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BRUXELLES

La question politique bruxelloise

La limitation étroite de la région par rapport à la réalité métropolitaine renvoie aux problèmes communautaires belges. La question politique bruxelloise ne peut se comprendre qu'en prenant en considération à la fois le ressentiment des autres Régions du pays, tant wallonne que flamande, contre le lieu qui fut celui de la centralisation et de la concentration du pouvoir politique et économique dès l'indépendance, et la volonté flamande d'arrêter la francisation de la capitale et de son agglomération et d'y établir une répartition des influences paritaire ou quasi paritaire entre francophones et Flamands.

Lors de l'indépendance, l'État belge a fait choix du français comme langue des affaires publiques. Or Bruxelles, proche de la frontière linguistique mais au nord de celle-ci, était une ville où la majorité pratiquait un dialecte flamand. Cette option linguistique initiale était étroitement liée à la nature sociale du nouvel État et aux choix qui en ont découlé, notamment celui d'un régime électoral censitaire réservant droit de vote et d'éligibilité aux détenteurs de fortunes importantes, tous d'expression française sur tout le territoire du royaume. Cette option explique aussi la rapide naissance du mouvement flamand, qui suit de près la naissance de l'État. Bruxelles sera alors le berceau d'un « flamingantisme démocratique », très différent des développements ultérieurs du mouvement flamand.

Le premier recensement général de la population, en 1846, enregistre plus de 60 % de Flamands à Bruxelles. Cette population va se franciser de recensement en recensement. L'arrivée d'immigrants wallons renforce encore la francisation et les immigrants flamands passent au français sous la pression de la culture dominante. De même, l'expansion démographique s'accompagne de la francisation des faubourgs, jusque-là villages flamands. Croissance et francisation sont donc alors parallèles et interdépendantes.

Les lois linguistiques

La législation linguistique de 1932 constitue une étape importante. Sont alors reconnus l'unilinguisme des régions flamande et wallonne et le bilinguisme de la capitale et de son agglomération, où les relations entre les administrations locales et les citoyens se déroulent en français ou en néerlandais. L'enseignement y est organisé dans des établissements les uns francophones, les autres flamands. Le mouvement flamand demeure toutefois insatisfait : il voit dans le recensement de la population (qui comporte des questions sur l'emploi des langues et qui détermine le tracé de la frontière entre les régions linguistiques et donc les limites de l'agglomération) une opération plus politique que scientifique. Il dénonce ce qu'il considère comme une non-application des dispositions légales dans l'agglomération bruxelloise et exige des mécanismes de contrôle pour sanctionner ces situations.

Le dernier recensement linguistique, celui de 1947, fait apparaître une proportion de Flamands inférieure à 25 % dans l'agglomération bruxelloise et entraîne l'augmentation de 16 à 19 du nombre de communes officiellement bilingues, par l'adjonction de Berchem-Sainte-Agathe, Evere et Ganshoren.

L'extension de la région bilingue et la périurbanisation des francophones au-delà de ses limites reçoivent dans les milieux flamands l'appellation de tache d'huile. La renforcement du mouvement flamand à la fin des années 1950 va s'y opposer tout particulièrement. Une nouvelle génération de militants d'action flamande crée un Vlaams Aktiekomitee voor Brussel en de Taalgrens (VAK), comité d'action flamand pour Bruxelles et la frontière linguistique, organe de coordination de nombreuses associations culturelles flamandes. Dès lors, alors que la loi faisait obligation au gouvernement d'organiser à la fin de 1960[...]

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Écrit par

  • : président-directeur général du Centre de recherche et d'information sociopolitiques, Bruxelles
  • : docteur en sciences géographiques, professeur émérite à l'Université libre de Bruxelles, membre de la classe des lettres de l'Académie royale de Belgique, président de la Société royale belge de géographie

Classification

Pour citer cet article

Xavier MABILLE et Christian VANDERMOTTEN. BRUXELLES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Belgique : carte administrative - crédits : Encyclopædia Universalis France

Belgique : carte administrative

Bruxelles : la région Bruxelles-Capitale - crédits : Encyclopædia Universalis France

Bruxelles : la région Bruxelles-Capitale

Maison Saint-Cyr, G. Strauven - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Maison Saint-Cyr, G. Strauven

Autres références

  • BAUDOUIN Ier (1930-1993) roi des Belges (1951-1993)

    • Écrit par Georges-Henri DUMONT
    • 1 167 mots
    • 1 média

    Fils aîné de Léopold III et d'Astrid de Suède, Baudouin est né à Bruxelles, le 7 septembre 1930. Deux grandes épreuves ont marqué son enfance : la mort accidentelle de sa mère en 1935 et la captivité dans la forteresse d'Hirschstein-sur-Elbe où les Allemands ont déporté son père...

  • BELGIQUE - Géographie

    • Écrit par Christian VANDERMOTTEN
    • 6 705 mots
    • 6 médias
    ...30 528 kilomètres carrés, la Belgique est le deuxième pays le plus dense d'Europe, après les Pays-Bas. La Région flamande (13 522 km2), au nord, et Bruxelles (161 km2) rassemblent 68 % de la population sur 45 % du territoire (575 hab./km2), alors que la Région wallonne (16 844 km2), au sud,...
  • BELGIQUE - Histoire

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    ...Bruges. Après la révolution de Juillet, qui avait éclaté en 1830 à Paris, la fièvre révolutionnaire monta en Belgique. Un soulèvement de prolétaires à Bruxelles – provoqué par le chômage et les difficultés d'approvisionnement – fournit aux futurs électeurs censitaires un motif pour s'organiser militairement....
  • BELGIQUE - La période contemporaine

    • Écrit par Universalis, Jean FANIEL, Xavier MABILLE
    • 9 047 mots
    • 2 médias
    ...régions doivent être exercées par les organes politiques des communautés. Ce choix consacre l'importance donnée au lien entre Flamands de Flandre et de Bruxelles et exprime la réticence à reconnaître Bruxelles comme une région à l'égal de la Flandre et de la Wallonie. Cette disposition permettrait notamment...
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