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JINISME ou JAÏNISME

Le jinisme (ou jainisme) doit son nom au titre de Jina (le « vainqueur »), donné par ses adeptes à Vardhamāna (également appelé Mahāvīra, « grand héros »), réformateur, au vie siècle avant J.-C., de la doctrine et de la communauté de Pārśva. Selon la tradition (śvetāmbara en particulier), Vardhamāna est né dans le Bihār, vers le temps et non loin du lieu où naquit le Buddha. Princes élevés tous deux dans le faste d'une cour, ils suivent des destins souvent comparables ; les similitudes, cependant, résultent de coïncidences et d'affinités qui tiennent à l'influence de la civilisation ambiante et de l'ascétisme brahmanique sur les deux maîtres : par exemple, comme la plupart des Indiens, ils admettent tous deux la vertu des disciplines du yoga. D'ailleurs, il ne semble pas que le Buddha et le Jina se soient jamais rencontrés ; mais ce dernier passe pour avoir eu des contacts avec Makkhali Gośāla, chef de la communauté des Ājīvika (que mentionne aussi le canon bouddhique), et pour avoir été gagné par la rigueur de son ascèse. Mahāvīra n'en est pas moins une des personnalités les plus originales de l'Inde ancienne : ce fut, assurément, un penseur vigoureux, et, en outre, un remarquable organisateur. À sa mort, la communauté modelée par lui et orientée vers une compassion active atteignait une extension telle qu'elle joua rapidement un rôle important.

Au cours des âges, elle a manifesté sa vitalité. Peu nombreuse actuellement, elle est néanmoins respectée : elle dispose en Inde d'une puissance économique enviable, jouit d'un prestige qui tient aussi à son rayonnement intellectuel et moral. À la différence du bouddhisme, religion missionnaire, le jinisme n'a guère cherché à s'étendre hors des frontières. Et, s'il comptait en 1981 seulement trois millions deux cent mille fidèles, c'est que les exigences de sa perfection ne lui ont jamais permis d'atteindre qu'un nombre restreint d'adeptes.

Les premières étapes

Les origines

Avec la naissance de Vardhamāna (vie siècle av. J.-C.) se réalise, selon la tradition, l'incarnation du vingt-quatrième et dernier Tīrthaṃkara ou prophète « frayeur de voie ». Car le jinisme semble avoir pris sa source dans un passé lointain, mais si légendaire qu'il ne saurait remonter historiquement au-delà du vingt-deuxième Tīrthaṃkara, Neminātha, appelé aussi Ariṣṭanemi, peut-être apparenté à Kṛṣṇa. Au Gujarāt, la montagne de Girnār, où Neminātha mourut après y avoir accompli toute sa mission prophétique, conserve encore son souvenir.

Cependant, le véritable précurseur de Vardhamāna, son aîné de deux cent cinquante ans, est le vingt-troisième Tīrthaṃkara, Pārśva (associé au serpent, il a pour emblème un chaperon de cobra), fils du roi de Bénarès, Aśvasena. À l'âge de trente ans, quittant sa ville natale, il se prépara par la méditation et par l'ascèse à la connaissance suprême et proclama la Loi. De nombreux disciples l'entourèrent alors : hommes et femmes, religieux et laïcs, car il était devenu l'« agréé des hommes », s'insinuant dans leurs cœurs, les inspirant. Après soixante-dix ans de dure ascèse, il gravit, dans le Magadha méridional, le mont Samet-Sikhar ; et, à la suite d'un jeûne rigoureux d'un mois, il s'y éteignit. C'est à sa descendance spirituelle, selon les textes jaina, qu'appartiennent les parents de Vardhamāna. Par son père, Siddhārtha, chef de clan, et par sa mère, Triśalā, membre de la famille régnante des Licchavi, il se rattache à la noblesse : il est donc par sa naissance de la caste des Kṣatriya. Et la tradition śvetāmbara, pour l'affirmer, sans toutefois contredire les sources selon lesquelles il s'incarne dans le sein de la brahmine Devānandā, fait intervenir le transfert de l'embryon, sur l'ordre des dieux, du sein de[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle
  • : membre de l'École française d'Extrême-Orient, diplômée de l'École pratique des hautes études

Classification

Pour citer cet article

Colette CAILLAT et Marie-Simone RENOU. JINISME ou JAÏNISME [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AHIṂSĀ

    • Écrit par Anne-Marie ESNOUL
    • 465 mots

    Le mot sanskrit ahiṃsā, qui désigne, dans les religions de l'Inde, la non-violence (ou la non-nuisance) et même l'absence de toute intention de nuire, est composé du préfixe privatif a et de HIṂS, forme désidérative abrégée de la racine HAN (« frapper », « blesser », « tuer »)....

  • ASCÈSE & ASCÉTISME

    • Écrit par Michel HULIN
    • 4 668 mots
    • 1 média
    ...Parallèlement à ce riche déploiement des techniques de maîtrise du corps et de l'esprit dans l'hindouisme, les deux grands mouvements « hérétiques » que sont le jaïnisme et le bouddhisme ont développé leur propre conception de l'ascèse. L'un et l'autre se fondent sur la distinction des moines, qui prononcent des...
  • BHUBANEÇWAR

    • Écrit par Odette VIENNOT
    • 1 934 mots
    • 1 média
    Si le jaïnisme fut au Kaliṅga, dans les premiers siècles qui précédèrent et qui suivirent notre ère, la religion d'État, le bouddhisme, dont on ne retrouve plus de témoignage à Bhubaneçwar même, est cependant abondamment représenté un peu au nord. À Lalitagiri, Ratnagiri et Udayagiri, qui composaient...
  • DĪVĀLĪ ou FÊTE DES LUMIÈRES

    • Écrit par Universalis
    • 462 mots
    • 1 média

    La fête des lumières, Dīvalī (du sanskrit dīpavali, « rangée de lumières »), est l’une des plus importantes dans la religion hindoue. Les jaïna et les sikhs l’ont aussi reprise à leur propre compte. La fête dure cinq jours, du treizième jour de la quinzaine sombre du mois d’āśvina...

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Voir aussi