelles.
Un pays essentiellement rural
L'essence de l'identité rwandaise est celle des campagnes et des activités agro-pastorales.
Le système de la paysannerie rwandaise s'inscrit dans une trame foncière faite d'innombrables micro-exploitations (souvent 1 hectare ou moins) aux parcelles dispersées entre les sommets, les versants et les bas-fonds ; la plupart d'entre elles s'adonnent à la polyculture avec, quelquefois, un peu d'élevage. La bananeraie familiale occupe une place importante : les fruits fournissent la base d'une boisson, communément appelée « bière de banane », fabriquée dans chaque rugo, consommée, échangée, vendue, offerte, partagée, qui cimente ainsi les relations sociales sur la colline. Même si elle tend à reculer au profit des boissons « modernes », elle marque les paysages, d'autant que cette plante, cultivée partout à moins de 2000 mètres, contribue aussi à l'alimentation des hommes (pâte, fruits) et des animaux (fourrage), à la fourniture de matériaux de construction (toits, clôtures), à la fumure des champs, etc. Avec la bananeraie, l'assolement saisonnier haricot-sorgho prédomine, complété par du maïs, des patates douces, un peu de manioc, de petits pois et d'autres produits encore. De petites parcelles de caféiers, et de théiers en haute altitude, complètent ce dispositif. Le tout forme un paysage de mosaïque dense et complexe, couvrant la quasi-totalité des surfaces disponibles.
On a longtemps différencié les Hutu cultivateurs et les Tutsi éleveurs ; ces deux entités ne sont pas des ethnies au sens habituel du terme, car tous parlent la même langue, le kinyarwanda, partagent de nombreuses valeurs culturelles, et cohabitent depuis longtemps. Cette différenciation, politiquement instrumentalisée en période de crise, plonge ses racines dans une histoire au cours de laquelle les possesseurs de bétail furent en situation de pouvoir et de prestige social. Une approche géographique contemporaine ne peut plus reposer sur ce clivage, tant la séparation agriculteurs - éleveurs est devenue caduque. Si le gros bétail demeure pour un petit nombre un capital, l'élevage de bovins a reculé au rythme des disponibilités en pâturage ; c'est vers un petit élevage (caprins, ovins, porcins...) que se sont tournées beaucoup de familles d'agriculteurs en quête de compléments alimentaires et monétaires. Dans la majorité des familles, qu'elles se réclament d'une identité hutu ou tutsi, le système de production intègre peu ou prou polyculture et gros ou petit élevage ; les critères de distinction sociale ont évolué : même si la vache à longues cornes garde une véritable aura pour certains, ce sont de plus en plus des valeurs économiques, fondées sur la possession de terre ou l'obtention de revenus non agricoles, qui forgent les nouvelles élites.
Une économie fragile reposant sur l'agriculture et l'aide internationale
L' économie rwandaise reste principalement une économie rurale, avec 87 % de la population active dans l'agriculture (recensement de 2002), qui représente environ 40 % du PIB (BAD/O.CDE, 2005).
Au sein de ce secteur, très dépendant des aléas climatiques, la production de café et de thé a fourni, en 2005, la moitié de la valeur des exportations totales ; en dehors du cas particulier du coltan, l'activité minière est réduite. Caféiculture et théiculture, malgré leur modestie à l'échelle internationale, constituent donc les deux piliers majeurs de la balance commerciale. Elles semblent connaître aujourd'hui des évolutions irrégulières et divergentes.
La caféiculture rwandaise est en difficulté (conséquences de la guerre, vieillissement des arbres, faiblesse de la rémunération des producteurs) ; la production, qui était de l'ordre de 40 000 tonnes dans les années 1980, a baissé encore de 37 % entre 1990 et 2002 ; un tiers des 100 millions de plants auraient disparu et le volume est descendu au-dessous de 20 000 tonnes. Plus récemment, elle s'est redressée, à la faveur d'une hausse éphémère des cours mondiaux en 2003-2004, avant de stagner en 2005 puis de remonter en 2006 (26 500 t). L'année 2004 semble avoir été ainsi exceptionnellement faste pour le café rwandais (27 000 tonnes selon la Banque centrale), qui a représenté alors 83 % des exportations agricoles, taux comparable à celui des années 1979-1981, avant la crise. Les perspectives de développement sont liées à des campagnes de plantation de nouveaux arbres et surtout à des efforts sur la promotion de la qualité de cafés « gourmets » dits de spécialité dans le cadre d'une douzaine de coopératives fondées depuis 1999 (café de Maraba).
Si le café est produit presque exclusivement par de petits planteurs, le thé est cultivé à la fois dans le cadre d'exploitations familiales et au sein de quelques grandes plantations industrielles. La production de thé noir s'est redressée rapidement après le génocide ; elle a atteint 17 800 tonnes en 2001, 14 900 en 2002, 15 400 en 2004, environ 20 000 en 2007. Ce thé, de qualité reconnue, est ainsi devenu récemment une production aussi importante que le café, et parvient même à le dépasser certaines années. La filière, longtemps dominée par l'État, est actuellement engagée dans un grand programme de privatisation.
Les autres secteurs d'activité sont très marginaux : un tissu industriel très modeste (essentiellement agroalimentaire), un secteur de services encore faible malgré l'essor récent des télécommunications et des activités bancaires, dopées par des investissements étrangers et la politique nationale de privatisations. Le potentiel touristique réel (gorilles des Virunga...) est devenu en 2004 le troisième fournisseur de devises ; fortement dégradé par la guerre, il a besoin d'être réhabilité.
Si le Rwanda a pu compter sur une croissance annuelle assez élevée jusqu'en 2002 (9,4 % en 2002), fruit des efforts de reconstruction effectués après la guerre et le génocide, celle-ci a fortement baissé en 2003 avant de remonter doucement les années suivantes. Pour la décennie 1995-2005, la moyenne serait, selon la Banque mondiale, de 7,4 % par an.
Pauvreté et dépendance
L'économie rwandaise est celle d'un pays très pauvre. Le produit national brut par habitant était estimé à 230 dollars seulement en 2002. Plus de la moitié de la population survivrait au-dessous du seuil de pauvreté. Avec un indice de développement humain (IDH) de 0,431 (159e rang mondial sur 177, selon le rapport du PNUD de 2003), le Rwanda fait incontestablement partie des pays les moins avancés.
Le Rwanda reste extrêmement dépendant de l'étranger au niveau budgétaire : 60 % des opérations du gouvernement sont financées par la communauté des donneurs. Néanmoins, grâce au plan de réduction de la dette (initiative Pays pauvres très endettés, PPTE), le pays a vu son endettement diminuer de 70 % en 2006, alors qu'il avait été multiplié par sept entre 1982 et 2003.
De graves problèmes structurels et conjoncturels demeurent : pénurie d'énergie, déficit global des finances publiques, séquelles démographiques et économiques de la guerre, ravages du sida, fragilité des bases alimentaires. Les signes de redressement perceptibles au milieu des années 2000 ne se confirmeront que si l'environnement géopolitique de l'Afrique des Grands Lacs s'apaise.
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Écrit par
- François BART : professeur à l'université de Bordeaux-III-Michel-de-Montaigne
- Jean-Pierre CHRÉTIEN : directeur de recherche émérite au C.N.R.S.
- Marcel KABANDA : consultant à l'U.N.E.S.C.O.
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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- FPR (Front patriotique rwandais)
- FAR (Forces armées rwandaises)
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- BIZIMUNGU PASTEUR (1950- )
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