Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

RECHERCHE SCIENTIFIQUE

L'homme a toujours voulu comprendre le monde et la société dans lesquels il vit, et depuis plusieurs siècles, c'est la recherche scientifique qui tente de répondre à ce besoin. La recherche a d'abord une dimension « culturelle » – connaître et comprendre la nature –, mais comme elle rend possible, jusque dans ses aspects les plus fondamentaux, la maîtrise de cette nature, elle est aussi, de fait, un enjeu de puissance autant que de pouvoir. La science et la technologie ont provoqué des mutations profondes dans nos sociétés : en changeant notre vision du monde et nos modes de vie, elles sont devenues des composantes essentielles de l'activité humaine dans les sociétés modernes. L'émergence des politiques de la recherche et de la technologie, depuis la Seconde Guerre mondiale, traduit la prise de conscience de cette réalité.

Les origines de la recherche organisée : l'institutionnalisation de la science

La science moderne est le produit d'une longue mutation accomplie, en Europe, sur environ quatre siècles à partir de l'époque de Galilée. Elle a apporté à nos sociétés à la fois une méthode pour étudier la nature et une vision nouvelle du rapport de l'homme à l'Univers et à la matière que l'on qualifie souvent de « modernité ». L'explication des phénomènes naturels en termes mécaniques ou physico-chimiques, leur représentation à l'aide des mathématiques sont les fondements de cette « modernité » qui allait contribuer à l'avènement, au xviiie siècle, de l'ère industrielle. L'Europe a été le foyer où est née la science moderne ; la pensée scientifique s'est formée en Occident en bénéficiant d'un important héritage oriental, transmis en particulier par l'islam. Grâce à des érudits arabes, notamment Avicenne et Averroès, les Européens redécouvrirent, au xiiie siècle, la pensée grecque et en particulier le système d'Aristote qui constitua le fondement de l'enseignement des universités médiévales. L'émergence en Europe d'une science moderne fut contemporaine de l'apparition, à la Renaissance, d'un monde de marchands et de comptables, et l'idée que la science pouvait devenir l'élément central d'une conception du progrès prit corps petit à petit. À partir du xvie siècle, des « utopies » apparurent qui donnaient une place importante à la science dans une vision à long terme de la société. Le philosophe anglais Francis Bacon conçut ainsi un grand projet dans La Nouvelle Atlantide (1627) : « La science peut et doit être organisée et appliquée à l'industrie, pour améliorer et transformer les conditions de vie. »

<em>Encyclopédie </em>de Diderot et d’Alembert - crédits : AKG-Images

Encyclopédie de Diderot et d’Alembert

Si à la Renaissance l'activité des scientifiques était devenue autonome dans les universités, se distinguant de celle des théologiens et des philosophes (des chaires de science et de médecine avaient été créées), ce n'est qu'au début du xviie siècle que les collectivités de scientifiques vont s'organiser au sein des premières académies, souvent créées à l'initiative de personnalités politiques. C'est ainsi que fut fondée à Rome, en 1609, la plus ancienne des académies, l'Accademia dei Lincei (Galilée en fut membre) parrainée par le prince Cesi. La création de la Royal Society à Londres en 1662, qui devait beaucoup aux idées de Bacon, fut une nouvelle étape. L'Académie des sciences fut créée en France à Paris, en 1666, à l'instigation de Colbert, pour donner un caractère permanent à l'activité scientifique avec le soutien du pouvoir politique ; l'Observatoire de Paris est construit en 1669. En France, le dessein politique de Colbert – renforcer le potentiel économique de la France – rejoignait le projet des scientifiques de trouver un appui durable pour leurs activités. Cette convergence[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur émérite à l'École de physique et chimie de Paris, président d'honneur de l'Observatoire des sciences et des techniques

Classification

Pour citer cet article

Pierre PAPON. RECHERCHE SCIENTIFIQUE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

<em>Encyclopédie </em>de Diderot et d’Alembert - crédits : AKG-Images

Encyclopédie de Diderot et d’Alembert

Le cyclotron - crédits : Keystone/ Getty Images

Le cyclotron

Tendances de la recherche et développement dans les grandes régions de l'O.C.D.E. - crédits : Encyclopædia Universalis France

Tendances de la recherche et développement dans les grandes régions de l'O.C.D.E.

Autres références

  • BIBLIOMÉTRIE

    • Écrit par Ghislaine FILLIATREAU
    • 1 807 mots
    • 1 média

    Les bases de la bibliométrie – qui est un ensemble de techniques visant à s’appuyer sur l’analyse des publications scientifiques pour mesurer la production de connaissances nouvelles – se sont véritablement développées à partir des années 1950, lorsque des chercheurs ont pu établir des statistiques...

  • ÉVALUATION DE LA RECHERCHE

    • Écrit par Ghislaine FILLIATREAU
    • 3 219 mots
    • 1 média

    Partout dans le monde, les décideurs et les citoyens considèrent la recherche comme une activité d’une importance cruciale pour la puissance économique et le rayonnement culturel de leur pays. C’est vrai pour le secteur public, où tous les responsables politiques affirment mettre la recherche et l’éducation...

  • ÉVOLUTION DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE DANS LE MONDE

    • Écrit par Yves GINGRAS
    • 3 611 mots
    • 16 médias

    Il est d’usage de dire que la science est par essence internationale. S’il est vrai que la validité d’une connaissance scientifique ne dépend pas des particularités des individus qui la produisent et a en principe un caractère universel, il en va autrement de la distribution mondiale des recherches...

  • RESPONSABILITÉ SOCIALE DES SCIENTIFIQUES

    • Écrit par Jacques TESTART
    • 7 709 mots
    • 4 médias

    La responsabilité de la science et de ses acteurs au regard de la société ne serait pas un problème crucial si la science avait un impact modéré sur la vie des hommes et sur la planète – ce qui n'est plus le cas depuis au moins un demi-siècle – et si elle n'était pas une activité sacralisée échappant...

  • PARTICULES ÉLÉMENTAIRES

    • Écrit par Maurice JACOB, Bernard PIRE
    • 8 172 mots
    • 12 médias
    Il s'agit d'accélérer les particules élémentaires (électrons, protons) à des énergies de plus en plus élevées. Les développements technologiques permettent de construire des accélérateurs de plus en plus puissants dans des limites budgétaires acceptables. On est ainsi passé ainsi de 100 MeV (1950)...
  • ABEL PRIX

    • Écrit par Universalis, Jean-Marie PRUVOST-BEAURAIN
    • 938 mots

    Le prix international Abel pour les mathématiques, décerné depuis 2003, est la plus haute distinction dans cette science.

    Oscar II, roi de Suède et de Norvège, avait proposé en 1902 d'instituer ce prix en l'honneur du mathématicien norvégien Niels Henrik Abel (1802-1829), mais cette...

  • ACADÉMIE DES SCIENCES DE RUSSIE

    • Écrit par Jérôme PIERREL
    • 1 282 mots

    Créée par le tsar Pierre le Grand (1672-1725) en 1724 – oukase (décret) du 8 février nouveau style –, l’Académie des sciences et des arts de Saint-Pétersbourg a été ouverte à la fin de l’année suivante, par l’impératrice Catherine Ire (oukase du 18 décembre). Sa première...

  • AGRONOMIE

    • Écrit par Stéphane HÉNIN, Michel SEBILLOTTE
    • 9 202 mots
    • 1 média
    Mais, parallèlement à cette organisation de l'enseignement, il fallait aussi créer desorganismes de recherche. Roville était à la fois l'un et l'autre, et, en principe, toutes les écoles d'agriculture avaient, suivant leur niveau, soit une mission de ferme pilote, soit une mission de recherche. Si...
  • Afficher les 93 références

Voir aussi