Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

POLICE SCIENTIFIQUE

Analyse biochimique des traces

Les taches de sang ou de sperme

Pourquoi les chaussettes de M. B sont-elles tachées de sang alors qu'il prétend avoir découvert le cadavre en entrant dans l'appartement ? S'agit-il de sang humain ou animal ? N'est-ce que du jus de fruit, comme il l'affirme ? M. B aurait-il poignardé Mme X après l'avoir violée ?

Un examen à la lumière du jour ou en lumière artificielle blanche suffit le plus souvent à établir la nature biologique d'un matériel suspect. La lumière bleue ou rouge assure un meilleur contraste sur certaines surfaces, alors que l'observation en lumière ultraviolette révèle les souillures luminescentes dues à certains fluides biologiques, et en particulier au liquide séminal. La situation, le nombre et l'apparence des taches – leur taille, leur forme (variable en fonction de l'angle que forme la trajectoire de chute avec le support), leur couleur, leur texture – renseignent sur la séquence des événements. Lorsque l'objet taché ne peut être saisi, le prélèvement s'effectue soit par grattage, si la surface est lisse et non poreuse, soit par essuyage, dans le cas contraire. La tache sera ensuite transférée sur des compresses de coton stérile imbibées d'eau distillée puis soigneusement séchée afin d'éviter la dégradation de la matière organique. Il est en outre nécessaire d'étudier parallèlement un fragment de support vierge de toute tache.

L'identification du sang

Les taches de sang sont difficiles à identifier comme telles à la simple vue et peuvent être confondues avec bien d'autres traces de teinte analogue. Certaines méthodes, dites d'orientation, apportent seulement une forte présomption. Ainsi, le pigment des globules rouges, l'hémoglobine, a la propriété de décomposer l'eau oxygénée avec libération de dioxygène. Celui-ci est fixé par une substance, la benzidine, qui devient de ce fait bleu intense (recherche de l'activité peroxydasique du sang). Cette réaction, d'une extrême sensibilité, se révèle positive avec d'autres produits (jus de fruits, certaines substances minérales). Il faut donc confirmer ces résultats positifs non spécifiques par des réactions de certitude. L'identification peut se faire par l'obtention et la mise en évidence de certains des dérivés chimiques caractéristiques de l'hémoglobine. On recherche, par exemple, au spectroscope l'hémochromogène alcalin, un dérivé chimique obtenu à partir de l'oxyhémoglobine du sang ; son spectre présente deux maxima d'absorption dans le visible. On peut également traiter l'hémoglobine par un acide : elle se dissocie alors, et l'une de ses parties donne le chlorhydrate d'hématine qui cristallise en prismes allongés à angles aigus, brun violacé, caractéristiques (cristaux de Teichmann).

Mais s'agit-il de sang humain ou de sang animal ? La méthode des sérums précipitants permet de répondre à la question. En diluant la substance dans du sérum physiologique, les anticorps (immunoglobulines G) passent en solution ; l'addition d'un sérum antihumain (c'est-à-dire contenant des anticorps anti-immunoglobulines G) entraîne une agglutination antigène-anticorps dans le cas du sang humain. La technique consiste à ajouter au surnageant, obtenu après centrifugation de la solution, des hématies humaines sensibilisées. La sédimentation de ces dernières au fond du tube signale l'absence d'immunoglobulines G libres. En revanche, l'agglutination de ces hématies – elles restent alors en suspension dans le tube – montre que la solution renferme toujours les anticorps antihumains, et qu'il s'agit donc de sang d'origine animale.

Les groupes sanguins humains classiques (A, B, O), héréditairement transmissibles, s'ils confèrent une valeur[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur de biologie-géologie, membre du conseil d'administration du palais de la Découverte, conseiller pédagogique à l'I.U.F.M. de Versailles
  • : maître de conférences des Universités, praticien hospitalier.
  • : docteur en biologie moléculaire, directeur général du laboratoire Codgène de Strasbourg
  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Pour citer cet article

Universalis, Robert GAURENNE, Bertrand LUDES et Hélène PFITZINGER. POLICE SCIENTIFIQUE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Relevé d'empreintes digitales - crédits : Ministère de l'intérieur - DICOM, France

Relevé d'empreintes digitales

Autres références

  • POLICE

    • Écrit par Jean-Paul ALGRE, Universalis
    • 8 316 mots
    • 2 médias
    ...disposition de l'ensemble des enquêteurs de la police et de la gendarmerie ainsi que des autorités judiciaires les moyens d'enquête que sont les outils de police scientifique et technique et leurs fichiers opérationnels (fichier des personnes recherchées, fichier des véhicules volés, fichier automatisé des...
  • POLICE SOUS LA IIIè RÉPUBLIQUE

    • Écrit par Jean-Marc BERLIÈRE
    • 4 202 mots
    • 1 média
    Cette entrée dans la modernité est marquée par une révolution de l'enquête judiciaire, conséquence de ce qu'on appelle la police scientifique. La nécessité de distinguer le « criminel d'habitude » du « criminel de hasard » donne naissance à la police technique et scientifique (P.T.S.) et à la criminalistique,...
  • POLICE EN FRANCE DE LA LIBÉRATION À NOS JOURS

    • Écrit par René LÉVY
    • 5 046 mots
    ...1990), qui ont démontré l’insuffisance du dispositif et la perte de compétence des agents, on a assisté, à partir du milieu des années 1980, à une certaine renaissance de la police technique et scientifique, longtemps la belle endormie de la police judiciaire : création en 1985 d’une sous-direction spécifique,...
  • POLICE FRANÇAISE HISTOIRE DE LA

    • Écrit par Jean-Marc BERLIÈRE
    • 3 672 mots
    ...policiers, entreprennent des réformes multiples et durables qui marquent une nouvelle étape dans la constitution d'une police moderne, illustrée par la naissance de la « police technique et scientifique », qui laisse un temps espérer une police infaillible et « propre » débarrassée des pratiques de...

Voir aussi