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EXCÈS DE POUVOIR

Dans les États modernes, une autorité administrative ne dispose pratiquement jamais d'un pouvoir originaire et illimité. Si elle ne respecte pas les limites qui lui ont été assignées par la Constitution ou par la loi, on dira, selon la terminologie française, qu'elle commet un excès de pouvoir ou, selon la terminologie anglo-saxonne, qu'elle agit ultra vires.

Si l'on en juge par le nombre des plaintes et des recours, force est de constater que, depuis quelques décennies, les cas d'excès de pouvoir se sont multipliés, au moins dans les pays les plus évolués. Cette augmentation s'explique par plusieurs raisons. D'abord, l'action administrative s'est considérablement développée : certaines tâches traditionnelles, comme la police ou l'enseignement, sont devenues beaucoup plus lourdes, et des tâches nouvelles, comme l'aide sociale ou l'urbanisme, ont fait leur apparition. Ensuite, les garanties accordées aux administrés se sont considérablement renforcées. Enfin, grâce aux progrès de l'instruction générale, et sous l'influence de divers mouvements revendicatifs, les administrés sont de plus en plus résolus à défendre leurs droits, au besoin par la voie d'une action en justice.

Paradoxalement, donc, alors que l'administration doit faire de plus en plus de choses, ses prérogatives sont rognées de différentes manières, et la méfiance du public à son égard n'a jamais été aussi grande. Mais dans quelle mesure peut-on sanctionner l'excès de pouvoir sans courir le risque de paralyser complètement l'administration ?

La notion d'excès de pouvoir

Les compétences

L'incompétence est la forme la plus simple de l'excès de pouvoir. Elle suppose qu'une autorité administrative a pris une décision qui n'était pas de son ressort.

La compétence des autorités administratives est d'abord limitée, de façon générale, par l'existence d'un domaine réservé soit au législateur, soit au pouvoir constituant. En France, par exemple, l'article 34 de la Constitution de 1958 énumère un certain nombre de matières qui sont de la compétence exclusive du Parlement. Fait beaucoup plus curieux, cette même Constitution réserve également au pouvoir réglementaire, attribué au Premier ministre, un domaine qui lui est propre et où la loi ne peut pas, en principe, pénétrer. Ce domaine comprend la plupart des matières non énumérées à l'article 34.

Mais chaque autorité administrative doit aussi respecter les limites qui séparent son domaine de compétence de celui des autres autorités administratives. Ces limites sont établies soit en fonction d'un ressort territorial (ratione loci), soit en fonction d'un objet (ratione materiae).

Il arrive souvent qu'une autorité administrative (chef de gouvernement ou maire d'une grande ville, par exemple) se trouve dans l'impossibilité d'exercer personnellement l'ensemble de ses compétences. C'est pourquoi la plupart des systèmes juridiques admettent que celle-ci délègue temporairement une partie de ses attributions à une autorité de rang inférieur, par exemple le ministre à ses chefs de service ou le maire à ses adjoints.

Les compétences confèrent aussi des obligations. Il peut y avoir excès de pouvoir non seulement lorsqu'une autorité empiète sur les compétences d'une autre autorité, mais aussi lorsqu'elle s'abstient d'exercer les siennes. Par exemple, un maire ne peut pas refuser d'instruire une demande de permis de construire, alors que la loi le charge de statuer sur de telles demandes.

Les formes

Dans la plupart des systèmes juridiques évolués, les décisions individuelles défavorables (mesures à caractère disciplinaire, retrait d'un permis ou d'une autorisation, expulsion d'un étranger, etc.) ne peuvent être prises (sauf cas d'urgence)[...]

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