PSYCHOPHARMACOLOGIE

Discipline moderne, la psychopharmacologie est la science des agents chimiques capables d'influer sur l'état mental et sur le comportement. Elle comprend notamment l'étude des médicaments et des drogues susceptibles de réduire les désordres psychiques ou, au contraire, de les produire.

Son individualisation date des années 1950. Sa dénomination date de 1956 et la fondation de la première société scientifique spécialisée (le Collège international de neuro-psychopharmacologie) est de 1957. La formation de la nouvelle discipline résulte de deux courants de recherches : l'un est celui de la « psychiatrie expérimentale », avec l'étude des troubles qui peuvent être artificiellement provoqués et celle d'un possible substrat biochimique des désordres psychiques qui peuvent apparaître à l'état naturel ; l'autre courant est celui de la recherche thérapeutique en psychiatrie qui aboutit, à partir de 1952, à la découverte de la chimiothérapie des psychoses. En fait, c'est la démonstration de l'efficacité des méthodes médicamenteuses dans le traitement des troubles mentaux majeurs – autrement dit de la « folie » – qui marque l'essor de la psychopharmacologie.

La psychopharmacologie des origines à nos jours

L'usage des « poisons de l'esprit » ou la quête d'ivresses sacrées sont sans doute aussi anciens que l'humanité ; on en devine les traces dans certains gisements préhistoriques. De même, la recherche de médicaments psychologiques remonte aux origines de la médecine : la racine de Rauwolfia, dont fut extraite la réserpine, figurait dans la pharmacopée millénaire de l'Inde ; l'opium aurait été utilisé dès Hippocrate et la belladone était connue des Égyptiens et des Phéniciens ; quant à la coca, elle était utilisée dans l'Amérique précolombienne.

L'emploi scientifique et codifié des substances pharmaceutiques est amorcé véritablement au xix e siècle avec l'extraction des principes actifs des plantes, précédant celle des hormones, et avec les premières synthèses, minérales puis organiques. La morphine et les autres alcaloïdes du pavot sont découverts à partir de 1816, la strychnine en 1818, la caféine en 1820, la cocaïne en 1855, l'éphédrine en 1885. Cette dernière découverte conduira, après celle de l'adrénaline en 1901, à la synthèse des amphétamines à partir de 1931. Dès 1826 commence la synthèse des bromures, en 1832 celle du chloral, et en 1903 celle du premier barbiturique, le Véronal, suivie de celle du Gardénal (1912) précédant les composés modernes, d'élimination rapide, à partir de 1935.

Ces agents analgésiques ou anesthésiques, psychostimulants ou sédatifs et hypnotiques n'ont pas apporté une contribution déterminante à la thérapeutique psychiatrique du fait qu'ils agissaient sur des symptômes, mais qu'ils n'influaient pas beaucoup sur le cours des psychoses majeures. Toutefois, on doit déjà noter une certaine action des médicaments antiépileptiques et le rôle joué par la pénicilline dans le traitement des psychoses syphilitiques comme la paralysie générale. La relative inefficacité des substances pharmaceutiques disponibles jusqu'à la première moitié du xx e siècle explique le recours à des moyens physiques ou chimiques, non pour leur effet propre, mais en tant qu'agents des « méthodes de choc » biologiques. Ainsi furent proposés, entre 1917 et 1938, les traitements par la fièvre artificielle, l'insulinothérapie génératrice de comas et la convulsivothérapie par le Cardiazol ou par l' électrochoc, celui-ci étant encore très usité actuellement selon une technique améliorée grâce à l'anesthésie et à la curarisation.

Le véritable traitement chimique des psychoses débute en 1952 avec la découverte de la chlorpromazine,[...]

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Écrit par

  • Pierre DENIKER : membre de l'Académie de médecine, professeur à la faculté de médecine, médecin des hôpitaux de Paris

Classification

Pour citer cet article

Pierre DENIKER, « PSYCHOPHARMACOLOGIE », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le . URL :

Médias

Neuroleptiques : caractéristiques psychophysiologiques

Neuroleptiques : caractéristiques psychophysiologiques

Neuroleptiques : caractéristiques psychophysiologiques

Caractéristiques psychophysiologiques des neuroleptiques.

Antidépresseurs : caractéristiques

Antidépresseurs : caractéristiques

Antidépresseurs : caractéristiques

Caractéristiques générales des antidépresseurs.

Neuroleptiques

Neuroleptiques

Neuroleptiques

Neuroleptiques.

Autres références

  • ABRÉACTION

    • Écrit par Pierre-Paul LACAS
    • 2 300 mots

    Terme utilisé en psychiatrie et en psychothérapie et qui traduit l'allemand Abreagiren, mot inconnu sans doute avant Breuer et Freud. Dans le sens le plus général, l'abréaction désigne toute décharge émotionnelle qui permet à un sujet d'extérioriser un affect lié à un souvenir[...]

  • ANALEPTIQUES

    • Écrit par Marie-Christine STÉRIN
    • 1 036 mots

    Drogues qui ont une action stimulante sur le fonctionnement des différents appareils de l'organisme. Les plus connus des analeptiques sont ceux qui agissent sur le système cardio-vasculaire et ceux qui agissent sur le système nerveux (psycho-analeptiques).

    Les analeptiques cardio-vasculaires[...]

  • BARBITURIQUES

    • Écrit par A. M. HAZEBROUCQ
    • 5 695 mots

    Composés organiques dérivant de la malonylurée improprement appelée acide barbiturique en raison de la forme de ses cristaux « semblables à une lyre » (barbitos), les barbituriques constituent un groupe homogène tant sur le plan chimique que sur le plan pharmacologique.[...]

  • DELAY JEAN (1907-1987)

    • Écrit par Jean MÉTELLUS
    • 5 705 mots

    De sa naissance à Bayonne le 14 novembre 1907 jusqu'à sa tétralogie généalogique Avant mémoire, en passant par l'Académie de médecine et l'Académie francaise, chaque moment de la vie de Jean Delay a fait l'objet d'enquêtes, de réflexions, et tout n'a suscité qu'admiration. Delay a-t-il pu[...]

  • DENIKER PIERRE (1917-1998)

    • Écrit par Henri LOO, Jean-Pierre OLIÉ
    • 3 644 mots

    Membre de l'Académie nationale de médecine, Pierre Deniker a effectué sa carrière en qualité de professeur de psychiatrie à la faculté de médecine Cochin et chef du service hospitalo-universitaire de santé mentale et de thérapeutique de l'hôpital Sainte-Anne. D'abord interne puis assistant[...]

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Voir aussi