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CARPATES

Les Carpates dans l'histoire des sociétés

Types de peuplements

Les Carpates, comme les montagnes balkaniques, et plus que les Alpes, ont joué dans l'histoire des sociétés le rôle d'une barrière et d'un refuge. Certaines crêtes ont servi, au moins temporairement, à l'établissement des frontières : les Hautes Tatras marquent la limite des peuplements et des langues slovaque et polonaise ; la colonisation médiévale des Saxons en Transylvanie n'a pas dépassé les cols donnant accès aux plaines moldave et valaque. Bien que plus aisées d'accès, les passes traversant la chaîne ont été moins empruntées que celles des Alpes. La montagne, même d'altitude moyenne, a été un refuge pour des peuples pourchassés par les envahisseurs : ainsi, on observe une continuité du peuplement d'origine dace dans les bassins intérieurs (Maramures, Fagaras, Hateg) des Carpates roumaines. Dans le Bihor, les Motsi ont colonisé et défriché les plus hautes pentes. La population pastorale nomade et semi-nomade d'origine valaque a pendant longtemps parcouru les alpages de la Transylvanie à la Pologne avant de se fixer dans les hautes vallées ou au fond des bassins. Il n'empêche que le remarquable éventail hydrographique des Carpates a été une voie de pénétration ou de dispersion vers les plaines, soit sur le versant pannonien (affluents très longs du Danube et de la Tisa), soit sur le versant polonais (affluents de la Vistule), soit sur les versants orientaux (Danube inférieur et Prut).

Dans le cadre d'une économie traditionnelle, la montagne a été un réservoir de richesses exploitées localement et de manière artisanale par des populations parfaitement adaptées au milieu. L'exploitation, souvent désordonnée, des belles futaies de chênes et de résineux alimentait une industrie du bois. Les mines – argent et cuivre en Slovaquie, or et fer en Transylvanie – ont attiré d'abord les Romains, puis les Germains.

De la vie pastorale à la coopération régionale

La vie pastorale fut intense jusqu'à la Première Guerre mondiale : le grand géographe français de Martonne et les ethnologues slovaques et roumains ont décrit les mouvements locaux des troupeaux et des hommes montant, à cette époque, vers les stine, chalets d'alpage, et les mouvements de transhumance d'ovins venant des plaines voisines. C'est dans le cadre restreint de communautés autarciques (un groupe de vallées, un versant, un bassin) que se sont développés les régions ou pays (tari en roumain) qui ont gardé, avec des traits d'économie ancienne, des particularismes ethniques et folkloriques. Au cœur de la montagne ou sur ses bordures, la bourgade jouait le rôle de forteresse ou de marché.

Grâce à l'application de plans régionaux, à l'effort financier consenti en faveur de régions défavorisées, à la mise en œuvre de techniques nouvelles, l'économie moderne a permis l'intensification de l'usage des ressources traditionnelles. Mais, poursuivie sans discernement, cette politique a conduit à la surexploitation de ces mêmes ressources, provoquant pollution, déforestation et désertification des zones rurales. Qui plus est, après un demi-siècle de domination communiste dans l'ensemble des pays concernés, la transition vers l'économie de marché s'est déroulée dans la douleur, avec de fortes hausses des taux de chômage et de pauvreté. Par ailleurs, deux obstacles ont entravé la restitution des terres à leurs anciens propriétaires : ceux-ci ont aujourd'hui largement passé l'âge de travailler ou alors se sont installés en ville après leur expropriation. Si les mines de métaux ferreux et non ferreux, longtemps florissantes, se sont taries, d'importantes richesses sont exploitées dans le sous-sol des Carpates : gaz naturel du plateau transylvanien, pétrole des Carpates orientales, charbon brun et lignite des Carpates occidentales,[...]

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Écrit par

  • : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Nanterre, journaliste scientifique
  • : agrégé de géographie, docteur d'État ès lettres
  • : directeur de recherche au C.N.R.S.
  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Pour citer cet article

André BLANC, Pierre CARRIÈRE, Universalis et Mircea SANDULESCU. CARPATES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Tatras (Slovaquie) - crédits : Brett Baunton/ Getty Images

Tatras (Slovaquie)

Carpates : schéma structural - crédits : Encyclopædia Universalis France

Carpates : schéma structural

Autres références

  • BALKANS ou PÉNINSULE BALKANIQUE

    • Écrit par Jean AUBOUIN, Michel ROUX
    • 7 514 mots
    • 1 média
    La branche alpidique, au nord-est, dont les structures sont déversées vers le continent européen, comprend les Carpates et le Balkan. Les Carpates dessinent une vaste courbure, de sorte qu'on y distingue les Carpates occidentales en Slovaquie et en Pologne, les Carpates orientales en Ukraine...
  • BANAT

    • Écrit par Violette REY
    • 475 mots

    Région située au sud-est de la plaine hongroise, à proximité du défilé des Portes de Fer par où le Danube perce l'arc carpato-balkanique. Sa vocation de passage et de carrefour utilisée dès l'époque romaine lui a valu bien des vicissitudes au cours de l'histoire : dévastée par les Ottomans, au ...

  • BUKOVINE ou BUCOVINE

    • Écrit par Violette REY
    • 264 mots
    • 1 média

    Située sur le versant nord-est des Carpates, la Bucovine est une province historique située aux confins de l’Ukraine et de la Roumanie.

    Par sa position stratégique commandant le large passage qui sépare les Carpates moldaves des Carpates slovaques, cette région fit longtemps l'enjeu des volontés...

  • CARPATIQUE PIÉMONT

    • Écrit par Jean-Paul VOLLE
    • 411 mots

    Entre la Vistule (Wisla) et la San, sur quelque 15 000 kilomètres carrés, s'étend la Pologne carpatique dont le point culminant atteint 2 500 mètres dans les Tatra. À l'est, séparées des Tatra par la dépression du Podhale, les Beskides (Carpates extérieures), aux dénivellations moins accusées,...

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Voir aussi