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MÉTACOGNITION

Les sentiments métacognitifs

Les sentiments qui dictent ces décisions – appelés « métacognitifs » ou « noétiques » (du grec νoεῖν, connaître) – prédisent ou évaluent l'incertitude liée à la tâche cognitive en cours. Certains sont prédictifs, comme le « sentiment de facilité » ou d'effort lié à la tâche à exécuter, le « sentiment de savoir » (c'est-à-dire de pouvoir retrouver un élément mémorisé antérieurement dans un temps relativement court) ou encore l’impression d'avoir un mot « au bout de la langue ». D'autres sont évaluatifs, comme le sentiment d'avoir correctement retrouvé un mot, répondu à une question, ou résolu un problème. Certains sentiments sont à la fois prédictifs et évaluatifs, comme le sentiment de familiarité, qui mêle l'impression de connaître et la difficulté à identifier une personne, par exemple.

Comme ces quelques exemples le suggèrent, les fonctions prédictive et évaluative des sentiments noétiques vont de pair avec la fonction motivationnelle. Les sentiments varient dans leur valence – c'est-à-dire dans leur caractère hédonique, plaisant ou déplaisant – selon le degré d'incertitude prédictive ou évaluative qu'ils expriment. Le degré de la valence ressentie tend à guider la décision, sauf si le sujet a des raisons conscientes d'y résister. Un sentiment élevé de certitude de pouvoir discriminer, se rappeler, résoudre un problème motive le sujet à accomplir la tâche correspondante. Réciproquement, un sentiment élevé d'incertitude conduit l'agent à renoncer à exécuter la tâche considérée. De la même façon, si l'évaluation finale d'un calcul produit un sentiment de probable incorrection, le sujet tend à le refaire ou à changer de tâche.

Nous l'avons signalé, le sujet peut avoir des raisons conscientes – bonnes ou mauvaises – de ne pas tenir compte du sentiment noétique produit par son activité cognitive présente. Il peut, par exemple, avoir été prévenu par un tiers que, dans cette situation précise, le sentiment noétique ressenti est illusoire, parce qu'il est engendré par des indices sans rapport avec la tâche. Ou encore, on peut l'avertir que son sentiment de facilité est lié à une musique d'ambiance, ou que son sentiment de difficulté est dû à un manque infondé de confiance en soi. Le sujet peut alors décider d’effectuer la tâche malgré l'impression prédictive défavorable, ou ne pas la faire en dépit de l'impression prédictive favorable. La métacognition « conceptuelle » est donc capable, pour le meilleur et parfois pour le pire, de neutraliser l'influence des sentiments métacognitifs en fournissant des règles de décision alternatives. Cependant, il est démontré que le contrôle conceptuel des sentiments métacognitifs est de courte durée, et utilise des ressources cognitives importantes, ce qui le rend inopérant en cas d'attention divisée.

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Classification

Pour citer cet article

Joëlle PROUST. MÉTACOGNITION [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • APPRENTISSAGE, psychologie

    • Écrit par Daniel GAONAC'H, Jean-François LE NY
    • 5 939 mots
    • 2 médias
    – la possibilité de mettre en œuvre des stratégies d’apprentissage spécifiques en fonction des caractéristiques de la situation (on rejoint ainsi le champ très prometteur de la métacognition).
  • APPRENTISSAGE DE LA PRODUCTION ÉCRITE DE TEXTES

    • Écrit par Denis ALAMARGOT, Lucile CHANQUOY
    • 1 916 mots
    ...planification). C’est le début de l’accès à l’expertise, toutefois toujours contrainte par les ressources limitées de la mémoire de travail et l’étendue des connaissances métacognitives sur l’activité. Ultérieurement, la mise en place de stratégies de plus en plus expertes permet d’aboutir à des textes dont...
  • DÉVELOPPEMENT MÉTALINGUISTIQUE, psychologie

    • Écrit par Jean Émile GOMBERT
    • 1 036 mots

    Pour les psycholinguistes cognitivistes, les activités métalinguistiques constituent un sous-domaine de la métacognition qui concerne le langage et son utilisation. Ce sous-domaine comprend les activités de réflexion sur le langage ainsi que les activités de contrôle conscient et de planification...

  • MÉMOIRE CHEZ L'ENFANT

    • Écrit par Francis EUSTACHE
    • 2 454 mots
    ...à apprendre permet d’ajuster ses stratégies de mémorisation et juger plus précisément nos performances de rappel. Ce point souligne l’importance de la métacognition, c’est-à-dire la connaissance dont nous disposons sur nos propres processus cognitifs. Enfin, la consolidation des connaissances et des...
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Voir aussi