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JÉSUITES ou COMPAGNIE DE JÉSUS

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Une histoire mouvementée

Les historiens de la Compagnie divisent généralement son histoire en trois périodes : la première va de 1540 à la suppression par Clément XIV en 1773 ; la seconde couvre les années de survie clandestine, de 1773 à 1814, date à laquelle Pie VII a rétabli l'ordre ; la dernière période s'étend de 1814 à nos jours.

De l'âge d'or à la suppression de la Compagnie

L'âge d'or

À l'intérieur de la première période, un « siècle d'or » s'est écoulé de 1540 à 1640, année de la publication, un peu ostentatoire, par les jésuites des Pays-Bas espagnols de l'Imago primi saeculi. À la mort d'Ignace de Loyola en 1556, la Compagnie comprenait 1 000 membres et administrait quelque 150 fondations (résidences, noviciats, maisons professes et collèges). Cent ans plus tard, on comptait plus de 15 000 jésuites et 550 fondations. Certes les missionnaires de l'ordre avaient déjà connu échecs et martyres au Japon, en Éthiopie et au Canada. Mais ils détenaient une position importante en Chine et mettaient sur pied les « réductions » du Paraguay. Les jésuites étaient devenus les confesseurs habituels des souverains catholiques. Leurs collèges, dont l'organisation et l'enseignement étaient les mêmes dans le monde entier, groupaient quelque 150 000 élèves. En 1773, les jésuites étaient 23 000, répartis entre 39 provinces ; leurs fondations étaient au nombre de 1 600, avec 800 collèges où professaient 15 000 enseignants.

Depuis 1773, la Compagnie a connu, en divers coins du monde, une trentaine de suppressions et d'expulsions. Néanmoins, elle compte 23 244 membres en 1993 et constitue numériquement le deuxième ordre catholique, après l'ensemble des familles de franciscains. Elle est le plus important des ordres missionnaires. Congrégation enseignante, les jésuites comptent près de 8 000 pères qui se consacrent à des tâches scolaires dans quelque 1 840 établissements.

La cohésion de la Compagnie, le secret dont elle s'entourait, son ultramontanisme militant, son indépendance vis-à-vis des hiérarchies ecclésiastiques locales, le succès de ses écoles, son influence auprès des souverains suscitèrent très tôt jalousie et animosité dans le clergé séculier, chez les autres ordres religieux, dans les milieux universitaires et chez tous ceux qui désiraient défendre contre les empiétements de Rome les prérogatives de l'État. À la fin du xvie siècle et dans la première moitié du xviie, les avocats Étienne Pasquier et Antoine Arnauld exprimèrent en France cette hostilité des milieux gallicans et universitaires. À Paris, la Sorbonne assista avec aigreur à l'essor du collège de Clermont et refusa toujours de conférer les grades académiques de philosophie et de théologie aux candidats issus de ce collège. Quant à l'accusation de fourberie, elle fut alimentée dès 1614 par un faux, les Monita secreta, dû à un ancien jésuite polonais. Le supérieur général y était censé donner les meilleures méthodes pour s'insinuer auprès des grands et capter les testaments des riches veuves. Réédité en France en 1761, ce pamphlet de médiocre qualité contribua à accroître l'aversion envers les jésuites.

Les débats sur la grâce

Au cours des xviie et xviiie siècles, trois grands débats opposèrent la Compagnie de Jésus à ses adversaires.

Le premier porta sur la grâce, donc sur la gravité du péché originel. Pour les nombreux augustiniens de l'âge classique – les jansénistes n'étant que les extrémistes de ce camp –, « ce n'est pas en vertu de nos mérites que la grâce de Dieu est donnée aux enfants et aux personnes en âge de raison... Elle n'est pas donnée à tous les hommes, et ceux à qui elle est donnée ne l'obtiennent pas d'après le mérite de leurs œuvres ni d'après celui de leur[...]

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Pour citer cet article

Jean DELUMEAU et Encyclopædia Universalis. JÉSUITES ou COMPAGNIE DE JÉSUS [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Média

Matteo Ricci - crédits : Godong/ Universal Images Group/ Getty Images

Matteo Ricci

Autres références

  • FONDATION DE LA COMPAGNIE DE JÉSUS

    • Écrit par
    • 210 mots
    • 1 média

    La Compagnie de Jésus s'inscrit dans le mouvement de fondation des sociétés de clercs réguliers qui associent l'apostolat de tous les jours à la régularité de la vie religieuse encadrée par des vœux mais sans les obligations de la vie conventuelle. Ignace de Loyola transcrit son...

  • AMÉRIQUE (Histoire) - Amérique portugaise

    • Écrit par
    • 4 217 mots
    • 6 médias
    ...Lisbonne. Ces Indiens étaient assez primitifs et ne se révélèrent guère aptes au travail sédentaire, auquel leur santé ne résistait pas. Le roi, aidé par les Jésuites, intervint pour protéger les esclaves contre les excès des colons. Ceux-ci s'efforcèrent d'empêcher l'application des mesures royales ou obtinrent...
  • RHÉTORIQUE, notion de

    • Écrit par
    • 1 664 mots
    ...n'est pas hégémonique, et connaît très tôt des critiques. La rhétorique se développe au cours de la Contre-Réforme catholique, et notamment chez les Jésuites, qui y voient un moyen de reconquérir l'âme des fidèles, et de permettre aux catholiques d'exercer un rôle dans la cité pour ramener le...
  • ARRUPE PEDRO (1907-1991)

    • Écrit par
    • 1 073 mots

    Le vingt-septième successeur d'Ignace de Loyola n'était pas seulement originaire du Pays basque comme le fondateur de la Compagnie de Jésus. Pedro Arrupe ressemblait à ce dernier de façon étonnante — le même profil, la calvitie, la maigreur ascétique et le regard de braise —, mais il avait surtout...

  • BARTOLI DANIELLO (1608-1685)

    • Écrit par
    • 331 mots

    Admis très jeune parmi les novices de la Compagnie de Jésus, Daniello Bartoli, après des études approfondies de rhétorique, puis de philosophie et de théologie, enseigne d'abord la rhétorique et devient bientôt un prédicateur apprécié. En 1646, il se voit conférer la lourde charge d'historien de la...

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