Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

MÉSOPOTAMIE La religion

Organisation et statut du clergé

L'ultime explication du monde, selon les anciens Mésopotamiens, résidait dans l'existence d'une pluralité de puissances divines. Or, s'il s'était trouvé, parmi cette multitude, une poignée de dieux pour créer le cosmos, encore fallait-il le faire durer. Telle fut la tâche dont fut investie l'humanité et dont elle s'acquitta, principalement, par ses actes de dévotion, les dieux mésopotamiens étant de nature à se laisser traiter par des manipulations diverses. Ces actes, pour être efficaces, nécessitaient un personnel stable. De fait, cherchant à préciser les termes de leur propre identité par opposition à l'autre, les Mésopotamiens caractérisaient les êtres étrangers à la culture à l'aide de critères négatifs : par l'absence d'institution monarchique et d'agents spécialisés pour honorer les dieux, définissant du même coup, par antithèse, la société humaine comme soumise aux ordres d'un roi et pourvue d'un personnel qualifié pour célébrer les dieux.

Pouvoirs religieux du roi

Chef de la communauté humaine, parent ou ami des dieux, élevé par eux, transi de la parole du démiurge, le roi était l'intermédiaire indispensable entre les hommes et les dieux et avait vocation pour gouverner le monde et en assurer la pérennité. La nature du rapport qui l'unissait aux dieux était, au demeurant, variable. En pays de Sumer, il agissait en faveur et au nom d'un dieu, véritable souverain dont il était, en quelque sorte, le gouverneur. En pays d'Akkad, il en allait très différemment. Là, le dieu était censé intervenir dans un premier temps au moyen d'un don qu'il présentait au roi, préalablement à toute action de celui-ci ; il revenait ensuite au monarque d'agir à son tour et de prouver qu'il était digne du don qui lui était fait. En d'autres termes, l'action se situait au point de rencontre de deux modes opératoires, celui qui plaçait le divin entre le roi et son acte, et celui qui attribuait au roi lui-même la réalisation de cet acte.

Le roi se consacrait principalement à l'accomplissement d'un certain nombre de rituels qui lui étaient réservés. Il participait à l'hiérogamie, il prenait l'initiative de fonder les temples, il chassait le grand fauve et conduisait la guerre, car, en se proclamant vainqueur des lions et des rois, il affirmait étendre sa souveraineté sur la terre entière et promouvoir partout l'ordre cosmique instauré par le démiurge. Dans l'Assyrie du Ier millénaire, la guerre était conçue comme une activité hautement religieuse, le roi y mettant à mort ses ennemis comme on faisait d'un agneau sacrificiel, en les égorgeant.

Le clergé

Quant aux autres spécialistes du divin, on est accoutumé à les désigner sous l'appellation collective de « clergé ». Le terme a le mérite de la commodité, quoique ayant toute l'apparence d'un néologisme, puisqu'il n'est aucun vocable, dans l'Antiquité, qui lui corresponde. Ce clergé exerçait sa compétence à l'intérieur des temples – lesquels étaient de grands complexes économiques –, possédant d'amples domaines fonciers et se livrant à toutes sortes d'activités artisanales et bancaires. Les dieux y demeuraient qui en étaient les maîtres. Somme toute, maison, palais ou temple se distinguaient premièrement par la qualité de leur hôte, simple mortel ou monarque, personnage réel ou imaginaire. Il apparaît dès lors comme une évidence que l'on ne peut entendre par « clergé » les seuls agents du culte, mais que le terme englobe nécessairement les agents administratifs et les domestiques, bref tout le personnel d'un temple.

Parmi les fonctions cultuelles et administratives, on distingue celles dont l'exercice était solitaire, et qui étaient détenues[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : directeur d'études (assyriologie) à l'École pratique des hautes études (IVe section), Sorbonne
  • : assyriologue, Directeur de recherche au C.N.R.S., professeur à l'École pratique des hautes études en sciences sociales

Classification

Pour citer cet article

Jean BOTTERO et Jean-Jacques GLASSNER. MÉSOPOTAMIE - La religion [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AKKAD

    • Écrit par Gilbert LAFFORGUE
    • 2 890 mots
    • 3 médias

    Akkad (du sémitique Akkadû, forme à laquelle le scribe préférait Agadé) désigne à la fois une « ville de royauté » du IIIe millénaire avant J.-C. et la partie nord de la Babylonie. Du nom de la cité dérive le terme akkadien, qui sert à qualifier la dynastie royale d'Akkad, la population...

  • ALEXANDRE LE GRAND (356-323 av. J.-C.)

    • Écrit par Paul GOUKOWSKY
    • 6 470 mots
    • 5 médias
    ...était nombreuse et de valeur, manquaient désormais les mercenaires grecs, décimés au cours des précédentes batailles ou perdus dans de vaines aventures. Les deux armées se rencontrèrent en Haute-Mésopotamie, près du village de Gaugamèles, non loin de la ville assyrienne d'Arbèles (Erbil). C'était une vaste...
  • AMORRITES ou AMORRHÉENS

    • Écrit par Gilbert LAFFORGUE
    • 728 mots

    Amorrites, ou Amorrhéen, est un nom de peuple que les orientalistes ont tiré du mot akkadien Amourrou, par lequel les Mésopotamiens désignaient la région située à l'ouest de leur pays et aussi ses habitants.

    Comme les Amorrites n'ont pas écrit leur langue, nous ne les connaissons que par...

  • ANTHROPOLOGIE ANARCHISTE

    • Écrit par Jean-Paul DEMOULE
    • 4 849 mots
    • 3 médias
    ...processus d’apparition de l’agriculture sédentaire à partir du IXe millénaire avant notre ère, du moins dans l’exemple qu’il a choisi, celui de la Mésopotamie. Lui-même éleveur en sus de ses fonctions universitaires, il décrit le processus de formation d’une nouvelle socialisation, la domus...
  • Afficher les 73 références

Voir aussi