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PERRET AUGUSTE (1874-1954)

Architecte et entrepreneur, Auguste Perret a joué un rôle de premier plan dans la définition d'une esthétique spécifique au béton armé. Il a inventé, chose très rare dans l'histoire de la construction, un ordre architectural classique, comparable aux ordres antiques, mais intégralement fondé sur les performances techniques du nouveau matériau. Il a créé des édifices savants et rigoureux, tels l'église du Raincy, ou à Paris, la salle Cortot, le Mobilier national et le musée des Travaux publics, tout en renouvelant la pensée urbaine à travers de vastes ensembles, tels la place de la gare à Amiens et le centre reconstruit du Havre. Héritier d'une tradition rationaliste séculaire, il a engendré, par son enseignement (à l'École des beaux-arts, à l'École spéciale d'architecture, et aussi à son agence, où travaillèrent de nombreux stagiaires), une école féconde qui a produit, pendant plus de cinquante ans, des œuvres significatives.

Un architecte-entrepreneur

Fils d'un tailleur de pierre bourguignon qui était monté à Paris peu avant les événements de la Commune et qui, accusé d'avoir participé à l'incendie des Tuileries, s'était enfui en Belgique pour échapper à la répression versaillaise, Auguste Perret est né à Ixelles, dans la banlieue de Bruxelles, comme ses deux frères, Gustave (1876-1952) et Claude (1880-1962). Autorisé à rentrer en France, après le vote de la loi d'amnistie de 1880, son père, qui avait créé à Bruxelles une entreprise de maçonnerie, s'établit à Paris comme entrepreneur général. Plongé dès son enfance dans l'atmosphère des chantiers, Auguste se familiarise avec les matériaux et les techniques. À quinze ans, il dessine les détails techniques d'un édifice provisoire pour l'Exposition universelle de 1889. Il découvre le Dictionnaire raisonné de Viollet-le-Duc et se passionne pour les théories néo-gothiques. En 1892, il entre à l'École des beaux-arts, dans l'atelier de Julien Guadet. Au contact de cet éminent professeur, surnommé le « Vitruve moderne », il assimile les principes rationalistes, qui orienteront toute sa carrière. Malgré une scolarité brillante, il quitte l'école sans diplôme pour se consacrer pleinement à l'entreprise familiale. Ses premières réalisations – des immeubles de rapport, rue Sorbier (1896), rue du Faubourg-Poissonnière (1897), avenue de Wagram (1902) – témoignent d'un souci d'expressivité de la construction.

C'est en 1899, lors de la réalisation du casino de Saint-Malo, qu'il découvre les possibilités du béton armé. Il emploie ce matériau pour un plancher de 15 mètres de portée, mais sans chercher à mettre en évidence cette technique. Il en sera tout autrement en 1903, avec l'immeuble de la rue Franklin, à Paris, qui constitue un jalon important dans l'histoire de l'architecture. Cette œuvre, dont le plan en U s'adapte aux contraintes de la parcelle, tire son esthétique de la mise en représentation de la structure. Des plaques de grès cérame, différenciées selon qu'elles recouvrent les parties porteuses ou les remplissages, assurent une protection des bétons.

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Écrit par

  • : architecte, professeur à l'École nationale supérieure d'architecture de Nancy, chercheur au Laboratoire d'histoire de l'architecture contemporaine

Classification

Pour citer cet article

Joseph ABRAM. PERRET AUGUSTE (1874-1954) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AUGUSTE PERRET (exposition)

    • Écrit par Simon TEXIER
    • 1 072 mots

    Inaugurée au musée André-Malraux du Havre en septembre 2002, puis transportée à la Galleria d'Arte moderna de Turin au printemps 2003, l'exposition Perret, la poétique du béton a été présentée au début de l'année 2004 au palais de la Porte Dorée à Paris (qui accueille...

  • ARCHITECTURE (Thèmes généraux) - Notions essentielles

    • Écrit par Antoine PICON
    • 4 952 mots
    ...un moyen d'expression, la recherche de la stabilité vise alors l'équilibre harmonieux des pleins et des vides, des supports et des parties supportées, comme dans l'œuvre d'un Auguste Perret qui tente de réconcilier le sens du rythme de l'architecture classique avec la technologie du béton...
  • ARCHITECTURE (Thèmes généraux) - Architecture, sciences et techniques

    • Écrit par Antoine PICON
    • 7 914 mots
    • 6 médias
    ...question de la morale constructive prend un nouveau relief. En France, cette morale trouve l'un de ses défenseurs les plus convaincus en la personne d' Auguste Perret. Par l'accent qu'il met sur l'ossature, le grand pionnier de la construction en béton armé apparaît comme l'héritier de la tradition rationaliste....
  • ARCHITECTURE (Thèmes généraux) - L'architecte

    • Écrit par Florent CHAMPY, Carol HEITZ, Roland MARTIN, Raymonde MOULIN, Daniel RABREAU
    • 16 589 mots
    • 10 médias
    ...1 800 en 1940. Ayant milité en faveur de la réglementation de la profession et de la création de l'ordre, il alla de soi que le président de la S.A.D.G., Auguste Perret, fût le premier président de l'ordre. De nombreux syndicats d'architectes s'étaient constitués pour défendre les architectes diplômés d'une...
  • ARCHITECTURE CONTEMPORAINE - Une architecture plurielle

    • Écrit par Joseph ABRAM, Kenneth FRAMPTON, Jacques SAUTEREAU
    • 11 661 mots
    • 17 médias
    L'exemple du Havre confirme le lien entre l'état d'un patrimoine et la sensibilisation du public aux valeurs dont il est porteur. Dans le vaste centre reconstruit par l'équipe Perret, seule l'église Saint-Joseph est aujourd'hui classée. L'ensemble urbain, qui figurait déjà en 1963 sur la liste soumise...
  • Afficher les 18 références

Voir aussi