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HITLER ADOLF (1889-1945)

Le chef de régime

Hitler au pouvoir, 1933 - crédits : National Archives

Hitler au pouvoir, 1933

La nomination de Hitler au poste de chancelier, le 30 janvier 1933, ne fut pas la conséquence d'une victoire électorale. Aux élections de novembre 1932, le Parti nazi avait perdu des voix par rapport à celles de juillet, passant de 37,3 à 33,1 p. 100 des suffrages (196 sièges). Cette nomination fut le résultat des intrigues d'une poignée de conservateurs, menés par Franz von Papen ; désireux de mettre en place un régime autoritaire, ils jugeaient que l'affaiblissement du Parti nazi allait leur permettre de se servir de Hitler. Ayant l'oreille du président Hindenburg et l'appui des dirigeants de l'armée, sensibles aux promesses de réarmement du chef nazi, ils lui firent ouvrir la porte de la chancellerie.

Ce pari allait se retourner contre ses auteurs. Car si Hitler présidait un gouvernement de coalition où il était minoritaire, il parvint rapidement à établir sa prépondérance. Mettant à profit l'incendie du Reichstag du 27 février 1933, il se fit attribuer les pleins pouvoirs par le Parlement. Puis la coalition, dont il était le chef nominal, obtenant une majorité aux élections de mars (le vote nazi lui-même ne dépassa pas 43,9 p. 100, dans un climat pourtant marqué par la mise hors la loi du Parti communiste et l'intimidation exercée par la SA), il interdit dans la foulée les partis de gauche, avant d'obtenir l'autodissolution des partis de droite. La voie était désormais ouverte au parti unique (le N.S.D.A.P. est déclaré parti unique le 14 juillet), les nazis s'empressant d'éliminer leurs adversaires par la violence la plus brutale (les camps de concentration accueillirent bientôt des dizaines de milliers de personnes) et utilisant leur monopole pour encadrer la société et lui inculquer les valeurs du nouveau régime.

Hitler et Röhm - crédits : AKG-images

Hitler et Röhm

L'ascendant pris par Hitler sur ses alliés conservateurs le laissait cependant dans une situation qu'il lui fallait encore consolider, comme le montra bientôt l'émergence d'un double danger. La SA de Röhm inquiétait de plus en plus les militaires, car elle exigeait de former le noyau de la future armée. De leur côté, des conservateurs comme Papen intriguaient dans la perspective de la succession du président Hindenburg, qui était malade. Placé devant le risque d'une éventuelle alliance entre l'armée et les conservateurs, Hitler sacrifia la SA lors de la Nuit des longs couteaux, le 30 juin 1934, première démonstration de sa violence sanguinaire – la seconde allait venir lors du pogrome de la Nuit de cristal, le 9 novembre 1938. L'opération fit environ deux cents morts : parmi eux des chefs de la SA, dont Röhm, mais aussi des personnalités conservatrices comme l'ancien chancelier von Schleicher. Elle permit à la SS de gagner du galon et d'élargir le pouvoir que son chef Heinrich Himmler était en train d'acquérir en mettant la main sur la police. Après la mort de Hindenburg, au début d'août 1934, Hitler cumula sans susciter d'objections les titres de chancelier et de chef de l'État (le 19 août), devenant du même coup le commandant suprême des forces armées.

De ce moment, la marginalisation des conservateurs devint inéluctable. Leurs dernières têtes de file quittèrent le gouvernement au début de 1938, époque à laquelle Hitler assuma en personne le commandement de la Wehrmacht. Une concentration de pouvoirs remarquable, qui lui permettait de diriger dorénavant le régime comme il l'avait fait pour le Parti nazi, à savoir en l'absence de toute collégialité – le gouvernement ne se réunit plus à partir du début de 1938 – et selon un système de délégation de pouvoirs sur la base d'un rapport de confiance qui aiguillonnait la compétition pour obtenir la faveur du chef et compliquait la coordination efficace des efforts. Devenu l'astre du système, Hitler pouvait jouer les uns contre les autres[...]

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Écrit par

  • : professeur d'histoire à l'Institut de hautes études internationales, Genève (Suisse)

Classification

Pour citer cet article

Philippe BURRIN. HITLER ADOLF (1889-1945) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Adolf Hitler - crédits :  Hulton Archive/ Getty Images

Adolf Hitler

Défilé nazi, 1933 - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Défilé nazi, 1933

Hitler au pouvoir, 1933 - crédits : National Archives

Hitler au pouvoir, 1933

Autres références

  • ACCESSION D'HITLER AU POUVOIR

    • Écrit par Sylvain VENAYRE
    • 209 mots
    • 1 média

    Le 30 janvier 1933, Adolf Hitler est nommé chancelier, dans la légalité républicaine définie par la Constitution de Weimar. À ce moment-là, son parti, le Parti ouvrier allemand national-socialiste (N.S.D.A.P.) ou Parti « nazi » qui veut tenter, après Mussolini, une synthèse du nationalisme...

  • ACCORDS DE MUNICH

    • Écrit par Sylvain VENAYRE
    • 214 mots
    • 1 média

    Fidèle à son pangermanisme proclamé, Adolf Hitler réclame avec plus d'insistance que jamais, en septembre 1938, la cession au IIIe Reich du territoire tchécoslovaque sur lequel vit la minorité germanophone des Sudètes. L'Allemagne est prête à la guerre pour obtenir gain de cause. Le...

  • ALLEMAGNE (Histoire) - Allemagne moderne et contemporaine

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    ...l'échec du putsch de novembre 1923, se reconstruit. C'est à Munich, en février 1925, que se place la « seconde fondation » du parti, sous la direction de Hitler récemment libéré. Elle ne va pas sans difficultés, sans heurts entre Hitler et les frères Strasser qui accentuent le caractère socialiste et anticapitaliste...
  • ANSCHLUSS (1938)

    • Écrit par Sylvain VENAYRE
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    • 1 média

    Parvenu au pouvoir en Allemagne en janvier 1933, Hitler, au nom du pangermanisme, souhaite le rattachement (Anschluss) de l'Autriche au IIIe Reich. En juillet 1934, il soutient ainsi une tentative de coup d'État menée par les nazis autrichiens. Le chancelier autrichien Dollfuss est assassiné,...

  • ARCHITECTURE & ÉTAT AU XXe SIÈCLE

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    • 3 970 mots
    • 3 médias

    L'intervention de l' État dans le domaine de l' architecture ne constitue pas un phénomène nouveau. De tout temps et sous tous les régimes, l'État est intervenu dans la mesure où toute réalisation architecturale met en cause les intérêts de couches de population bien plus larges que celles...

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Voir aussi