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SIONISME

Le sionisme après la création de l'État d'Israël

Pour Ben Gourion, l'existence d'un État souverain devait, logiquement, conduire à la liquidation définitive de la Diaspora (shliḥat hagola) par l'immigration massive de tous les juifs. Cette perspective devait donc, à terme, amener la dissolution pure et simple du sionisme. À contrecœur, Ben Gourion dut toutefois bien reconnaître que, même si une vague d'immigration considérable submergea le pays (près de 700 000 personnes entre 1948 et 1951), la grande majorité des juifs ne tenait pas à quitter « les pays d'exil ». Pragmatique, Ben Gourion accepta que le sionisme organisé continue d'avoir une existence autonome, à charge pour lui d'apporter à l'État d'Israël, matérialisation tangible de l'idéal sioniste, un soutien non seulement politique et financier, mais existentiel.

La continuité du sionisme comme structure

L'État d'Israël n'est pas uniquement l'État de ses seuls citoyens, juifs et arabes, mais aussi, potentiellement, celui des juifs de la Diaspora qui, en vertu de la loi du retour (1950), bénéficie d'un droit naturel à immigrer et à obtenir, automatiquement, la nationalité israélienne. Le caractère sioniste de l'État d'Israël qui se manifeste clairement au travers de cette disposition se retrouve dans l'aménagement institutionnel qui codifie les relations entre l'État et l' Organisation sioniste mondiale.

Cette dernière, qui agit au nom de l'ensemble du peuple juif, est habilitée à prendre en charge l'installation et l'éducation des nouveaux immigrants.

En 1971, afin de favoriser l'intervention active des juifs de la Diaspora dans la construction du pays, l' Agence juive, qui faisait jusqu'alors corps avec l'Organisation sioniste, fut dotée d'une autonomie véritable en associant, sur une base paritaire, les représentants de l'O.S.M. (Organisation sioniste mondiale) et ceux des organes de collecte de fonds en diaspora (American Jewish Appeal aux États-Unis, Keren Hayessod dans les autres pays, dont la France).

Le congrès sioniste, qui se réunit tous les cinq ans, reste le « parlement » du sionisme organisé. Il est composé pour un tiers de délégués israéliens (répartis en fonction du poids politique de leur parti à la Knesset), un tiers d'Américains et un tiers de délégués d'autres pays, élus dans le cadre des organisations sionistes nationales.

Le programme sioniste de 1968 qui est toujours en vigueur insiste sur l'unité du peuple juif et la centralité d'Israël, le rassemblement des juifs en Eretz Israël et l'encouragement à l'éducation juive et hébraïque en diaspora. Dans les années 1980, l'O.S.M. a insisté sur une double tâche :

– élargir la participation des juifs de la Diaspora aux activités de l'O.S.M. afin d'en faire une structure plus ouverte et moins bureaucratique ; dans ce but ont été accueillis trois mouvements religieux (réformés, conservateurs, orthodoxes) ainsi que la Fédération séfarade mondiale ;

– souligner la nécessité d'accomplir personnellement le sionisme par l' aliya.

Par la médiation de l'O.S.M., de l'Agence juive ou du Fonds national juif en charge de la bonification des terres, les juifs de la Diaspora expriment leur participation à la construction du pays en apportant un soutien avant tout financier.

Depuis 1948, environ douze milliards de dollars ont été versés, sous forme de dons, après collecte dans plus de soixante-dix pays de la Diaspora. Les deux tiers de cette somme proviennent toutefois des États-Unis, ce qui justifie pleinement la remarque d'un commentateur américain : « Si on le mesure à l'aune de la collecte de fonds, le sionisme américain est le groupe d'intérêt à caractère politique le plus performant de notre histoire nationale.[...]

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Écrit par

  • : docteur en sociologie politique, directeur de recherche au CNRS, CERI-Sciences Po

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Pour citer cet article

Alain DIECKHOFF. SIONISME [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Mausolée de Theodor Herzl - crédits : Pickow/ Hulton Archive/ Getty Images

Mausolée de Theodor Herzl

Theodor Herzl - crédits : Imagno/ Hulton Archive/ Getty Images

Theodor Herzl

Création de l'État d'Israël, 1948 - crédits : The Image Bank

Création de l'État d'Israël, 1948

Autres références

  • ALLON YIGAL (1918-1980)

    • Écrit par Universalis
    • 393 mots

    Militaire et homme politique israélien né le 10 octobre 1918 à Kefar-Thabor (Palestine, aujourd'hui en Israël), mort le 29 février 1980 à 'Afula (Israël).

    Yigal Allon, de son vrai nom Feikowitch, est l'un des premiers chefs du Palmakh, commando de la Haganah (organisation militaire...

  • AUX ORIGINES D'ISRAËL (Z. Sternhell) - Fiche de lecture

    • Écrit par Ariane BONZON
    • 1 519 mots

    Qu'est-il advenu de la société nouvelle que les pères fondateurs d'Israël voulaient instaurer sur la Terre promise ? Tel est l'objet de la recherche que propose Zeev Sternhell dans son livre Aux origines d'Israël. Entre nationalisme et socialisme (Fayard).

    Présentée dès...

  • BEGIN MENAHEM (1913-1992)

    • Écrit par Claude KLEIN
    • 1 013 mots
    • 3 médias

    Sixième Premier ministre de l'État d'Israël, Menahem Begin est né à Brest-Litovsk le 16 août 1913. La ville que les juifs appelaient Brisk, aujourd'hui biélorusse, était alors polonaise. Durant toute sa vie, Begin est marqué par l'atmosphère pesante, voire sombre, dans laquelle vivent...

  • BEN GOURION DAVID (1886-1973)

    • Écrit par Alain DIECKHOFF
    • 1 865 mots
    • 5 médias

    « Est monté en Israël en 1906 ». Cette épitaphe, qui figure sur la tombe de David Ben Gourion, témoigne avec force du fait que l'arrivée du jeune homme, en septembre 1906, dans la Palestine ottomane, constitua son véritable acte de naissance politique. Il n'eut de cesse, à compter de ce...

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Voir aussi