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NUREMBERG PROCÈS DE

L'accord de Londres

Pour préparer le procès, le juge à la Cour suprême, Robert H. Jackson, nommé le 2 mai 1945 procureur général par le nouveau président des États-Unis, Harry Truman, réunit à Londres, à partir du 20 juin, les juristes des quatre puissances accusatrices : France, États-Unis, Royaume-Uni, Union soviétique. Quatre mois de débats à huis clos permettent d'élaborer l'accord de Londres qui comprend le statut du tribunal et la définition des incriminations, qui seront paraphés par vingt et un autres pays (entre autres, la Pologne, mais aussi l'Uruguay).

L'obsession des Américains était de mettre la guerre hors la loi en jugeant ceux qui en portent la responsabilité. Ainsi, pour les Américains, véritables maîtres d'œuvre du procès, deux chefs d'accusation sont primordiaux : le « plan concerté ou complot (conspiracy) », qui a entraîné les « crimes contre la paix ». Ces derniers sont définis comme « la direction, la préparation, le déclenchement, la poursuite d'une guerre d'agression, ou d'une guerre de violation des traités, assurances ou accords internationaux, ou la participation à un plan concerté ou complot pour l'accomplissement de l'un quelconque des actes qui précèdent ». La définition des « crimes de guerre », auxquels tiennent les Français et les Soviétiques, est l'aboutissement d'un long processus de négociations internationales amorcé à la fin du xixe siècle pour protéger lors des guerres deux catégories de personnes : les prisonniers et les populations civiles. Ce sont « les violations des droits et coutumes de la guerre ». Ces violations comportent, sans y être limitées, « l'assassinat, les mauvais traitements ou la déportation pour des travaux forcés, ou pour tout autre but, des populations civiles dans les territoires occupés, l'assassinat ou les mauvais traitements de prisonniers de guerre ou des personnes en mer, l'exécution des otages, les pillages de biens publics ou privés, les destructions sans motifs des villes et des villages ou la dévastation que ne justifient pas les exigences militaires ». Enfin, une dernière qualification est ajoutée, largement parce que des organisations juives la réclament, le « crime contre l'humanité ». Non que l'expression fût nouvelle. Elle avait notamment été employée pour qualifier les massacres des Arméniens en 1915. Mais c'est avec Nuremberg que ce crime fait son entrée dans le droit international pour punir ceux ayant perpétré « l'assassinat, l'extermination, la réduction en esclavage, les déportations et tout acte inhumain commis contre toutes les populations civiles, avant ou pendant la guerre, ou bien les persécutions pour des motifs politiques, raciaux ou religieux ». Pourtant, dans la définition de Nuremberg, ce crime n'existe que « lorsque ces actes ou persécutions, qu'ils aient constitué ou non une violation du droit interne du pays où ils ont été perpétrés, ont été commis à la suite de tout crime entrant dans la compétence du tribunal ou en liaison avec ce crime ». En clair, en lien avec le crime contre la paix. C'est donc bien la guerre d'agression qui est au cœur du procès.

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Écrit par

  • : directrice de recherche émérite au C.N.R.S., U.M.R. identités, relations internationales et civilisations de l'Europe, université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Annette WIEVIORKA. NUREMBERG PROCÈS DE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Procès de Nuremberg et procès de Tokyo, 1945-1946 - crédits : The Image Bank

Procès de Nuremberg et procès de Tokyo, 1945-1946

Le procès de Nuremberg - crédits : Fred Ramage/ Getty Images

Le procès de Nuremberg

Autres références

  • PROCÈS DE NUREMBERG ET DE TOKYO

    • Écrit par Wanda MASTOR
    • 232 mots
    • 1 média

    Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, des tribunaux internationaux ad hoc furent chargés de juger les grands criminels de guerre. Pour la première fois, une sanction judiciaire internationale des crimes contre la paix, des crimes de guerre et de la nouvelle catégorie des crimes contre...

  • ALLEMAGNE (Histoire) - Allemagne moderne et contemporaine

    • Écrit par Michel EUDE, Alfred GROSSER
    • 26 883 mots
    • 39 médias
    ...fût leur degré de culpabilité. Encore les vaincus auraient-ils pu mesurer la dimension des crimes commis jusqu'en 1945 en suivant le procès intenté à Nuremberg aux chefs et aux organisations nazis. Mais à leurs yeux le tribunal, composé uniquement de vainqueurs, était d'une impartialité douteuse. Et...
  • COMITÉS D'ÉTHIQUE BIOMÉDICALE

    • Écrit par Christine FAURE
    • 4 369 mots
    • 3 médias
    En outre, des déclarations à caractère plus spécialisé constituent un second cadre de référence pour la communauté internationale. Ces déclarations découlent des principes fondamentaux énoncés par le tribunal de Nuremberg les 19 et 20 août 1947 sur les conditions de l'expérimentation médicale....
  • COUR PÉNALE INTERNATIONALE

    • Écrit par Sarah PELLET
    • 2 675 mots
    • 3 médias
    ...mondiale relance les discussions et les Alliés affirment leur volonté de juger les responsables. À la fin de la guerre, deux juridictions sont créées : le Tribunal militaire international de Nuremberg, par l'accord de Londres du 8 août 1945, et le Tribunal international pour l'Extrême-Orient, par une...
  • CRIME DE GUERRE

    • Écrit par Jean DELMAS
    • 1 004 mots
    • 2 médias

    « Atrocités ou délits commis sur des personnes et des biens en violation des lois et usages de la guerre, y compris l'assassinat, les mauvais traitements ou la déportation, pour des travaux forcés ou pour tout autre but, des populations civiles dans les territoires occupés, l'assassinat...

  • Afficher les 17 références

Voir aussi