NÉMATHELMINTHES
Les Némathelminthes, ou vers ronds, dont les plus grandes formes étaient connues bien avant l'ère chrétienne, n'ont suscité que tardivement la création d'une branche distincte en zoologie. L'étude de ces animaux est restée pour une large part statique en se cantonnant longtemps dans l'analyse de la morphologie et de l'anatomie leur attribuant une place dans la classification. Physiologie et biologie moléculaire vont désormais éclaircir l'extraordinaire diversité des biologies des Némathelminthes, de leurs affinités écologiques et taxinomiques. Ainsi, le stade des descriptions statiques est aujourd'hui supplanté par la recherche des étapes de transformation progressive des organes dans la série animale, grâce à l'embryologie et l'anatomie comparées, thèmes surtout intéressants lorsque la paléontologie n'est d'aucun recours.
En effet, la recherche des types ancestraux, qui constituent les séquences évolutives des Némathelminthes, ne peut faire appel aux formes fossiles, car les conditions permettant la conservation de ces animaux n'ont été réalisées que très exceptionnellement. Mis à part les Nématodes parasites de l'homme ou des mammifères du Pléistocène qui ne doivent pas être tenus pour des formes fossiles, on ne connaît que quelques rares espèces de l'Oligocène inférieur (Mermithides parasites d'insectes dans l'ambre de la Baltique).
Le phylum des Némathelminthes, considéré à l'origine comme étant composé avant tout de parasites étudiés par les médecins et par les vétérinaires, s'est révélé depuis plusieurs décennies être beaucoup plus universel dans ses formes. L'ensemble des travaux a montré qu'une prodigieuse variété d'espèces libres marines, saumâtres et terrestres peuplent des milieux très divers et parfois inattendus, avec des densités que leurs faibles tailles laissent insoupçonnées. Les évaluations les plus récentes du nombre d'espèces de Nématodes, dont un dixième à peine seraient décrites, placent ce groupe au deuxième rang dans le règne animal après les Insectes.
Le phylum des Némathelminthes
Historique
La naissance du phylum des Némathelminthes fut assez laborieuse. Aristote fut, à notre connaissance, le premier à remarquer l'existence de vers plats et de vers ronds que C. Linné plaçait par la suite dans l'ordre des Intestina et Infusoria de la classe des Vermes et Intestinaux. G. Cuvier les groupait dans les Entozoa et Infusoires, des Radiata et Zoophyta, et fit le premier pas dans la bonne direction en divisant les Intestinaux en vers ronds creux (Intestinaux cavitaires) et vers plats solides (Intestinaux parenchymateux) sans avoir cependant d'idée bien précise quant aux limites de ces groupes. C. A. Rudolphi (1808) distingua clairement les types de vers parasites des Entozoa qu'il reconnut, avec une remarquable perspicacité, être un assemblage artificiel. Il créa et délimita convenablement les groupes Nematoidea, Acanthocephala, Trematoda et Cestoidea.
Pour obtenir un groupement plus naturel des vers parasites, il fallut cependant attendre 1851, année où K. Vogt unifia les Vers plats et les Némertes sous le nom de Platyelmia, les Grégarines, Acanthocéphales, Nématodes et Gordiens sous celui de Nemathelmia. C. Gegenbaur en 1859 transforma ce dernier groupe en Nemathelminthia en le débarrassant, avec raison, des Grégarines et des Acanthocéphales. A. F. Schneider (1864), sur la base de ressemblances du système musculaire, rapprocha les Chétognathes des Némathelminthes, et y inclut également la plupart des Annélides. E. H. Haeckel (1868) limita les Némathelminthes aux Chaetognatha, Nematoda et Acanthocephala. Cet arrangement, encore présent dans des textes récents, ne comporte aucune justification de la réunion des Chétognathes et Acanthocéphales avec les Nématodes. En 1875, T. H. Huxley comprit que les Chaetognathes, possesseurs d'un cœlome, sont à rapprocher des Échinodermes. K. T. E. Siebold, en 1843, reconnut le premier les différences entre les Gordiens et les Nématodes et créa pour les premiers l'ordre des Gordiacea (en y maintenant à tort les Mermis). Enfin F. Vejdovsky (1866) délimita correctement Gordiens et Nématodes et proposa le nom de Nematomorpha pour les premiers. Nématomorphes et Nématodes sont usuellement placés dans le phylum des Nemathelminthia.
Les Rotifères, Gastérotriches, Priapuliens et Échinodères (ou Kinorhynches) ont été rapprochés peu à peu et finalement inclus dans le phylum.
Les affinités réciproques de ces groupes taxinomiques ont toujours troublé les zoologistes. Ainsi, les Gastérotriches semblent plus étroitement liés aux Nématodes qu'aux Rotifères. L'élévation de chacun de ces groupes au rang de phyla séparés serait une solution ; cependant, leur association en tant que classes d'un même phylum est la position d'attente qui sera adoptée ici. Signalons la synonymie du nom d'Aschelminthia, proposé par K. Grobben en 1910, avec celui de Nemathelminthia de Gegenbaur.
Il est toutefois généralement reconnu que les relations entre ces six groupes sont plus lâches que celles qui existent entre les classes de la plupart des autres phyla.
Caractères
Les Némathelminthes, eumétazoaires triploblastiques, possèdent un ectoderme, un endoderme et un mésoderme intercalaire. Lors de l'embryogenèse, la première caverne qui apparaît dans la blastula, le blastocœle, persiste sous forme d'une cavité plus ou moins spacieuse entre le tube digestif et la paroi du corps : le pseudocœlome. Cette caractéristique en fait des pseudocœlomates qui trouvent leur place dans l'arbre généalogique de L. Cuénot (1940), entre les triploblastiques acœlomates (Plathelminthes) et les cœlomates purs (Annélides). Chez ces derniers, la cavité creusée dans l'endomésoderme est un véritable cœlome.
Le corps, vermiforme, cylindrique, sphérique ou aplati et sans tête bien définie, conserve une symétrie bilatérale. La taille est généralement minuscule ; certains peuvent cependant atteindre des longueurs considérables. Ils sont revêtus d'une cuticule résistante, portant des ornementations variées ; bien qu'elle soit assez souvent annelée, leur segmentation n'est que superficielle. La cuticule des Nématodes et Échinodères subit une série de mues en nombre déterminé au cours de la croissance larvaire ; chez les Priapuliens, les mues sont multiples tout au long de leur vie. Sous la cuticule, un épiderme syncytial ou cellulaire est souligné par des fibres musculaires qui ne sont arrangées en couches circulaires et longitudinales régulières que chez les Priapuliens. Le système nerveux est constitué par une masse cérébrale antérieure ou un anneau nerveux œsophagien, et forme des filets dont les principaux sont ventraux et latéraux. La nature de la cavité mésodermique des Priapuliens est inconnue. Le tube digestif, généralement droit, épithélial, parfois recouvert d'un filet de fibres musculaires, est exempt de musculature propre, sauf chez les Priapuliens. Ses deux extrémités sont de nature stomodéale et proctodéale. Le pharynx peut être hautement différencié. Les systèmes respiratoire et circulatoire manquent. L'appareil excréteur n'existe pas chez les Gordiens et se compose dans les autres classes (sauf chez les Nématodes) de protonéphridies typiques. Les canaux excréteurs et les gonoductes peuvent déboucher dans la région terminale du tube digestif en un cloaque. Les sexes sont généralement séparés (gonochorie) et l'appareil génital est relativement simple. La constance du nombre de cellules ou de noyaux (eutélie), fixée dès l'embryon, caractérise ce phylum.
Animaux avant tout aquatiques, les Némathelminthes peuplent les eaux marines saumâtres et douces ; cependant, Nématodes et Rotifères peuvent avoir des habitats terrestres. Les formes parasites sont multiples, chez les Nématodes en particulier, et rares sont les ordres du monde animal qui en soient exempts : on en trouve depuis les échinodermes jusqu'à l'homme. Les cycles biologiques sont parfois très complexes.
Le phylum des Nemathelminthia comprend six classes : Rotifera ; Gastrotricha ; Kinorhyncha ou Echinodera ; Priapulida ; Nematoda ; Nematomorpha.
Accédez à l'intégralité de nos articles
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Alain KERMARREC : docteur-ingénieur, chef de service de recherches à l'I.N.R.A., administrateur du Centre de recherches agronomiques des Antilles et de la Guyane.
Classification
Médias
Autres références
-
STRONGYLOÏDOSE ou ANGUILLULOSE
- Écrit par Yves GOLVAN
- 658 mots
Parasitose humaine due à la présence dans l'intestin d'un petit ver rond nématode, Strongyloides stercoralis, ou anguillule. Le cycle biologique de ce parasite est très voisin de celui de l'ankylostome. Il est répandu dans les régions tropicales d'Amérique (Antilles notamment), d'Asie...
-
TRICHINOSE
- Écrit par Yves GOLVAN
- 616 mots
Affection résultant de l'infestation par le petit ver rond Trichinella spiralis. L'homme contracte habituellement la trichinose en consommant de la viande (de porc ou de cheval) insuffisamment cuite et contenant des larves encapsulées du parasite.
Dans l'estomac et l'intestin grêle,...
-
VERS, invertébrés
- Écrit par Andrée TÉTRY
- 2 792 mots
- 7 médias
Unedes caractéristiques du phylum des Némathelminthes concerne la constance numérique des cellules ou des noyaux ; leur nombre fixé dès la vie embryonnaire ne s'accroît plus ultérieurement. Les Némathelminthes comptent des organismes aquatiques (mer et eau douce) et terrestres (Nématodes principalement)....
Voir aussi
- ŒUF
- CŒLOME
- PHASMIDIA
- GEGENBAUR KARL (1826-1903)
- NÉMATODES
- FILAIRES
- NÉMATOMORPHES
- GORDIENS
- CUTICULE
- APHASMIDIA
- CŒLOMATES
- ÉCHINODÈRES
- DRACUNCULIDES
- PRIAPULIENS
- OXYURE
- STRONGLE
- SPIRURIDES
- PSEUDOCŒLOMATES
- ANIMAL RÈGNE
- ANATOMIE ANIMALE
- MERMITHIDES
- RHABDITIDES
- STRONGYLIDES
- TYLENCHIDES
- DIÉRIDES
- SPICULE, zoologie