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ÉCONOMIE MONDIALE 1990 : de l'euphorie à la crainte

L'année 1990 aura été, au total, une année fortement contrastée. Une année en partie double, serait-on tenté de dire. À un premier semestre relativement encourageant, où les raisons d'espérer semblaient devoir l'emporter sur les raisons de craindre, a succédé un second semestre marqué par l'incertitude et la tension. Entre ces deux moitiés – ou à peu près : sept mois pour l'une et cinq pour l'autre –, une brusque fracture s'est produite, qui oblige à distinguer très nettement un « avant » et un « après » : l'invasion du Koweït par l'Irak. La fracture n'affecte pas seulement le temps mais l'espace. Entre le début et la fin de l'année, les pièces du puzzle n'ont guère changé ; sous l'effet de la crise du Golfe mais aussi et peut-être surtout des grandes mutations à l'Est, c'est leur configuration d'ensemble qui s'est très sensiblement modifiée. Au point de brouiller toutes les idées reçues et tous les pronostics.

Une situation plutôt favorable

L'année avait commencé dans une certaine euphorie : explosion de la liberté en Europe de l'Est, désarmement, persistance de la croissance et maîtrise de l'inflation ; l'incroyable s'était annoncé dès 1989, l'année même du bicentenaire de la Révolution française, et semblait devoir s'amplifier, se consolider en 1990, année de tous les possibles, symbolisée par l'entrée de l'Allemagne unifiée dans l'Alliance atlantique, la chute de multiples tyrannies dans le monde, la marche de l'Union soviétique vers la démocratie.

Oui, l'année avait démarré en fanfare sur les plans diplomatique, de l'entente Est-Ouest et du désarmement. Même si le processus n'était pas sans fragilité, il semblait suffisamment bien engagé pour entretenir les plus grandes espérances.

C'est dans le domaine économique, finalement, qu'on se montrait le plus réservé, puisque les premiers mois de 1990 voyaient se confirmer un ralentissement du taux de croissance des pays industrialisés, revenu aux environs de 3 p. 100 l'an, tandis que l'inflation manifestait une légère tendance à augmenter dans certains pays, atteignant un taux de 4,5 p. 100 en rythme annuel dans l'ensemble du monde développé ; cette tendance n'était pas assez marquée, toutefois, pour justifier les craintes d'une dégradation sérieuse de la conjoncture. Elle semblait plutôt accréditer la thèse optimiste d'une consolidation de la croissance à une allure modérée, dans une relative stabilité des prix. Depuis près de huit ans, des Cassandre prophétisaient la récession ou le retour de l'inflation, alors que le monde développé connaissait l'une des périodes d'activité les plus fastes depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. L'expansion semblait même avoir trouvé un rythme de croisière : il était naturel que la croissance ralentît quelque peu par rapport au début de la phase de reprise, et il était sain que ce ralentissement fût le plus sensible dans les pays où les tensions inflationnistes étaient les plus fortes ; ces dernières devaient d'ailleurs s'en trouver atténuées, tout comme les déséquilibres extérieurs existant notamment entre les États-Unis, l'Allemagne et le Japon.

Les craintes que l'on pouvait éprouver de voir ce processus d'ajustement déboucher sur une récession n'ont jamais été totalement apaisées ; force est néanmoins de constater qu'elles ne s'étaient pas non plus concrétisées au début de 1990.

Dans la plupart des pays d'Europe, la croissance se poursuivait raisonnablement. Le Japon, quant à lui, renouait avec un rythme de croissance dont il était seul coutumier, un rythme atteignant les 6 p. 100 et fondé tant sur l'essor de la consommation intérieure que sur celui[...]

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Écrit par

  • : directeur de cabinet du président du Conseil économique et social.

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Pour citer cet article

Régis PARANQUE. ÉCONOMIE MONDIALE - 1990 : de l'euphorie à la crainte [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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