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PHÉDON, Platon Fiche de lecture

Socrate mourant

Toute l'attitude socratique tient à distance le pathos, refuse la mort dans l'âme : comme sous nos yeux, l'âme en effet se dissocie du corps, le Socrate qui s'emploie à définir les notions se distingue du Socrate qui va devenir cadavre ; l'acte de sa pensée ne meurt pas, tant qu'un vivant (un autre corps) s'en empare. Ce type de détachement, dont la philosophie, telle que pratiquée par Socrate (ou inventée par Platon), est précisément l'exercice, ne congédie pas la mort elle-même – mais la peur de la mort, sa menace perpétuelle pour la pensée. Socrate n'a, au bout du compte, rien prouvé. À défaut d'une doctrine de l'immortalité, il laisse cependant un examen des opinions (savantes, religieuses, populaires) sur la mort. Et il sait bien qu'il doit mourir ; mieux : il y consent, cette mort fût-elle injuste et scandaleuse. Phédon effectue le premier passage de témoin. Un homme disparaît, mais « le meilleur, le plus sensé aussi et le plus juste » (118a). Ayant accepté le jugement qui le condamne, il a porté le poison à ses lèvres, « tout tranquillement, tout facilement ». Apollodore n'ayant pu retenir sa douleur, il s'est écrié simplement : « Allons, restez calme, tenez bon. » « Alors, pris de honte, nous réussîmes à nous retenir de pleurer. » Sans plus de commentaire, le dialogue rapporte les derniers mots de Socrate : « Criton, nous devons un coq à Esculape. Payez cette dette, ne soyez pas négligents. »

— François TRÉMOLIÈRES

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François TRÉMOLIÈRES. PHÉDON, Platon - Fiche de lecture [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Platon - Athènes - crédits : AKG-images

Platon - Athènes

Autres références

  • CORPS (notions de base)

    • Écrit par Philippe GRANAROLO
    • 3 102 mots

    Durant plus de deux millénaires, dans le monde occidental, le corps n’a guère fait l’objet de réflexions philosophiques si ce n’est de façon négative, en tant qu’entité faisant obstacle aux intentions de l’âme. La religion orphique (liée au culte ésotérique d’Orphée), très présente dans la Grèce...

  • MATIÈRE/ESPRIT (notions de base)

    • Écrit par Philippe GRANAROLO
    • 3 374 mots
    Dans son dialoguePhédon, Platon fait raconter à Socrate (env. 470-399 av. J.-C.) les longues années de déception éprouvées en lisant les propos matérialistes des philosophes de son temps : les quatre éléments, quel que soit celui que l’on privilégie, ne sauraient apporter une explication convaincante...
  • RAISON (notions de base)

    • Écrit par Philippe GRANAROLO
    • 2 947 mots

    Les historiens de la philosophie sont très nombreux à avoir décrit la mutation intellectuelle qui s’est produite sur le sol de la Grèce antique comme un combat du « logos » contre le « muthos », autrement dit (en se souvenant que le mot grec logospossède de multiples significations)...

  • TEMPS / MÉMOIRE (notions de base)

    • Écrit par Philippe GRANAROLO
    • 2 724 mots
    ...preuves subtiles de l’immortalité de l’âme forgées par son maître Platon (env. 428-348 av. J.-C.), qui avait multiplié, en particulier dans son dialogue du Phédon, des arguments qui annoncent toute la théologie chrétienne. Il suffit à Aristote de montrer que l’homme ne peut exister dans le temps que parce...

Voir aussi