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DUKAS PAUL (1865-1935)

Paul Dukas relève de cette rare catégorie de compositeurs qui « ne se résignèrent qu'au chef-d'œuvre » : bien qu'ayant vécu soixante-dix ans, il se limita à sept œuvres principales et à cinq partitions plus réduites, dont Prélude élégiaque sur le nom de Haydn (1909), pour le centenaire de la mort de ce maître, et La Plainte au loin du faune (1920), en mémoire de Debussy. Durant les deux dernières décennies de son existence, il détruisit toute une série d'ouvrages, dont certains étaient achevés : une deuxième symphonie, une sonate pour piano et un violon, un poème symphonique (Le Fils de la Parque), un drame lyrique (Le Nouveau Monde), deux ballets (Le Sang de Méduse et Variations chorégraphiques). Né à Paris, condisciple de Debussy au conservatoire de cette ville, il obtint le second prix de Rome, mais jamais le premier. Deux ouvertures de jeunesse (pour Le Roi Lear et pour Götz von Berlichingen) ne nous sont pas parvenues. Mais une troisième, d'après Polyeucte de Corneille, fonda d'emblée sa réputation (janv. 1892), bien qu'encore sous le signe du postromantisme wagnérien et franckiste. Cinq ans plus tard (janv. 1897), la Symphonie en ut était assez froidement accueillie. En revanche, en mai suivant, le scherzo L'Apprenti sorcier, un des plus brillants et des plus réussis de tous les poèmes symphoniques, remporta un triomphe qui ne s'est pas démenti depuis. À ces trois partitions d'orchestre succédèrent deux monuments pour piano dédiés au grand interprète beethovenien Édouard Risler, qui en assura la création : la Sonate en mi bémol mineur (1901) et les Variations sur un thème de Rameau (1903). La sonate, dont le troisième mouvement contient une fugue, est un net hommage à l'auteur de la Hammerklavier ; les variations à celui des Diabelli (d'autant qu'en apparence le thème de Rameau est des plus insignifiants).

Les quatre années suivantes furent consacrées à Ariane et Barbe-Bleue (d'après Maeterlinck), créé à l'Opéra-Comique en mai 1907.

Ariane, sixième femme de Barbe-Bleue, rend la liberté aux cinq premières (dont Mélisande), que l'on croyait mortes ; quand Barbe-Bleue, terrassé par ses paysans, est livré à la merci de ses femmes, les cinq premières préfèrent demeurer captives auprès de lui, et Ariane, libératrice inutile, s'éloigne seule ; la partition de Dukas, merveilleuse de richesses orchestrales et de trouvailles rythmiques, permet de comprendre ce qui unit Debussy et Dukas dans un même sens profond du mystère tel que Maeterlinck l'exprime à travers ses drames, et ce qui les différencie musicalement comme créateurs (Debussy plus « français » par sa fluidité, sa subtilité et ses voix proches du « parlé », Dukas plus proche du romantisme wagnérien et franckiste par sa vigueur et ses développements thématiques).

Quant au balletLa Péri, dernière partition importante de Dukas, il fut donné pour la première fois (après avoir été promis à la destruction et sauvé in extremis) non pas par Serge de Diaghilev, comme prévu, mais par N. Trouhanova au théâtre du Châtelet (avr. 1912) : avant le ballet proprement dit, une éblouissante fanfare de cuivres, « chef-d'œuvre précédant le chef-d'œuvre ».

Titulaire d'une classe d'orchestre au Conservatoire de Paris de 1910 à 1913, inspecteur de l'enseignement musical pour les conservatoires de province à partir de 1924, successeur de Charles-Marie Widor comme professeur de composition au Conservatoire de Paris en 1928, élu à l'Institut au fauteuil d'Alfred Bruneau en 1934, Dukas exerça aussi d'importantes activités de critique et publia des écrits sur la musique jusqu'à sa mort, survenue à Paris. Très grand orchestrateur et architecte, il compta parmi ses élèves Olivier Messiaen.

— Marc VIGNAL

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Marc VIGNAL. DUKAS PAUL (1865-1935) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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