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JAZZ MODAL

À partir de la fin des années 1950, des jazzmen adoptent une démarche dans laquelle la modalité prévaut sur la tonalité. Tous les courants du jazz vont peu à peu être concernés par cette approche.

Le jazz modal ne peut pas vraiment être considéré comme un courant à part entière ; il s'agit plutôt d'une approche dans l'improvisation promue dans les années 1950 par le compositeur, batteur, pianiste et pédagogue George Russell, avec ses théories sur le mode lydien, exposées dans son livre The Lydian Chromatic Concept of Tonal Organization for Improvisation (1959), qui reprenait sa thèse de 1953.

Dès 1958, Miles Davis s'intéresse aux climats créés par l'improvisation modale, notamment dans son album Milestones : dans le titre éponyme, le pianiste Red Garland joue des séquences d'accords répétés pendant que les solistes improvisent en mode dorien (mode de ) et en mode éolien (mode mineur naturel). En 1959, Miles Davis poursuit ce travail avec Bill Evans dans l'album Kind of Blue, où la pièce So What est fondée sur le même type de construction (mode dorien transposé) qui inspirera également John Coltrane (Impressions, 1961).

On peut interpréter l'arrivée de la modalité (les formes plagales) comme une volonté de trouver de nouvelles couleurs sonores plus méditatives hors des chemins obligés du système tonal (résolution du triton*, cadences obligées). Le langage modal comprend souvent des incursions dans le blues, l'utilisation de modes pentatoniques, des séquences harmoniques répétitives, des pédales et autres basses obstinées, ou l'emploi d'échelles plus rares (à l'instar du mode « Bartók », avec sa quarte augmentée et sa septième mineure). Utiliser les modes ne veut pas dire renoncer aux autres formes d'improvisation : certains solos, comme ceux de So What dans l'album Miles Davis at Carnegie Hall (19 mai 1961), contiennent également beaucoup de chromatismes.

Marcus Miller - crédits : Lawrence K. Ho/ Los Angeles Times/ Getty Images

Marcus Miller

Le free jazz va également puiser dans cette source (Ascension de John Coltrane, 1965 ; Ornette Coleman...). À partir des années 1970, le jeu modal fait partie intégrante du langage du jazz. Il est aussi abondamment utilisé dans le jazz rock (Maiden Voyage, de Herbie Hancock, 1965) et le jazz funk (Marcus Miller).

— Eugène LLEDO

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Écrit par

  • : compositeur, auteur, musicologue et designer sonore

Classification

Pour citer cet article

Eugène LLEDO. JAZZ MODAL [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Marcus Miller - crédits : Lawrence K. Ho/ Los Angeles Times/ Getty Images

Marcus Miller

Autres références

  • JAZZ

    • Écrit par Philippe CARLES, Jean-Louis CHAUTEMPS, Universalis, Michel-Claude JALARD, Eugène LLEDO
    • 10 992 mots
    • 25 médias
    Une première tendance se définit par la recherche d'une spiritualité, dont les normes sont volontiers demandées à l'Orient. Ilen résulte une musique violemment incantatoire, utilisant des gammes modales étrangères à l'univers musical de l'Occident, où le jazz s'était, jusqu'ici, cantonné. C'est...

Voir aussi