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ALEXANDRE LE GRAND (356-323 av. J.-C.)

Si tant d'écrits ont été consacrés à Alexandre III de Macédoine le Grand, c'est que le sujet n'a pas cessé d'attirer public et éditeurs. Encore faut-il remarquer que l'histoire du roi macédonien n'est qu'imparfaitement connue, et que les zones d'ombre ont laissé le champ libre aux interprétations – toujours contestables – et aux polémiques, pour ne rien dire d'une floraison d'ouvrages relevant du genre romanesque. Héros pour les uns, mégalomane pour les autres, et ce dès l'Antiquité, le plus connu des rois macédoniens a trop servi de référence au cours des siècles pour que les Modernes portent un jugement serein sur son œuvre. Or celle-ci a été diversement jugée, selon que l'on reproduisait des stéréotypes hérités des Anciens (victoire des « bons » Grecs sur les « méchants » Perses, idéalisme du roi-conquérant visant l'unification du genre humain, fin du monde des cités grecques indépendantes) ou du xixe siècle (colonisation par les Grecs, porteurs d'une civilisation supérieure, de vastes régions peuplées de « Barbares »). Si l'on fait abstraction de ces lieux communs, il reste que les conquêtes d'Alexandre modifièrent profondément l'équilibre des forces au Proche-Orient où l'Iran perdit la prédominance qu'il exerçait depuis Cyrus : il ne la retrouvera qu'avec les Parthes, deux siècles plus tard et elle fut d'ailleurs contenue par une Rome belliqueuse. Ces conquêtes modifièrent également le rapport des forces à l'intérieur du monde grec en faisant apparaître une disproportion, inconnue jusqu'alors, entre les royaumes hellénistiques, édifiés sur les ruines de l'empire d'Alexandre, et les vieilles cités, comme Athènes ou Sparte, qui, sans connaître un déclin aussi profond qu'on le croyait naguère, prirent du moins vite conscience d'une faiblesse résultant moins d'une « décadence » (dont on peut légitimement douter) que d'une réévaluation des critères de puissance. De ce fait, durant les deux siècles qui suivirent la mort d'Alexandre, l'histoire de la Méditerranée orientale se résuma aux luttes opposant ses héritiers hantés par le rêve de reconstituer l'Empire éclaté. Ce sont là des faits majeurs qui justifient un examen, forcément sommaire, des grandes phases d'un règne bref, mais riche de conséquences.

Alexandre le Grand - crédits : A. Dagli Orti/ De Agostini/ Getty Images

Alexandre le Grand

-600 à -200. Philosophes et conquérants - crédits : Encyclopædia Universalis France

-600 à -200. Philosophes et conquérants

Comment nous est connue l'histoire d'Alexandre

Portrait d’Alexandre le Grand - crédits : T. Baggett/ Fotolia

Portrait d’Alexandre le Grand

Rappelons les données du problème historiographique. Le récit le plus ancien est celui du Sicilien Diodore, contemporain de César et d'Auguste. Plus appréciée des Modernes, l'Anabase d'Alexandre, œuvre d'Arrien de Nicomédie, qui exerçait de hautes fonctions sous Hadrien, n'en est pas moins postérieure d'un demi-millénaire aux événements qu'elle relate. Qu'il se réfère à ces auteurs, ou encore au Romain Quinte-Curce (qui vécut probablement sous Claude) ou au philosophe Plutarque, le lecteur moderne se retrouve donc confronté à des interprétations tardives, d'une fiabilité incertaine. Si, depuis le xixe siècle, l'on préfère Arrien, c'est qu'il s'inspirait de mémorialistes contemporains d'Alexandre, comme Ptolémée, le fondateur de la dynastie des Lagides, Néarque, proche collaborateur du roi et amiral de sa flotte, ou encore Aristoboulos, un technicien grec de son entourage. On se méfie en revanche de la « vulgate », tradition romancée représentée par les ouvrages du Grec Diodore et des Romains Trogue-Pompée (abrégé par Justin) et Quinte-Curce. Son créateur fut l'historien Clitarque d'Alexandrie qui vécut, semble-t-il, sous le règne de Ptolémée Ier. Or ces auteurs ne s'accordent pas toujours entre eux. Certes, leur objectivité n'est jamais assurée, d'autant qu'Alexandre fut mal vu des écoles[...]

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Écrit par

  • : correspondant de l'Institut (Académie des inscriptions et belles-lettres), professeur de langue et littérature grecques à l'université de Nancy-II

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Pour citer cet article

Paul GOUKOWSKY. ALEXANDRE LE GRAND (356-323 av. J.-C.) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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Alexandre le Grand

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Autres références

  • AFGHANISTAN

    • Écrit par Daniel BALLAND, Gilles DORRONSORO, Universalis, Mir Mohammad Sediq FARHANG, Pierre GENTELLE, Sayed Qassem RESHTIA, Olivier ROY, Francine TISSOT
    • 37 316 mots
    • 19 médias
    Alexandre de Macédoine (356-323 av. J.-C.) envahit l'Afghanistan. Après avoir détruit les armées de Darius III, dernier des Achéménides, il entra en Afghanistan par Aria, à la poursuite de Bessus, satrape de Bactriane, qui s'était proclamé empereur et successeur légal de Darius. Le conquérant...
  • ALEXANDRIE À L'ÉPOQUE HELLÉNISTIQUE - (repères chronologiques)

    • Écrit par Bernard HOLTZMANN
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    21 janvier — 331 Fondation d'Alexandrie d'Égypte par Alexandre le Grand.

    Avant — 305 Transfert du corps d'Alexandre à Alexandrie.

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    — 297-— 285 Construction, par Sôstratos de Cnide,...

  • ANTIPATROS ou ANTIPATER (400-319 av. J.-C.)

    • Écrit par Paul GOUKOWSKY
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    Né vers 400 avant J.-C., il fut en effet l'alter ego de Philippe II qui appréciait en lui peut-être moins le chef militaire que...

  • APELLE (IVe s. av. J.-C.)

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    ...pu servir de réserve de sujets. Apelle excellait dans tous les genres. Le premier des portraitistes officiels, il était le seul autorisé à représenter Alexandre et fit des portraits des grands personnages de l'époque hellénistique : Philippe de Macédoine, Antigonos le Borgne, qu'il plaça habilement de...
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