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SELLARS PETER (1957- )

Une profonde continuité malgré d'apparentes bifurcations

Le choix du contemporain ne se réduit pourtant pas à une table rase, ni l'immédiateté du geste à un trompe-l'œil naïf. Les anciennes traditions étrangères fournissent à Sellars une assise pour réinventer un art qui prenne en compte la complexité du présent et la globalité du monde : ainsi l'opéra chinois dans PeonyPavilion en 1998. De même, la puissance de l'engagement découvre un double fond subtil qui touche à la spiritualité humaine. Un fil court, moins sinueux qu'il n'y paraît, dévidé par une fidèle équipe de collaborateurs et témoignant d'une remarquable continuité dans les choix opérés : reprise de spectacles, approfondissement d'œuvres clés, poursuite par ricochets... À la trilogie mozartienne de la fin des années 1980 répond la mise en scène de plusieurs œuvres de Stravinski à la fin des années 1990 : The Rake's Progress (1996) mais aussi Œdipus Rex (1994 et 1998), les Pièces bibliques (1999), l'adaptation anglo-hispanique de L'Histoire du soldat (2000). Quant à la création de El Niño, La Nativité, elle marque en décembre 2000 les retrouvailles avec John Adams et le creusement du filon spirituel. Celui-ci trouvera une manière d’accomplissement avec le travail conduit en collaboration avec Simon Rattle et la Philarmonie de Berlin pour La Passion selon saint Matthieu (2010) et La Passion selon saint Jean (2014), de J. S. Bach.

Loin d'éclater en points de vue fragmentaires, l'œuvre de Peter Sellars s'ordonne selon une vision cohérente en perpétuelle évolution. Elle peut sembler partagée entre le politique et le religieux, l'américanité et l'humanisme, le rapprochement avec les communautés ethniques de Los Angeles et le passage dans les plus grandes institutions lyriques d'Europe. Ces carrefours n'en demeurent pas moins un signe de complémentarité, non de déchirement. L'idéalisme et l'activisme mêlés s'attachent à faire de la scène, dans divers formats et sur différents tons, un lieu de discussion, un moyen de réflexion : réflexion du monde, réflexion sur le monde – sur un monde où l'esprit est la mesure de la vie.

— Frédéric MAURIN

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, maître de conférences à l'université de Caen

Classification

Pour citer cet article

Frédéric MAURIN. SELLARS PETER (1957- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

<em>The Indian Queen</em>, opéra d'H. Purcell, mise en scène de Peter Sellars - crédits : Robbie Jack/ Corbis/ Getty Images

The Indian Queen, opéra d'H. Purcell, mise en scène de Peter Sellars

Autres références

  • PEONY PAVILION (mise en scène P. Sellars)

    • Écrit par Frédéric MAURIN
    • 1 087 mots

    Deux versions de l'un des plus célèbres opéras chinois, Le Pavillon aux pivoines (1598) de Tang Xianzu, devaient être présentées en France à l'occasion du festival d'Automne 1998. Le gouvernement chinois a finalement interdit que la mise en scène de l'œuvre dans sa version intégrale, par Chen...

  • ADAMS JOHN (1947- )

    • Écrit par Patrick WIKLACZ
    • 1 969 mots
    • 3 médias
    ...plus connue de John Adams est l'opéra Nixon in China (créé au Houston Grand Opera le 22 octobre 1987). Minimaliste et parfois proche de Stravinski, l'ouvrage a bénéficié de la collaboration du metteur en scène Peter Sellars et de l'écriture d'Alice Goodman. De cet opéra relatant un épisode...
  • CINÉMA ET OPÉRA

    • Écrit par Jean-Christophe FERRARI
    • 3 248 mots
    • 7 médias
    Le travail de Peter Sellars est davantage tourné vers la vidéo. Ainsi, dans son Tristan et Isolde (Opéra-Bastille, 2005), des images du vidéaste Bill Viola étaient projetées sur le fond de la scène transformé en immense écran. Les liens entre les films de Viola et l'opéra de Wagner étaient indirects...
  • SALONEN ESA-PEKKA (1958- )

    • Écrit par Universalis, Charles TRUMBULL
    • 982 mots
    À partir de 1992, Esa-Pekka Salonen collabore avec le metteur en scène américain Peter Sellars pour des opéras de Messiaen, Hindemith, Debussy, Stravinski et Wagner.
  • SCÉNOGRAPHIE LYRIQUE

    • Écrit par Alain PERROUX, Alain SATGÉ
    • 7 185 mots
    • 5 médias
    Dès les années 1990, on cite volontiers la trilogie Mozart-Da Ponte mise en scène par Peter Sellars comme nouveau modèle de transposition contemporaine. À travers ses spectacles, l'artiste américain s'efforce de parler de son époque, en posant un regard critique sur son propre pays. Il transporte...

Voir aussi