Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

FRANCS

La réussite de Clovis

On connaît extrêmement mal l'action personnelle de Clovis, sa chronologie reste obscure et discutée. Voici les étapes qui paraissent bien attestées : en 486, avec son parent le roi de Cambrai, Clovis attaque Syagrius, chef de l'armée de campagne de Gaule, le vainc, le chasse et lui enlève Soissons, sa résidence. Cette victoire lui livra sans doute d'un seul coup tout le pays au nord de la Loire, par conquête directe ou par capitulation. Clovis transféra bientôt sa résidence à Paris. Les dix années suivantes furent occupées par des campagnes à l'est, contre les Thuringiens et les Alamans, qui permirent aux Francs d'établir leur protectorat sur de vastes régions de la Germanie transrhénane, et par des luttes contre les Burgondes, alors maîtres du bassin de la Saône. Enfin, en 507, une victoire décisive, remportée à Vouillé (Vienne) sur le roi wisigoth Alaric II, livra aux Francs les pays entre Loire et Pyrénées. Clovis mourut en possession des trois quarts de la Gaule, il lui manquait le bassin du Rhône et la façade méditerranéenne. Entre-temps, il avait éliminé les autres rois francs, ses alliés ou ses concurrents, et surtout, avec une perspicacité remarquable, il avait adopté le catholicisme, religion de la grande majorité de ses nouveaux sujets. Une génération plus tard, les quatre fils de Clovis conquéraient la Gaule du Sud-Est sur les Burgondes (534), puis la Provence (537), et étendaient leur protectorat sur la majeure partie de l'Allemagne du Sud.

Cette réussite brillante fut exceptionnellement durable. Les Francs et la dynastie mérovingienne conservèrent la suprématie en Gaule bien après la disparition des autres royaumes barbares créés sur le sol de l'Empire d'Occident. Seuls, ils ont laissé leur nom à un État.

Un tel succès pose de nombreuses questions. Il ne s'agit évidemment pas de suprématie numérique. Bien que l'immigration germanique ait pu avoir dans le nord de la Gaule plus de continuité qu'ailleurs, en raison de la proximité des territoires transrhénans, elle n'a submergé la population gallo-romaine que sur une centaine de kilomètres à l'ouest du Rhin. Ailleurs, seules une aristocratie et quelques colonies dispersées ont pu prendre pied, et seulement au nord de la Loire. Il faut encore moins invoquer une supériorité culturelle ; la civilisation franque avant le passage du Rhin ne paraît avoir eu aucune originalité profonde, la langue franque, ancêtre lointain du néerlandais actuel, n'était pas écrite et n'apparaît après Clovis que dans quelques formules juridiques. Il n'y a pas davantage trace de facteurs économiques. Mais les Francs ont certainement profité d'un moment favorable de l'histoire sociale. La militarisation de la société avait marqué le Bas-Empire, les Romains n'y avaient guère joué de rôle. Depuis longtemps au contact de Rome, les Francs, dès avant Clovis, n'étaient plus réellement des Barbares : le contraste avec les Huns, ou même les Vandales est éclatant. Païens enfin, ils pouvaient mieux que les Ariens être convertis au catholicisme : ce facteur, sous Clovis fut déterminant.

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : maître de conférences à l'université de Caen

Classification

Pour citer cet article

Lucien MUSSET. FRANCS [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

500 à 600. Reconquêtes - crédits : Encyclopædia Universalis France

500 à 600. Reconquêtes

Autres références

  • DES FRANCS AUX MÉROVINGIENS (expositions)

    • Écrit par Claude SEILLIER
    • 1 292 mots

    Après les querelles souvent dépassées qui ont marqué, en 1996, l'« année Clovis », deux expositions fondées sur les acquis de l'archéologie ont fait très opportunément le point des connaissances : Les Francs. Précurseurs de l'Europe, au musée du Petit Palais à Paris...

  • ARBOGAST (340 env.-394)

    • Écrit par Pierre RICHÉ
    • 218 mots

    Soldat franc exilé par les siens, Arbogast est, comme son oncle Richomer, au service des empereurs romains. Bien que païen, il a la confiance de Gratien, empereur d'Occident qui meurt en 383 tué par un partisan de l'usurpateur Maxime. L'empereur d'Orient Théodose utilise Arbogast dans...

  • ARNOUL saint (582 env.-640)

    • Écrit par Jacques DUBOIS
    • 148 mots

    D'une grande famille apparentée aux rois mérovingiens, Arnoul naquit à Lay-Saint-Christophe, près de Nancy. De sa femme Doda, fille du comte de Boulogne, il eut deux fils, Anségisel et Cloud. Le premier épousa une fille de Pépin de Landen, et de leur descendance naquit Charlemagne. Personnage...

  • AUSTRASIE

    • Écrit par Universalis
    • 258 mots

    Royaume des Francs orientaux à l'époque mérovingienne (vie-viiie siècle), l'Austrasie est souvent opposée à la Neustrie, royaume franc occidental. Les maires du palais d'Austrasie, intendants de la maison du roi mérovingien, puis chefs de l'administration royale, furent les ancêtres...

  • AUSTRASIE, LE ROYAUME MÉROVINGIEN OUBLIÉ (exposition)

    • Écrit par Jean-Paul DEMOULE
    • 975 mots
    • 1 média
    Pourquoi à Saint-Dizier ? Parce qu’en 2002 trois tombes particulièrement riches, celles de deux hommes et d’une jeune femme appartenant à l’aristocratie franque, y furent découvertes (site de La Tuilerie) lors d’une fouille préventive de l’INRAP. Datées du milieu du vie siècle de notre...
  • Afficher les 59 références

Voir aussi