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DÉFENSE MÉCANISMES DE

Anna Freud - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

Anna Freud

Expression usitée en psychanalyse pour désigner plusieurs types d'opérations psychiques destinées à « protéger » le moi. La notion de défense est présente chez Freud dès le début de ses recherches ; ainsi, dans ses Études sur l'hystérie (1895) : « Une condition indispensable à l'apparition de l'hystérie est qu'il y ait incompatibilité entre le moi et la représentation qui le confronte. J'espère pouvoir montrer ailleurs comment des troubles névrotiques découlent des modes divers adoptés par le moi pour se débarrasser de cette incompatibilité. La défense hystérique pour laquelle une certaine aptitude est nécessaire consiste alors en une conversion de l'émoi en innervation somatique. » En 1915, par « mécanisme de défense » Freud désigne l'ensemble du processus de défense qui caractérise une névrose particulière ; il se sert aussi de l'expression pour caractériser l'utilisation défensive de certains processus psychiques tels que le refoulement, le retournement sur soi, le renversement dans le contraire. Anna Freud, dans son ouvrage Le Moi et les mécanismes de défense (1946), énumère quelques-uns des principaux procédés défensifs : le refoulement, la régression, la formation réactionnelle, l'isolation, l'annulation rétroactive, la projection, le retournement contre soi, la transformation dans le contraire, la sublimation (cette dernière appartenant, selon l'auteur, plutôt au domaine du normal qu'à celui de la névrose). On pourrait ajouter encore à cette liste la négation par le fantasme, l'idéalisation, l'identification à l'agresseur, l'identification projective, le clivage de l'objet, le contrôle omnipotent de l'objet, le déni de la réalité psychique, la dénégation, etc.

Dans sa Théorie psychanalytique des névroses, Otto Fenichel estime qu'« en dernière analyse toute défense est une défense contre les affects », en raison des sentiments d'angoisse ou de culpabilité, et, en fin de compte, comme moyen d'éviter le déplaisir que causerait la panique traumatique ou la perte de l'estime de soi-même. Il y aurait donc soit un blocage (un refoulement) des affects, soit un déplacement de ceux-ci.

Quelques remarques s'imposent. Tout d'abord, le moi reste dans l'ignorance de ses propres mécanismes de défense. Sa fonction de méconnaissance en ce point est parfaitement établie. On peut se demander pourquoi Anna Freud finit par faire du moi le gardien de la réalité, allant par là à l'encontre de la thèse précédente dont elle admet le bien-fondé. Selon M. Safouan, « la défense n'est pas une défense contre, mais une défense de ce désir, qu'on ne saurait d'ailleurs qualifier de sexuel sauf par inadvertance, et qui ne dure qu'en tant qu'ignoré, c'est-à-dire refoulé, dût cette préservation mettre le sujet aux prises avec un réel devenu source de déplaisir » (« Le Fantasme dans la doctrine psychanalytique et la question de la fin de la psychanalyse », in Études sur l'œdipe, 1974) ; on ne peut, en effet, assimiler le désir inconscient à un manque réel. En outre, l'ensemble des mécanismes de défense tendrait à aider le sujet à se protéger contre l'angoisse qui surgirait s'il s'arrêtait de vouloir retrouver l'impossible objet perdu, non identifiable, non « spécularisable » (l'objet a de Lacan, impossible à narcissiser). C'est parce que le sujet désire, par tous les moyens possibles, investir narcissiquement cet objet — qui se définit pourtant par son irréductibilité au narcissisme — qu'il utilise et « invente » tous les mécanismes de défense qui passent à sa portée. La fonction du moi est précisément de les méconnaître. S'il les connaissait, il saurait, par le fait même, ce « contre » quoi il se défend.[...]

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Écrit par

  • : psychanalyste, membre de la Société de psychanalyse freudienne, musicologue, président de l'Association française de défense de l'orgue ancien

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Pour citer cet article

Pierre-Paul LACAS. DÉFENSE MÉCANISMES DE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Anna Freud - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

Anna Freud

Autres références

  • DÉFENSE, psychanalyse

    • Écrit par Odile BOMBARDE
    • 1 296 mots

    Le terme « défense » apparaît dès l'Esquisse pour une psychologie scientifique de Sigmund Freud (1895). Il comporte une dimension stratégique, implique l'idée de réaction à une agression et témoigne du lien constant établi entre clinique et théorie. Dans la compréhension de l'hystérie...

  • ANNULATION RÉTROACTIVE

    • Écrit par Anne-Marie LERICHE
    • 187 mots

    Mécanisme de défense typiquement obsessionnel, l'annulation rétroactive consiste à effacer, comme en soufflant dessus, un événement, un acte qui a eu lieu. Cette défense correspond à la régression bien connue du moi obsessionnel au stade narcissique de la libido caractérisé par l'animisme et la magie....

  • ASSOCIATION LIBRE, psychanalyse

    • Écrit par Pierre-Paul LACAS
    • 468 mots

    Expression utilisée en psychanalyse pour désigner l'objet de la règle fondamentale, laquelle consiste pour le patient à exprimer toutes les pensées (idées ; images ; Einfall, dit Freud, « ce qui tombe » dans l'esprit) sans discrimination aucune et de manière spontanée. L'école de Zurich...

  • DÉNÉGATION

    • Écrit par Anne-Marie LERICHE
    • 410 mots

    Concept créé par Freud pour désigner, au cours d'une cure analytique, un processus défensif qui consiste à énoncer des désirs, des pensées, des sentiments tout en ne les reconnaissant pas. Par exemple, un sujet qui dit : « il n'y a pas de rapport entre le désir de tuer mon père et...

  • DÉNI, psychanalyse

    • Écrit par Pierre-Paul LACAS
    • 819 mots

    Terme utilisé en psychanalyse et qui se distingue notamment de celui de négation et de dénégation (Verneinung). Le déni (Verleugnung), ce qu'on peut traduire aussi par « désaveu » ou « répudiation » (cf. le disavowal anglais), est un mode de défense particulier, où le sujet...

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Voir aussi