Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

CHANCELIER

D'abord officier de justice subalterne sous l'Empire romain, le chancelier doit son nom aux barreaux (cancelli) qui, dans les cours de justice, séparaient le tribunal du public.

À l'époque mérovingienne, il est appelé référendaire. C'est un clerc qui fait fonction de scribe, et l'office peut être rempli par plusieurs titulaires. Dès l'avènement des Carolingiens, le chancelier devient un personnage unique et, avec le sénéchal et le chambrier, l'un des trois plus importants officiers du palais : il est chargé de la rédaction des diplômes et actes royaux et de leur validation par les sceaux dont il a la garde ; il a de plus autorité sur les clercs de la chapelle. De Charles le Simple à Philippe Ier, les chanceliers furent presque tous archevêques de Reims.

Les Capétiens ont à plusieurs reprises laissé la Chancellerie vacante, notamment de 1185 à 1314 ; Louis VIII fait cependant une exception pour frère Guérin, de 1223 à 1227. Malgré la confiance qu'il accordait à ses légistes, Philippe le Bel leur donne la garde des sceaux mais non le titre de chancelier ; Pierre Flotte et Guillaume de Nogaret recevront successivement cette charge, tandis que l'office de la chapelle en est séparé et demeure aux mains des ecclésiastiques.

Sous l'Ancien Régime, le chancelier est un puissant personnage politique ; chef de la Justice, il préside le Conseil du roi en l'absence de celui-ci, parle en son nom dans les parlements et cours souveraines. D'abord nommé par le roi, il est élu par ses conseillers à partir de 1372. Il est inamovible, sauf en cas de forfaiture (ce cas ne s'est présenté qu'une fois en 1542), mais ne peut léguer sa charge. Il vérifie les actes royaux et a droit de remontrances. Il a autorité sur les universités, collèges et académies, et reçoit également la charge de censeur au service de la Librairie. Ces grands serviteurs de l'État sont généralement issus des plus illustres familles de la robe : les Séguier, les Phélypeaux, les Lamoignon. Le dernier des chanceliers de l'Ancien Régime est René-Nicolas de Maupeou qui, bien que privé de ses fonctions à l'avènement de Louis XVI, gardera le titre jusqu'à sa suppression en 1790. Rétabli par Napoléon, le titre de chancelier disparaît en France avec la monarchie de Juillet.

Le chancelier se retrouve dans presque tous les pays européens. La Russie des tsars avait un chancelier pour la garde des insignes impériaux et un vice-chancelier chargé des Affaires étrangères. L'Angleterre possède dès le Moyen Âge un chancelier de l'Échiquier. En Espagne, la charge fut créée par Alphonse VII de Castille au xiie siècle. Dans l'Empire germanique, c'est l'archevêque de Mayence qui était en même temps archichancelier de l'Empire, mais la véritable direction des bureaux était assurée par le chancelier, d'abord un évêque puis un laïc. Avec l'affaiblissement du pouvoir impérial, les chanceliers se multiplièrent (Saxe, Prusse, Bohême, etc.) pour l'administration des affaires publiques, puis celles-ci se trouvèrent de nouveau réunies sous une autorité unique dans la monarchie autrichienne (Kaunitz, Metternich) et dans le royaume de Prusse. Bismarck portait le titre de Reichskanzler, concentrant entre ses mains les pouvoirs de président du Conseil de Prusse et de chef suprême de l'administration de l'Empire. Avec des variations de pouvoirs correspondant aux différentes Constitutions, le titre de chancelier n'a plus cessé d'être porté, en Allemagne, par le chef de l'exécutif.

— Solange MARIN

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Solange MARIN. CHANCELIER [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ALLEMAGNE (Politique et économie depuis 1949) - République fédérale d'Allemagne jusqu'à la réunification

    • Écrit par Alfred GROSSER, Henri MÉNUDIER
    • 16 391 mots
    • 10 médias
    ...grande possibilité d'action. Contrairement aux présidents des IIIe, IVe et Ve Républiques françaises, il ne préside pas le Conseil des ministres. Pour la désignation du chancelier, il propose une personnalité au Bundestag ; mais si l'assemblée ne l'élit pas, il ne peut en proposer une autre. En outre,...
  • ALLEMAGNE - Les institutions

    • Écrit par Stéphane SCHOTT
    • 4 249 mots
    ...gouvernement fédéral. L’article 62 de la Loi fondamentale dispose que « le gouvernement fédéral se compose du chancelier fédéral et des ministres fédéraux ». L’article 63 alinéa 1 L.F. prévoit que « le chancelier fédéral est élu […] par le Bundestag sur proposition du président fédéral ». Et, selon l’article...
  • COMMON LAW

    • Écrit par Alain POTTAGE
    • 6 454 mots
    ...sont multipliées à un point tel que le roi s'est trouvé obligé de déléguer son pouvoir d'intervention, d'abord à son Parlement puis au lord Chancellor. Le chancelier, qui était souvent un évêque, jugeait le litige selon les normes de la « conscience » ; cela lui permettait de porter un jugement sur le...
  • ÉCHIQUIER

    • Écrit par Roland MARX
    • 533 mots

    L'expression a longtemps désigné en Angleterre la section financière du Conseil du roi, telle qu'elle a commencé à être définie au xie siècle sous Henri Ier ; l'appellation a sans doute pour origine le dessin de la nappe recouvrant la table de travail des conseillers, probablement...

  • Afficher les 7 références

Voir aussi