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BALLIF CLAUDE (1924-2004)

Contrairement à la majorité des compositeurs de sa génération, le Français Claude Ballif a toujours prôné une expression directe du sentiment afin d'offrir au public une écoute libérée de tout intellectualisme.

Né le 22 mai 1924 à Paris, Claude Ballif étudie le violon et le solfège dès l'âge de six ans. Cet enseignement est interrompu en 1937, lorsque son père, colonel instructeur, est nommé à Madagascar ; à Soanira, le jeune Ballif apprend à jouer de plusieurs instruments à vent avec le chef de musique de la direction de l'artillerie. Revenu en France, à Bordeaux, en 1940, il décide de se consacrer à la musique et commence l'étude de l'harmonie, de l'analyse et de la composition. Après plusieurs années passées au Conservatoire de Paris, où il reçoit notamment l'enseignement de Noël Gallon et d'Olivier Messiaen, il s'installe à Berlin en 1952, où il travaille notamment avec Boris Blacher. C'est à Berlin qu'il assume lui-même la création de ses premières pièces pour piano (Airs comprimés et Pièces détachées, 1953). Comme la plupart des compositeurs à cette époque, il ressent la nécessité d'utiliser la méthode de composition à douze sons, mais la série restera pour Ballif un moyen et jamais une fin. En 1955, il reçoit le premier prix de composition musicale au concours international de Genève pour sa pièce d'orchestreLovecraft et son Premier Quatuor à cordes.

Adoptant une démarche très personnelle, il s'efforce de rattacher au passé chaque nouvelle étape de l'évolution de la musique et tente une synthèse de différents langages. Il élabore en particulier le concept de métatonalité (exposé dans Introduction à la métatonalité, paru en 1956), fondé sur une échelle de onze sons, et qui permet d'échapper à la double dichotomie modalité-tonalité et diatonisme-chromatisme. De 1957 à 1959, Ballif suit les cours d'été de Darmstadt, où il travaille la direction d'orchestre avec Hermann Scherchen et s'initie aux micro-intervalles auprès d'Alois Hába ; à Darmstadt, lieu d'étude, de création et de confrontation artistique, il rencontre Bruno Maderna, Luciano Berio, Karlheinz Stockhausen, Pierre Boulez... Ce qui ne l'empêche pas de se lier d'amitié avec John Cage et Bo Nilsson, avec lesquels il sème la terreur au sein des musiciens sériels, dont il critique le sectarisme. Favorable à l'innovation, Ballif n'en est pas moins opposé au sérialisme intégral, à la rationalisation forcenée de la musique. Pour lui, une œuvre réussie n'est pas un moment de perfection immuable et reclus dans le sublime, c'est au contraire un organisme vivant qui parvient à nous imposer le rythme de sa respiration, à nous faire partager ses mutations sonores, ses mouvements dans le temps et dans l'espace sans pour autant s'abandonner à l'ivresse sonore. Il a toute sa vie rappelé le célèbre mot de son ami John Cage : « Il faut laisser les sons être ce qu'ils sont. »

En 1959, il entre au Groupe de recherches musicales de la R.T.F. en qualité d'assistant. Après avoir créé deux pièces pour bande magnétique (Études au ressort, 1961, et Points, mouvements, 1962), il ressent le besoin de rompre l'isolement du studio, de réagir contre l'immuabilité de la bande et l'impression de froideur du son ainsi élaboré en réintroduisant dans sa création un élément vivant, le contact avec l'instrumentiste. En 1961, il commence la série des Solfeggietto, pièces de très grande virtuosité destinées chacune à un instrument différent : flûte (no 1), cor anglais (no 2, 1961), basson (no 11, 1984), violoncelle (no 13, 1985), marimba (no 16, 1995)... Ballif n'hésite pas à utiliser les formes musicales du « passé » (trio, quatuor, quintette, sonate, prélude...) ; par le cadre qu'elles[...]

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Écrit par

  • : musicologue, analyste, cheffe de chœur diplômée du Conservatoire national supérieur de musique de Paris, chargée de cours à Columbia University, New York (États-Unis)

Classification

Pour citer cet article

Juliette GARRIGUES. BALLIF CLAUDE (1924-2004) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • MÉTATONALITÉ

    • Écrit par Alain FÉRON
    • 188 mots

    La métatonalité fut inventée par le compositeur français Claude Ballif, qui en fixa le concept en 1956 dans son livre intitulé Introduction à la métatonalité : vers une solution tonale et polymodale du problème atonal (Richard-Masse, Paris). Il s'agit d'une synthèse entre le système...

Voir aussi