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KOSOVO ou KOSSOVO

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Histoire du Kosovo

Le Kosovo a hérité d’une histoire mouvementée et souvent reconstruite à des fins politiques. Premier événement clé, la bataille du champ des Merles (Kosovo Polje) s’inscrit dans cette réécriture de l’histoire. En 1389, la coalition balkanique, menée par le prince serbe Lazar Hrebeljanović, est vaincue par l’armée ottomane du sultan Murad Ier. Rappelons que, aux côtés des Serbes, se trouvent des Bosniaques, des Roumains et des Albanais – qui sont alors chrétiens –, et que c’est plus tard, en 1459, que la Serbie perd son indépendance. Revalorisée dans l’histoire nationale serbe, la bataille acquiert une dimension symbolique qui la présente comme le rempart de la chrétienté devant la poussée ottomane.

Cinq siècles plus tard, le déclin de l’Empire ottoman annonce le démembrement des territoires albanais, prévu par le traité de San Stefano et le congrès de Berlin en 1878. En réaction, des Albanais venus de tout l’Empire se réunissent en ligue à Prizren et forment une armée de volontaires. Cette ligue demande que les Albanais soient rassemblés dans une entité unique et autonome. Écrasé en 1881, le mouvement n’en est pas moins à l’origine d’une dynamique politique et reste une référence dans la mémoire nationale albanaise.

Au début du xxe siècle, le Kosovo rejoint brièvement le jeune État albanais, avant d’être intégré au royaume des Serbes, Croates et Slovènes en 1918. Dès lors, son destin est associé aux différentes entités yougoslaves : le royaume de Yougoslavie, proclamé en 1929, puis la république populaire fédérale de Yougoslavie, fondée en 1946. En 1963 est créée la république socialiste fédérative de Yougoslavie, formée de six républiques et de deux régions autonomes rattachées à la république de Serbie : la Voïvodine et le Kosovo. Avec la Constitution de 1974, axée sur le développement de l’autogestion ouvrière et la dévolution des pouvoirs aux entités fédérées, le Kosovo devient « province socialiste autonome ». Il dispose alors d’une Assemblée, d’un conseil exécutif, d’une présidence et d’une Cour suprême. Il obtient un statut similaire à celui des républiques, gagnant le droit de veto au sein de la Ligue des communistes de Yougoslavie et du gouvernement fédéral, sans pour autant disposer du droit de sécession. L’époque fédérale favorise un certain développement économique et la naissance d’un « printemps » albanais, avec, notamment, la mise en place d’un système éducatif en albanais, la création de l’université de Prishtinë/Priština et de l’Académie des sciences et des arts.

Succédant à ce renouveau culturel et à l’élargissement de l’autonomie, le tournant répressif de 1981 crispe les relations entre la population albanaise et le pouvoir serbe. Lancé par les étudiants, le mouvement s’étend à tout le Kosovo et se politise. Les manifestants demandent le statut de république fédérée et de meilleures conditions de vie. En réponse, le pouvoir central décrète l’état d’urgence et procède à de nombreuses arrestations.

Au moment où l’Europe de l’Est se tourne vers la démocratie, la déliquescence du communisme fragilisant le pouvoir central met à mal l’unité yougoslave. La politique nationaliste de Slobodan Milošević se traduit par la suppression de l’autonomie du Kosovo en mars 1989, l’intensification de la répression et la généralisation des mesures de discrimination à l’encontre des Kosovars albanais (licenciements massifs, suspension des médias, interdiction d’accès aux écoles et universités). L’épreuve de force entraîne des manifestations ; le couvre-feu est instauré. La réaction des Kosovars albanais est d’abord pacifique, orchestrée par la Ligue démocratique du Kosovo (LDK, fondée notamment par Ibrahim Rugova, qui sera président du Kosovo de 2002 à 2006), puis menée par l’Armée[...]

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Écrit par

  • : docteure en science politique, consul honoraire du Kosovo, expert du Réseau francophone de recherche sur les opérations de paix

Classification

Pour citer cet article

Odile PERROT. KOSOVO ou KOSSOVO [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le

Médias

Kosovo : drapeau - crédits : Encyclopædia Universalis France

Kosovo : drapeau

Priština, Kosovo - crédits : trabantos/ Shutterstock

Priština, Kosovo

Monastère de Gračanica, Kosovo - crédits : Pecold/ Shutterstock

Monastère de Gračanica, Kosovo

Autres références

  • ALBANIE

    • Écrit par , , et
    • 22 072 mots
    • 9 médias
    ...établies dès le printemps au nord et au nord-est, laissaient au Monténégro et surtout à la Serbie plusieurs centaines de milliers d'albanophones, notamment autour deKosovo ; au sud, le protocole de Florence (déc. 1913) partageait la Çameria, à peuplement mixte, entre la Grèce et l'Albanie.
  • BALKANS ou PÉNINSULE BALKANIQUE

    • Écrit par et
    • 7 514 mots
    • 1 média
    ...sauf lorsque Moscou lui fit faire l'inverse) ; Tirana soutint avec véhémence – mais en paroles seulement – les revendications des Albanais du Kosovo qui, en 1968 et depuis 1981, réclamaient la transformation de leur province en une septième république yougoslave, ce que Belgrade considèrait comme...
  • BULGARIE

    • Écrit par , , , , , , , et
    • 26 995 mots
    • 12 médias
    ...les autorités bulgares, de l'espace aérien national aux avions de l'OTAN dont les bombardements visent à obtenir la reddition des forces serbes après l'invasion du Kosovo. Sésame pour entamer des négociations d'adhésion avec Bruxelles en mars 2000, cette concession à l'OTAN est accordée...
  • CAUCASE

    • Écrit par , , , et
    • 17 147 mots
    • 4 médias
    ...flou, le soutien sans faille apporté à Mikheïl Saakachvili par l'administration Bush a incontestablement encouragé celui-ci dans cette aventure tragique. En outre, la reconnaissance de l'indépendance du Kosovo par les États-Unis et par de nombreux pays européens en février 2008, en dépit de l'opposition...
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