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DYADE

La dyade est l'archétype de tous les aspects symboliques, conceptuels et logiques que porte le nombre deux : dualité, duplicité, contrariété, aporicité, symétrie, gémellité, complémentarité, antagonisme, ambivalence, etc. C'est l'archétype qui régit les formes et les processus de symétrisation, de polarisation, d'opposition, d'union, de séparation, de domination, de conjonction, de disjonction, etc. ; du même et de l'autre platonicien ou de toute autre dénomination du couple majeur « soi-non soi ».

Sur le plan de la pensée symbolique, la dyade permet de poser la question de la création, de la genèse, de l'origine de ce que n'est pas l'Un. La séparation créatrice qu'elle suppose s'opère aux trois niveaux de la réalité symbolique.

Au niveau cosmogonique, il semble que le mythe de l'œuf cosmique originaire soit universel. On trouve de nombreuses versions du même récit de la genèse du cosmos : un œuf-germe naît des eaux primordiales ; il se sépare en deux pour donner le ciel et la terre ; en émergent le jour et la nuit, le soleil et la lune ou tout autre dyade de troisième génération cosmique. La séparation de l'œuf originel produit deux demi-sphères, l'une d'or, l'autre d'argent. Apparition double : celle du symbole solaire de la lumière irradiante, de la sphère convexe, de l'extériorité, celle du symbole lunaire de la lumière réfléchie, de la sphère concave, de l'intériorité. Cette séparation du germe en valeurs opposées (contenant/contenu, matière/forme, évolution/involution, dispersion/recueillement, émanation/réception) engendre un cosmos : un ordre contrasté d'apparition. C'est elle qui est à la racine de toute chose et la rend connaissable. Et c'est d'elle que procèdent tous les mouvements cosmiques de flux et de reflux des formes : inspiration/expiration, diastole/systole, génération/dégénération, naissance/mort, création/destruction, amour/haine, guerre/paix, homogenèse/hétérogenèse, apparition/disparition, progression/régression, etc.

Au niveau théogonique on retrouve l'interprétation du même symbole. Pour qu'un principe créateur d'ordre apparaisse et puisse manifester sa puissance, il doit combattre un principe de désordre, de destruction, de mort, de trahison, de mensonge, il doit en mourir et par là l'assumer en sa renaissance. Ce drame théogonique de la dyade peut prendre plusieurs formes : dieu/démiurge (par exemple Dionysos dévoré par les Titans), dieu/démon (Rê et Apophis, Jahvé et Léviathan, Zeus et Typhon, Christ et antéchrist), dieu/dieu (le combat des frères ennemis Osiris/Seth, la guerre opposant Ahura-Mazda et Angra Mayniu, et qui dans l'Avesta déploie toute l'histoire de la création), dieu fils/déesse mère (Marduk dévoré par Tiamat puis victorieux d'elle), dieu fils/dieu père (Kronos/Ouranos), dieu/homme (qui peut aller jusqu'au meurtre de Dieu comme dans l'orphisme ou le christianisme), etc. La création est-elle le reflet et l'enjeu d'une telle séparation dyadique en le divin lui-même ? Cet aspect d'ombre et de négativité à l'intérieur du divin se retrouve dans toute religion. C'est cet aspect qui se manifeste dans le judaïsme par le récit de Job, dans le christianisme par le double visage du Christ apocalyptique. Lorsque cette prégnance de la dyade au niveau théogonique d'incarnation des symboles s'exacerbe au point de devenir exigence absolue d'une libération du mal, elle forme l'essence des gnosticismes. Mais c'est la même prégnance qui informe tout dualisme religieux comme toute religion à mystère (orphisme, isisme, christianisme, etc.). Ce mystère de la négation ou de la différence en Dieu s'est universellement symbolisé par la dyade de la lumière et des ténèbres. La lumière[...]

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