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HITLER ADOLF (1889-1945)

La trajectoire d'Adolf Hitler n'a guère d'équivalent dans l'histoire ; elle était sans précédent dans l'histoire allemande. Voilà un raté scolaire et un marginal social devenu agitateur politique qui, après avoir été condamné à la prison pour haute trahison en 1923, acquiert la nationalité allemande en 1932 et s'assied, en janvier de l'année suivante, sur le siège de Bismarck. Devenu un homme d'État extraordinairement populaire en son pays, il plongea ce dernier et l'Europe entière dans la pire catastrophe d'un siècle qui n'en fut pourtant pas avare.

La trajectoire de cet homme, dont on a dit qu'il avait été constamment sous-estimé, pose la question de ses talents ou, plus exactement, de l'adéquation entre ceux-ci et les aspirations de la société allemande. Sans des conditions historiques particulières, on peut douter que les Allemands se seraient ralliés à lui ; ils ne l'auraient pas fait quelques décennies plus tôt. Même si on ne prétend pas y répondre exhaustivement, cette question mérite d'être gardée à l'esprit.

Un raté social

Né le 20 avril 1889 dans la petite ville autrichienne de Braunau-sur-l'Inn, non loin de Linz, Hitler eut une enfance partagée entre l'affection de sa mère et une relation conflictuelle avec son père. Cet homme modeste, qui s'était hissé au rang d'inspecteur des douanes, rêvait pour son fils d'une carrière de fonctionnaire, perspective devant laquelle celui-ci regimbait en arguant de son intérêt pour l'art. Après la mort de son père et un parcours scolaire médiocre, le jeune Hitler partit pour Vienne, où il essuya un double échec au concours d'admission à l'Académie des beaux-arts. La mort de sa mère étant survenue peu après, le jeune homme mangea son petit héritage en rêvant d'un grand destin, avant de glisser dans la marginalité. De 1908 à 1913, il vécut de menus travaux et de la vente d'aquarelles qu'il peignait, confronté à l'expérience des asiles de nuit. Lecteur assidu, il s'imprégna d'une littérature pangermaniste et antisémite qui lui fit prendre en horreur l'empire des Habsbourg, auquel il reprochait de faire obstacle à l'union des Allemands d'Autriche avec ceux du Reich.

En 1913, Hitler partit s'installer à Munich pour échapper au service militaire sous les drapeaux de l'empire détesté. À près de vingt-cinq ans, il était toujours sans profession et sans attaches. Mais sa personnalité était déjà formée : des aspirations artistiques tenaces ; une culture livresque qui lui servait surtout à alimenter ses préjugés ; une superbe ignorance du monde non germanique, des langues et des pays étrangers ; de la mémoire, du discernement, une vraie capacité d'analyse ; et une affectivité bridée qui laissait peu de place à l'affection et à l'amour.

En août 1914, lorsque la guerre éclate, Hitler s'engage, plein d'enthousiasme, dans l'armée bavaroise. Pour la première fois, il connaît une expérience collective, il se socialise dans la vie militaire dont il épouse les valeurs, l'expérience de la Grande Guerre achevant de durcir en lui une brutalité naturelle. Son courage lui vaut la Croix de fer de première classe, sans lui permettre de dépasser le grade de caporal. Jusqu'au-boutiste, il fut enragé par la défaite et s'en retourna dans une Allemagne bouleversée par la chute de l'empire et par des secousses révolutionnaires – en 1919, Munich connut une éphémère république soviétique.

Pendant un an encore, Hitler resta dans l'armée, où il fut utilisé comme informateur et agent de propagande. Il entra ainsi en contact avec un petit parti d'extrême droite, le Parti ouvrier allemand, auquel il se consacra après sa démobilisation. Le Munich de l'après-défaite fut sa[...]

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Écrit par

  • : professeur d'histoire à l'Institut de hautes études internationales, Genève (Suisse)

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Médias

Adolf Hitler - crédits :  Hulton Archive/ Getty Images

Adolf Hitler

Défilé nazi, 1933 - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Défilé nazi, 1933

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