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ROSTROPOVITCH MSTISLAV (1927-2007)

La gloire d'incarner de manière quasi exclusive, pour un très vaste auditoire qui s'étend bien au-delà du cercle restreint des mélomanes, le génie d'un instrument et les enchantements de la musique « classique » n'est offerte qu'à des personnalités d'exception. Rares en effet sont les musiciens qui, comme le violoncelliste et chef d'orchestre Mstislav Rostropovitch, ont connu une célébrité universelle. Rejetés dans l'ombre les sortilèges de l'école française – pourtant illustrée, depuis Maurice Maréchal (1892-1964), par des étoiles de première grandeur comme Pierre Fournier, Maurice Gendron, André Navarra ou Paul Tortelier –, ignorée la dimension d'un Siegfried Palm (1927-2005) qui tout autant que lui a œuvré avec ténacité pour défendre la musique de son temps et renouveler le répertoire, éclipsées des individualités aussi fortes que celles de Gregor Piatigorsky, Mikhail Khomitzer, Janos Starker, Daniil Shafran ou Sviatoslav Knouchevitsky...

Les causes de cette domination sont multiples. Après s'être longtemps accommodé du régime soviétique – dont il fut l'un des privilégiés –, Mstislav Rostropovitch a publiquement rompu avec lui et pris la défense des dissidents, faisant preuve d'un indéniable courage personnel. L'exil qui s'ensuivit lui conféra l'aura qui émane des victimes injustement frappées. Les milieux musicaux, conquis par son obstination à susciter des œuvres nouvelles, et les médias, séduits par une personnalité naturellement chaleureuse et expansive, ne tardèrent pas à en faire une vedette. Quant au public, il fut littéralement subjugué par la fougue de l'interprète et la perfection de sa technique. Sans conteste l'un des plus importants violoncellistes de la seconde moitié du xxe siècle, Mstislav Rostropovitch a exercé une influence majeure sur une génération entière d'instrumentistes.

Des honneurs à la dissidence

Dmitri Chostakovitch, Mstislav Rostropovitch et Guennadi Rojdestenvski - crédits : Erich Auerbach/ Hulton Archive/ Getty

Dmitri Chostakovitch, Mstislav Rostropovitch et Guennadi Rojdestenvski

Fils et petit-fils de violoncelliste – son père, Leopold, ancien élève de Pau Casals, enseigne l'instrument à Moscou –, Mstislav Leopoldovitch Rostropovitch naît à Bakou, en Azerbaïdjan, le 27 mars 1927. Sa mère, Sofia Nikolaïevna Fedotov, est pianiste. C'est avec elle qu'il apprend le piano dès l'âge de cinq ans et avec son père qu'il prolonge la tradition familiale du violoncelle. À huit ans, il entre à l'Institut d'État Gnesin d'éducation musicale de Moscou ; de 1943 à 1948, il étudie, au Conservatoire Tchaïkovski de Moscou, le violoncelle – avec Semyon Matveïevitch Kozoloupov – et la composition, avec Vissarion Iakovlevitch Chebaline et Dmitri Chostakovitch. Le premier concert public du jeune violoncelliste date de 1940 : il interprète le Concerto pour violoncelle de Saint-Saëns avec l'Orchestre de Slaviansk, en Ukraine. Il remporte en 1945 la médaille d'or au concours général de Moscou. En 1947 et 1949, il est lauréat des concours internationaux de Prague et de Budapest. En 1950, il remporte, ex aequo avec Daniil Shafran, le premier prix du concours de Prague. Cette même année, il reçoit le prix Staline – la plus haute distinction existant en Union soviétique – et commence à enseigner le violoncelle ainsi que la contrebasse au Conservatoire de Leningrad. Il est nommé en 1956 professeur de violoncelle au Conservatoire Tchaïkovski de Moscou. Sa réputation commence à s'étendre, et il épouse en 1955 la star du Bolchoï, la soprano Galina Pavlovna Vichnievskaia. Il accompagnera souvent au clavier, dans un répertoire de mélodies russes, celle qui sera la compagne de toute une vie.

Rostropovitch pratique assidûment la musique de chambre en compagnie de Leonid Kogan, Emil Guilels, Rudolf Barchaï, Sviatoslav Richter. La carrière internationale du violoncelliste, amorcée dès 1956 par des tournées en Grande-Bretagne et aux États-Unis[...]

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Pour citer cet article

Pierre BRETON. ROSTROPOVITCH MSTISLAV (1927-2007) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Dmitri Chostakovitch, Mstislav Rostropovitch et Guennadi Rojdestenvski - crédits : Erich Auerbach/ Hulton Archive/ Getty

Dmitri Chostakovitch, Mstislav Rostropovitch et Guennadi Rojdestenvski

Guilels, Rostropovitch et Kogan - crédits : Erich Auerbach/ Hulton Archive/ Getty Images

Guilels, Rostropovitch et Kogan

Sviatoslav Richter - crédits : Erich Auerbach/ Hulton Archive/ Getty Images

Sviatoslav Richter

Autres références

  • BRITTEN BENJAMIN - (repères chronologiques)

    • Écrit par Timothée PICARD
    • 1 817 mots

    22 novembre 1913 Edward Benjamin Britten naît à Lowestoft, sur la côte du Suffolk, dans l'est de l'Angleterre.

    6 mars 1934 La Simple Symphony, pour orchestre à cordes, opus 4, est créée à Norwich, sous la direction du compositeur.

    Mars 1937 Britten fait la connaissance du ténor...

  • CHOSTAKOVITCH DMITRI (1906-1975)

    • Écrit par André LISCHKE
    • 2 766 mots
    • 1 média
    ...) op. 105 (1958). La veine ironique se poursuit avec le cycle vocal des Satires op. 109 sur des poèmes de Sacha Tchiorny, défini comme « croquis du passé ». En 1959, son Concerto pour violoncelle no 1 op. 107 est écrit pour l’étoile montante de cet instrument,Mstislav Rostropovitch.

Voir aussi