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AMOUR

Les représentations de l'amour dans l'art occidental

Amour sacré et amour profane, Titien - crédits : Hulton Fine Art Collection/ Getty Images

Amour sacré et amour profane, Titien

Les représentations de l'Amour sont innombrables dans l'art occidental depuis la Renaissance. Elles se présentent sous des formes variées. Cupidon, réputé être le fils de Vénus, est à la fois l'agent et l'incarnation du pouvoir que la déesse exerce sur les hommes. Cette figure n'est donc pas sans ambiguïté : c'est à la fois un être déterminé, avec son origine et son histoire, et la personnification d'une notion abstraite et intemporelle. Par certains côtés, l'Amour est un dieu, et par d'autres une allégorie.

Il est arrivé aux écrivains et aux artistes, suivant la tradition de l'Antiquité, de multiplier les figures de l'Amour : le petit dieu apparaît au milieu de nombreux frères, et l'Amour finit par se confondre dans la multitude anonyme des Amours. Ces gracieuses créatures n'ont pas tardé à envahir l'art chrétien : à côté des anges et des archanges, que la tradition du Moyen Âge représente comme de jeunes hommes ailés d'une beauté surnaturelle, apparaissent des angelots, leurs jeunes frères, représentés comme de petits enfants.

L'amour profane

Il n'y a pas de mot en français pour désigner ces légères créatures, et l'on se sert de l'italien putto. Au sens propre, le putto est un enfant de quatre ou cinq ans. Dans le langage des artistes, les putti sont ces petits êtres dont les formes rondes et les mines rieuses fournissent mille ressources à l'imagination. Les enfants représentés en tant que tels sont rares avant le xviiie siècle. C'est dans les assemblées d'Amours et d'angelots que l'on voit s'exprimer l'intérêt que les peintres et les sculpteurs ont porté à l'enfance. Lorsque, avec les Lumières, l'enfant prend sa place dans la société, le putto perd son importance comme motif artistique. La première moitié du xixe siècle a vu disparaître entièrement ce thème.

Putti, jardin du château de Versailles - crédits : Crobard/ Shutterstock

Putti, jardin du château de Versailles

Putto, Église du Christ flagellé, Wies - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Putto, Église du Christ flagellé, Wies

Les traités et les manuels de mythologie font toujours de l'Amour le fils de Vénus. Sur l'identité du père, il y a des hésitations. Le plus souvent Cupidon a pour père Mars, mais parfois c'est Mercure, et parfois il n'a pas de père du tout. Dans tous les cas la naissance de l'Amour est un sujet extrêmement rare. Enfant perpétuel, il semble exister de toute éternité.

Discrets sur la naissance de l'Amour, les poètes et les artistes sont en revanche prodigues de détails sur son éducation. C'était un gamin insupportable qu'il n'a jamais été possible de bien élever. L'essentiel de cette tâche est revenu à la mère, et en particulier les punitions. Deux groupes en bronze de Francesco Susini montrent Vénus fouettant l'Amour et Vénus brûlant les flèches de l'Amour (1639 ; une paire est conservée au Louvre). Ces sujets, inspirés d'Anacréon et de ses imitateurs alexandrins, ont eu une grande fortune au xviiie siècle. Deux statuettes en marbre de Falconet représentent en pendants Vénus qui allaite l'Amour et Vénus fouettant l'Amour (1760 ; plusieurs exemplaires sont connus, dont une paire dans la collection Frick, à New York, et une autre dans la collection Wallace, à Londres).

Les méfaits de l'Amour n'ayant épargné personne, nombreux sont les dieux qui eurent à le punir. Un tableau quelquefois attribué à Caravage et quelquefois à Bartolommeo Manfredi montre l'Amour renversé à terre et sévèrement fouetté par Mars (Art Institute, Chicago). Vénus essaie de calmer la fureur du dieu de la Guerre ; Mars est un fort gaillard qui, ayant retroussé ses manches, retient d'une main ferme un Amour déjà grand, jeune garçon plutôt qu'enfant, avec des cheveux frisés et une mine de voyou. Nous sommes ici loin des gentillesses alexandrines. Ce genre de sujets est d'ailleurs rare dans le milieu des peintres[...]

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé de lettres, conservateur des objets d'art des églises de la Ville de Paris
  • : maître de conférences en philosophie à l'université de Paris-X-Nanterre

Classification

Pour citer cet article

Georges BRUNEL et Baldine SAINT GIRONS. AMOUR [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Amour jouant du luth, R. Fiorentino - crédits : Rabatti - Domingie/ AKG-images

Amour jouant du luth, R. Fiorentino

Amour sacré et amour profane, Titien - crédits : Hulton Fine Art Collection/ Getty Images

Amour sacré et amour profane, Titien

Putti, jardin du château de Versailles - crédits : Crobard/ Shutterstock

Putti, jardin du château de Versailles

Autres références

  • ACTE, philosophie

    • Écrit par Paul GILBERT
    • 1 282 mots
    ...une autre de ses sources. Pour Plotin, l'être suit l'agir, car il est énergie, mouvement. Ce qu'Aristote disait de l'intellection, Plotin le transpose dans l'amour, avec les mêmes structures de la noèsis noèséôs, de la pensée se pensant elle-même. L'amour, « se transportant...
  • AGAPÈ

    • Écrit par Henry DUMÉRY
    • 1 102 mots

    Le mot grec agapè signifie affection, amour, tendresse, dévouement. Son équivalent latin est caritas, que nous traduisons par « charité » (dans les textes stoïciens comme dans les textes chrétiens). Généralement, la langue profane emploie agapè pour désigner un amour de parenté ou d'amitié,...

  • ALTRUISME

    • Écrit par Guy PETITDEMANGE
    • 3 328 mots
    • 1 média
    ...représentation d'essence, mais de la fable, une fiction. L'origine comme la visée en sont un mieux-agir dans la relation même, impératif éthique qu'exprime idéalement le termeamour. Plus qu'une thérapie de l'exil et de la désolation, l'amour est retournement du soi, le geste juste face à l'autre.
  • L'AMOUR FOU, André Breton - Fiche de lecture

    • Écrit par Guy BELZANE
    • 979 mots
    L'amour fut la grande affaire de Breton et des surréalistes : « Amour, seul amour qui soit, amour charnel, je t'adore, je n'ai jamais cessé d'adorer ton ombre vénéneuse, ton ombre mortelle. » Affaire personnelle, vécue et rapportée dans ce récit en partie autobiographique (il y est question de la rencontre...
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Voir aussi