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BRETAGNE

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Histoire de la Bretagne

Mythes et réalités

Les limites de la province ont été tellement stables depuis le xe siècle que l'on considère d'ordinaire la configuration de la province comme le résultat, quasi inévitable, d'une évidente nécessité géographique. C'est oublier le caractère artificiel des frontières orientales de la Bretagne. C'est, plus encore, sous-estimer l'hétérogénéité fondamentale du pays. Les liaisons terrestres ont été des plus précaires jusqu'au xviiie siècle. L'expression géographique « Bretagne » recouvre non seulement l'opposition classique de la Haute-Bretagne, de la Basse-Bretagne et du pays nantais, mais encore l'existence prolongée d'une multitude de petits « pays », tournés vers la mer beaucoup plus que vers le terroir voisin. La langue elle-même ne simplifie pas les relations humaines. Le breton a certes atteint au ixe siècle une limite jalonnée à l'est par les villes de Dol, Montfort, Donges et Pornic. La rapidité du recul de la langue bretonne dès le xe siècle, qu'on ne peut imputer à la seule aristocratie locale, permet de supposer que son implantation en Haute-Bretagne n'a jamais été très solide. Au surplus, du Trégorrois au Vannetais, les dialectes locaux n'ont cessé de se différencier, constituant ainsi plutôt un facteur d'opposition que d'unité. La mythologie romantique a voulu expliquer cette fragmentation péninsulaire par l'existence d'une « forêt centrale », reste de la « forêt primitive », lieu d'élection de tous les enchantements et de tous les sortilèges de la forêt de Brocéliande. Mythe littéraire d'autant plus tentant qu'il serait la source du « cycle breton ». Mais, dès l'époque romaine, il n'y a plus de forêt centrale, et même si elle a repris quelques terrains à la faveur des troubles et des invasions, il n'existe aucun moyen, pour l'heure, d'en vérifier, d'en mesurer l'ampleur réelle – qui a dû être faible. Quant au « cycle breton », il est, pour l'essentiel, gallois et d'outre-Manche. Les apports bretons ne semblent que très partiels et, en définitive, passablement hypothétiques.

À vrai dire, vocabulaire et aspect géographique se sont conjugués pour aider à la naissance de ces mythes. Sous l'Ancien Régime, on dénomme, en Bretagne, forêt ce qui n'est bien souvent que simple lande. Le bocage surtout donne l'illusion d'un pays boisé. L'infinie patience de l'école géographique rennaise a maintenant tiré au clair la question de l'origine du bocage breton. Il s'est constitué à des époques diverses, à partir d'un paysage « originel » qui a dû être, au point de départ, un openfield. Une partie de ce bocage existait dès l'époque romaine, peut-être dès la préhistoire. Mais, à bien interpréter les cartulaires, une grande partie du bocage semble s'être formée au haut Moyen Âge, entre la période carolingienne et le xiie siècle. Il s'est étendu par la suite, souvent sous la pression des propriétaires et des seigneurs fonciers, pour atteindre son maximum d'extension avec le défrichement des landes au xixe siècle. Ainsi le paysage breton, avec ses multiples enclavures de « campagnes », est l'un des plus historiques que l'on puisse imaginer, œuvre de longue haleine, étroitement liée aux conditions juridiques et économiques d'une histoire particulièrement complexe.

Des constructeurs de « dolmens » aux envahisseurs normands (Xe siècle)

Dolmens et menhirs : consacrés par l'usage, ces termes des « celtisants » du xviiie siècle évoquent une grande civilisation ouest-atlantique et méditerranéenne, qui a donné à la péninsule bretonne son premier grand rôle historique. Comme l'ère du bronze, comme plus tard encore l'époque de[...]

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Écrit par

  • : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Rennes
  • : professeur à l'université de Rennes-II-Haute-Bretagne

Classification

Pour citer cet article

Jean MEYER et Jean OLLIVRO. BRETAGNE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 23/10/2017

Médias

Bretagne : carte physique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Bretagne : carte physique

Côte sauvage en Bretagne - crédits : Joe Cornish/ Getty Images

Côte sauvage en Bretagne

Rade de Brest - crédits : E.Quemere'/ De Agostini/ Getty Images

Rade de Brest

Autres références

  • BRETAGNE, région administrative

    • Écrit par et
    • 3 070 mots
    • 1 média

    La région administrative « Bretagne », dont le chef-lieu est Rennes, s'étend sur 27 208 kilomètrescarrés et est constituée de quatre départements (Côtes-d'Armor, Finistère, Ille-et-Vilaine et Morbihan). Par rapport à la « Bretagne historique », elle est amputée de la Loire-Atlantique...

  • AMOCO CADIZ MARÉE NOIRE DE L' (16 mars 1978)

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    • 469 mots

    Le soir du 16 mars 1978, le supertanker Amoco Cadiz s'échoue face au petit port breton de Portsall (Finistère-Nord), libérant, en quinze jours, 223 000 tonnes de pétrole léger et 4 000 tonnes de fioul lourd. Les conséquences en sont lourdes : 300 kilomètres de côtes polluées, entre 19 000...

  • ANNE DE BRETAGNE (1477-1514) duchesse de Bretagne (1488-1514) et reine de France

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    Fille de François II, duc de Bretagne, et de Marguerite de Foix, Anne devint duchesse de Bretagne à la mort de son père conformément à une décision prise par les états convoqués à cette fin en 1486. Par le traité du Verger (19 août 1488), le roi Charles VIII avait donné son accord et...

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    On désigne sous le nom de bagaudes (terme d'origine celtique qui signifie « les combattants ») les paysans gaulois qui se révoltèrent contre les Romains à l'époque de Dioclétien (fin du iiie siècle) et les révoltés de Gaule et d'Espagne dans la première moitié du ...

  • BREST

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    Principale ville du Finistère (dont Quimper est le chef-lieu), Brest, avec 143 902 habitants dans la commune et 314 844 dans l'aire urbaine (en 2012), est la deuxième ville de la Bretagne administrative, après Rennes, la capitale régionale.

    La localisation de Brest est si exceptionnelle...

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