JEAN XXII, JACQUES DUÈSE ou D'EUZE (1245-1334) pape (1316-1334)
Né en 1245 dans une famille bourgeoise aisée de Cahors, Jacques Duèse, ou D'euze, étudie le droit canonique et le droit romain à Paris et Orléans. Chancelier de Charles II d'Anjou en 1309, il est créé cardinal en 1312. Élu pape à Lyon le 7 août 1316 pour succéder à Clément V sous le nom de Jean XXII, il va faire d'Avignon la résidence permanente du Saint-Siège.
Les premières années de son pontificat amènent Jean XXII à arbitrer la controverse tenace qui voit s'affronter deux courants de l'ordre franciscain – les Spirituels, partisans de la stricte observance de la règle de pauvreté absolue de saint François d'Assise, et les Conventuels, tenants d'une interprétation élargie. Jean XXII prend au final le parti des Conventuels contre les Spirituels qui, entrés en résistance, vont faire l'objet de persécutions. Le pape condamnera finalement l'intégralité de la doctrine franciscaine de la pauvreté évangélique dans deux décrétales – Ad Conditorem Canonum (1322) et Cum Inter Nonnullos (1323) –, en affirmant, Écriture sainte à l'appui, que le Christ et les apôtres avaient eux-mêmes possédé des objets.
Jean XXII intervient également pour régler le conflit qui oppose l'empereur Louis IV de Bavière et Frédéric d'Autriche au sujet de la couronne du Saint-Empire romain germanique. Louis de Bavière bat ce dernier à Mühldorf en 1322. Pour autant, Jean XXII lui interdit d'exercer le pouvoir jusqu'à ce qu'il statue lui-même en sa qualité de souverain pontife, affirmant ainsi la prééminence de la papauté sur les élections impériales. Louis de Bavière réagit en lançant, le 22 mai 1324, l'Appel de Sachsenhausen, dans lequel il nie ladite primauté pontificale et conteste la condamnation des franciscains spirituels par Jean XXII. Parallèlement, Louis de Bavière ouvre sa cour aux philosophes politiques et théologiens Marsile de Padoue et Jean de Jandun, dont l'ouvrage Defensor pacis (« Défenseur de la paix ») reconnaît au concile œcuménique une autorité supérieure à celle du pape. Jean XXII riposte par l'excommunication de Louis de Bavière (mars 1324). Mais, couronné empereur à Rome (janvier 1328), ce dernier dépose Jean XXII le 18 avril 1328, sa dénonciation des Spirituels étant jugée contraire à la déclaration du pape Nicolas III. Le franciscain spirituel Pierre de Corbière (Pietro Rainalducci) devient antipape sous le nom de Nicolas V et Michel de Césène, ministre général de l'ordre franciscain, en appelle à l'autorité du concile général contre Jean XXII. Du coup, Jean XXII excommunie Nicolas V et destitue Michel de Césène de ses fonctions. Après le retour en Allemagne du Bavarois en 1329, Nicolas V se soumet à Jean XXII, qui le fait emprisonner à Avignon. L'empereur échouant dans sa tentative de réconciliation avec le souverain pontife, les franciscains et leur allié Marsile, installés à la cour de Munich, poursuivent leur énergique prosélytisme anti-pape.
La théorie de Jean XXII sur l'expérience de Dieu par les âmes des bienheureux dans l'au-delà – la vision béatifique –, qu'il expose dans quatre sermons à l'hiver 1331-1332, donne lieu à de nouvelles accusations d'hérésie. Les théologiens s'accordent généralement à considérer qu'arrivés au Paradis, les bienheureux ont la révélation immédiate et entière de l'essence divine. D'après Jean XXII, les âmes, au contraire, n'accèdent à la plénitude de la vision béatifique qu'après la résurrection des défunts et le jugement dernier, à la fin du monde. Le dominicain anglais Thomas Wallensis connaît donc la prison pour avoir publiquement contesté l'opinion du pape, qui va se voir condamnée par un collège de théologiens de l'Université de Paris. Favorable à l'empereur, le cardinal Napoleone Orsini entame avec lui des négociations[...]
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Écrit par
- Decima L. DOUIE : ancien maître de conférences en histoire médiévale à l'université de Hull, en Angleterre, auteur
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