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DETTE PUBLIQUE

Les justifications de l'endettement public

Si l'État ne peut s'endetter à l'infini et s'il ne sait jusqu'où il peut aller, pourquoi mener une politique dont on ignore les limites ? La politique de dépenses publiques élevées et de leur financement par l'emprunt trouve sa justification dans l'approche keynésienne qui repose sur trois idées-forces :

– La dépense publique est plus efficace pour augmenter la production que la dépense privée. Dès lors, il est normal d'accroître le rôle de l'État et l'emprunt est un moyen commode d'y parvenir.

– Le financement par l'emprunt de certaines dépenses publiques limite la ponction fiscale. On évite ainsi l'effet d'éviction de la dépense privée par la dépense publique. Ce raisonnement est pleinement valable si l'endettement public se traduit par une création monétaire ex nihilo qui ne modifie en rien la demande des agents privés, c'est-à-dire, concrètement, si les banques achètent la dette publique en créant de la monnaie et non pas en mobilisant l’épargne des ménages. Rappelons que ce sont les banques commerciales qui créent la monnaie – et non pas directement la banque centrale – et que, dans tous les pays, ce sont elles qui sont les acheteurs de la dette publique, la banque centrale se contentant de la leur racheter.

– Une situation globale de l'épargne qui se traduit par un excédent de la balance des paiements courants peut être améliorée grâce au déficit budgétaire. En effet, la combinaison des équations comptables de référence de l'économie montre qu'un solde positif de la balance des paiements courants signifie un excédent d'épargne qui n'arrive pas à s'investir dans le secteur privé national. L'État doit mobiliser ce surplus d'épargne pour financer des investissements publics.

Ces arguments trouvent néanmoins leur pendant sous forme de critiques de l'endettement public qui s'organisent autour de cinq thèmes :

– L'entrepreneur privé qui prend un risque personnel est toujours plus à même d'analyser la pertinence d'une dépense. La dette privée est donc préférable à la dette publique et la dépense privée plus judicieuse que la dépense publique.

– L'effet d'éviction est permanent et inévitable du fait des équivalences ricardienne (que l'agent privé apporte des moyens à l'État par l'impôt ou par l'emprunt, ce qu'il fournit à l'État n'est pas dépensé par lui) ou néo-ricardienne (l'anticipation des remboursements futurs et donc des hausses d'impôts à venir née de l'accumulation de dette publique, même en cas de financement par création monétaire de celle-ci, augmente le taux d'épargne des ménages, ce qui conduit à une augmentation du prix des actifs et à une diminution de la dépense privée).

– Le fonctionnement du marché des changes assure l'équilibre de la balance des paiements courants et l'État ne doit pas se mêler de l'allocation de l'épargne.

– L'État, à la différence des entreprises privées, ne subit pas de sanctions en cas d'erreurs d'appréciation sur la nature de ses dépenses. Une entreprise qui se trompe perd ses fonds propres puis fait faillite. L'État ne peut ni ne doit faire faillite. Lorsque son endettement est pleinement efficace, il suscite un surcroît de croissance qui se traduit par une augmentation des rentrées fiscales. Mais lorsque son endettement est économiquement inefficace, il accumule une dette dont il ne sait comment se défaire.

– La dette publique perturbe les marchés financiers. Dans un raisonnement reposant sur l'égalité entre l'offre et la demande, le taux d'intérêt à long terme est déterminé par la comparaison entre le flux d'épargne et le flux d'investissement[...]

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Pour citer cet article

Jean-Marc DANIEL. DETTE PUBLIQUE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Ratio de la dette publique au P.I.B. - crédits : Encyclopædia Universalis France

Ratio de la dette publique au P.I.B.

Autres références

  • AGENCES DE NOTATION

    • Écrit par Patrick JOLIVET
    • 3 415 mots
    ...du conseil des gouverneurs de la B.C.E. du 3 mai 2010 pour les titres de créance négociables émis ou garantis par l'État grec, à la suite des dégradations répétées des notations de sadette souveraine, reléguée en catégorie « spéculatif » par Standard & Poor's à la fin du mois d'avril 2010.
  • ALGÉRIE

    • Écrit par Charles-Robert AGERON, Universalis, Sid-Ahmed SOUIAH, Benjamin STORA, Pierre VERMEREN
    • 41 835 mots
    • 25 médias
    ...chance pour l'Algérie : elles contribuent à plus de 50 % du PIB, elles assurent 75 % des revenus extérieurs et représentent 98 % des exportations du pays. Ces revenus lui ont permis de réduire sa dette extérieure qui ne représente plus que 1 % du PIB en 2009 et lui ont procuré une confortable réserve en devises...
  • ALLEMAGNE (Politique et économie depuis 1949) - L'économie allemande depuis la réunification

    • Écrit par Hans BRODERSEN
    • 6 059 mots
    • 9 médias
    Les nombreux chantiers d'intervention que l'État fédéral a dû ouvrir ont laissé des traces budgétaires durables. Avant la réunification, entre 1970 et 1990, la dette publique ouest-allemande calculée selon les normes de Maastricht correspondait à une moyenne de 32 p. 100 du PIB annuel. De 1996 à...
  • AMÉRIQUE LATINE, économie et société

    • Écrit par Jacques BRASSEUL
    • 13 724 mots
    • 22 médias
    Environ un tiers de la dette totale des pays en développement concerne l'Amérique latine. La question de ladette externe a pour origine l'accumulation de déséquilibres des paiements courants, fruits d'échanges de biens et services structurellement déficitaires pour la plupart des pays de la zone pendant...
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Voir aussi