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ROLLING STONES

Et si, pour une fois, l'outrance d'un slogan publicitaire –  « le plus grand groupe de rock'n'roll du monde » – convenait à ceux qu'elle désigne, les Rolling Stones ? Quels qu'aient été leurs coups de génie, leurs turpitudes, leurs déchirements ou leurs bonheurs, les Rolling Stones ont inventé, par un rock puissamment musical, une attitude dure et dandy qui a provoqué, exprimé et contesté le changement des temps dans les années 1960. Parce qu'ils étaient des copains complices et rivaux, qui comme des milliers d'autres voulaient que la musique se confonde avec une vie qui vaille la peine d'être vécue. Parce qu'ils étaient outrageusement beaux et qu'ils possédaient à eux tous le génie de la démesure maîtrisée. Parce qu'ils étaient rebelles et que chacun d'eux a incarné à sa manière le mythe du rock'n'roll : Wyman et Watts l'ont regardé de haut, Jagger en a fait un opéra baroque, Richard l'a confondu avec les substances, Jones en est mort. Peu importe que ces cinq individus se soient perdus dans le stupre et les stups, qu'ils se soient insultés, haïs et aimés : l'essentiel est que leur musique en ait fait des figures emblématiques sur le théâtre des violences modernes, aux prises avec le spleen et tous les dérèglements, et qui attendent de la musique une forme inédite de salut.

Formation d’un groupe, genèse d’une légende

Mick Jagger (pour l'état civil Michael Philip Jagger, chanteur) et Keith Richards (guitare, qui retirera ultérieurement le « s » de son nom), deux petits bourgeois londoniens nés le 26 juillet et le 18 décembre 1943, respectivement, et qui avaient été voisins dans leur enfance – ils sont originaires de la même ville de banlieue, Dartford –, se rencontrent à nouveau en 1960. Leurs goûts sont les mêmes, ils jouent de la musique ensemble. En 1962 apparaît Brian Jones (né le 28 février 1942 à Cheltenham, dans le Gloucestershire, et mort le 3 juillet 1969 à Hatfield, dans le Sussex), qui se fait alors appeler Elmo Lewis (son vrai nom est Lewis Brian Hopkin-Jones), jeune bourgeois mythomane, peu scrupuleux avec l'argent et les dames, caractériel et égocentrique. Passionné de musique, il pratique plusieurs instruments. Il sera le chef musical du groupe pendant longtemps. La même année, Bill Wyman (William Perks, plus âgé que les autres : il est né le 24 octobre 1936 à Londres), qui a servi dans la Royal Air Force, s'intègre au groupe comme bassiste. C'est enfin le tour de Charlie Watts (Charles Robert Watts, né le 2 juin 1941 et mort 24 août 2021 à Londres), un semi-professionnel de la batterie qui travaille dans la publicité. Ces cinq garçons représentent tous les courants de la musique populaire anglo-saxonne quinze ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, du jazz traditionnel au rock'n'roll en passant par le blues et le rhythm'n'blues noirs américains.

Les Rolling Stones, vers 1964 - crédits : AKG-images

Les Rolling Stones, vers 1964

Un très jeune agent, Andrew Oldham, prend en charge leur image en ajoutant un « g » à l'orthographe du nom de leur groupe, qui se nommait initialement Rollin' Stones, titre d'un morceau de Muddy Waters. Il crée pour eux un style vestimentaire et des coiffures de jeunes voyous en rupture avec la vieillerie du monde. Les débuts sont fulgurants, les concerts violents : dès 1964, les Stones sont aussi célèbres que les Beatles. Les médias exploitent lourdement les antagonismes entre les deux groupes, assurément concurrents mais certainement pas ennemis. Les premiers albums (The Rolling Stones et 12x5 en 1964 ; Got Live If You Want It !, en public, 1965) sont des hommages au blues qui reprennent des standards de Slim Harpo, Chuck Berry, Bo Diddley, Muddy Waters, Buddy Holly ou Howlin' Wolf. L'influence de la soul d'Otis Redding se fait aussi sentir, comme on peut l'entendre dans l'album [...]

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Écrit par

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Pour citer cet article

Michel P. SCHMITT. ROLLING STONES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Les Rolling Stones, 1978 - crédits : Ed Perlstein/ Redferns/ Getty Images

Les Rolling Stones, 1978

Les Rolling Stones, vers 1964 - crédits : AKG-images

Les Rolling Stones, vers 1964

Les Rolling Stones, 1975 - crédits : Michael Ochs Archives/ Getty Images

Les Rolling Stones, 1975

Autres références

  • (I CANT GET NO) SATISFACTION (The Rolling Stones)

    • Écrit par Eugène LLEDO
    • 327 mots
    • 1 média

    Enregistré le 11 mai 1965 alors que le groupe est en tournée aux États-Unis, (I Cant Get No) Satisfaction figure au panthéon de la pop music comme la chanson emblématique d'une génération. En dépassant leurs influences majeures – le blues et la soul américaine –, les Rolling Stones...

  • POP ET ROCK

    • Écrit par Eugène LLEDO
    • 1 255 mots
    ...Got Me, 1975) ou des artistes comme Jimi Hendrix (Hey Joe) sont considérés comme pop, car ils adhèrent par essence à la tendance psychédélique. Les Rolling Stones (chanson I Wanna Be Your Man, composée par John Lennon et Paul McCartney, 1963, puis leur album Their Satanic Majesties Requests, 196...
  • POP MUSIC

    • Écrit par Paul ALESSANDRINI, Gérard JOURD'HUI, Philippe JUGÉ, Christian LEBRUN
    • 7 691 mots
    • 12 médias
    En 1964, des petits clubs fourmillent dans le Grand Londres. Les Rolling Stones se présentent comme un groupe de rhythm and blues. Plus américains que les Américains eux-mêmes, ils vont, sur la trace des Beatles, conquérir le marché mondial. Carol (1964), Little Red Rooster (1965), Satisfaction...
  • WATTS CHARLIE (1941-2021)

    • Écrit par Universalis
    • 664 mots
    • 1 média

    Le batteur Charlie Watts a apporté, durant plus de cinquante ans, une rythmique ferme et solide à l’univers sonore des Rolling Stones. Peu enclin à se livrer aux performances frénétiques et exubérantes de ses compères, ce Britannique au look élégant et soigné a aussi nourri tout au long de sa...

Voir aussi