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GENNES PIERRE-GILLES DE (1932-2007)

Diversité des applications de la matière, P.-G. de Gennes - crédits : Encyclopædia Universalis France

Diversité des applications de la matière, P.-G. de Gennes

Lauréat unique du prix Nobel de physique en 1991, Pierre-Gilles de Gennes avait alors été qualifié par le jury de « Newton du xxe siècle ». La citation du prix précisait « qu'il avait découvert que des méthodes développées pour étudier les phénomènes d'ordre dans des systèmes simples peuvent être généralisées à des formes plus complexes de matière et en particulier aux cristaux liquides et aux polymères ». Ces deux états de matière sont des exemples de ce qu'on appelle aujourd'hui la « matière molle ». Mais la reconnaissance allait plutôt à un savant universel et à un style de science qui a marqué et marquera pour longtemps des générations de physiciens. À travers un parcours qui l'a conduit de la physique des solides classique (avec l'étude du magnétisme et de la supraconductivité) à la physico-chimie des cristaux liquides et des polymères, à la matière en désordre et plus récemment à la biologie, on retrouve une utilisation d'un même ensemble de concepts et de raisonnements physiques et originaux qui ont donné forme et unité à une riche intuition nourrie d'une vaste culture. C'est sans doute par là plus que par une découverte particulière que l'on peut identifier le génie de De Gennes.

Des semi- aux supraconducteurs

Pierre-Gilles de Gennes, né le 24 octobre 1932 à Paris, rapporte lui-même l'originalité de son approche de la science à une scolarité tardive, commencée à douze ans, en raison de sa santé fragile. Auparavant, il avait reçu de sa mère, à Barcelonnette, une éducation qui rappelle celle que propose Rousseau dans l'Émile. Il développera son intérêt initial pour la physique à travers des visites au palais de la Découverte. Il restera toujours fidèle à ce musée de sciences interactives créé par Jean Perrin en 1937, et à la communication scientifique auprès d'un large public, tels ces dizaines de milliers de lycéens qu'il a rencontrés après son prix Nobel. Cet intérêt pour le partage des savoirs a marqué aussi la carrière universitaire de De Gennes, pour qui l'art du conteur, le jeu de scène et la recherche d'images simples accompagnaient toujours la conférence la plus savante, d'où toute prétention était bannie.

La préparation au concours d'entrée à l'École normale supérieure, qu'il effectue dans une section où étaient associées les sciences physiques et les sciences naturelles, fait de lui un naturaliste qui observe et décrit avant d'interpréter. Il a souvent présenté son travail de théoricien comme celui de la reconstruction patiente d'un puzzle plutôt que de l'utilisation d'illuminations soudaines. « Quand je vois un écheveau bien enchevêtré, a-t-il confié, je me dis qu'il serait bien de trouver un fil conducteur. »

Ses études rue d'Ulm (de 1951 à 1955), auprès d'Yves Rocard, lui font connaître l'expérimentation en physique des semi-conducteurs dans le laboratoire de Pierre Aigrain, un autre physicien très intuitif et imaginatif. Mais il ne s'estimait pas très doué pour l'expérimentation, même s'il a toujours, par la suite, mis en avant l'expérience. Il fait une thèse en physique théorique au C.E.A. (Commissariat à l'énergie atomique), auprès d'Anatole Abragam et André Herpin, sur le magnétisme des matériaux et des alliages ainsi que sur les fluctuations de cet ordre que permettent d'étudier les techniques de diffusion de neutrons, nouvellement découvertes. Cette thèse sera l'occasion pour de Gennes de forger ses premiers outils théoriques tels que l'utilisation des corrélations des fluctuations spatiales et temporelles d'un matériau possédant un grand nombre d'éléments. En 1961, il est accueilli comme maître de conférences par Jacques Friedel dans le laboratoire de physique[...]

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Écrit par

  • : directeur honoraire de l'École normale supérieure, Paris

Classification

Pour citer cet article

Étienne GUYON. GENNES PIERRE-GILLES DE (1932-2007) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Diversité des applications de la matière, P.-G. de Gennes - crédits : Encyclopædia Universalis France

Diversité des applications de la matière, P.-G. de Gennes

Autres références

  • MACROMOLÉCULES

    • Écrit par Michel FONTANILLE, Yves GNANOU, Marc LENG
    • 13 744 mots
    • 5 médias
    Les travaux de P.-G de Gennes et ses collaborateurs sont venus compléter la théorie de Flory, qui s'est montrée impuissante à rendre compte de la variation des dimensions d'une chaîne avec la concentration du milieu. Tant qu'on se situe dans le domaine des solutions diluées, la grandeur caractéristique...

Voir aussi