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GALOIS ÉVARISTE (1811-1832)

L'œuvre mathématique

En sa croissance ainsi aventureuse, la pensée de Galois s'est librement nourrie des travaux de Lagrange, Gauss, Cauchy, Abel et Jacobi. Dans un mémoire célèbre paru en 1770, Lagrange fait le point des recherches dans le domaine des équations algébriques. Il esquisse une théorie de la transformation des équations et met en évidence l'importance de la notion de permutation. Il retrouve par là les formules connues de résolution par radicaux des équations du deuxième au quatrième degré. Mais l'équation générale du cinquième degré lui résiste comme à ses prédécesseurs (c'est à Abel qu'il appartient, en 1824, de montrer qu'elle n'est pas résoluble par radicaux). En 1801, Gauss rédige une étude sur les équations binômes xn − a = 0 et les racines primitives de l'unité qui laisse pressentir l'utilisation par Galois de la théorie des groupes. Si on ajoute qu'en 1830 Cauchy vient de formuler la notion de groupe de permutations d'un ensemble fini, on conçoit où en étaient les problèmes étudiés par Galois au moment où il soumet son premier mémoire à l'Académie des sciences.

Groupe de Galois

Galois reprend le problème où l'avait laissé Niels Abel, dont les mémoires ne lui sont que tardivement connus. Il éclaircit sa notion de quantité rationnelle par rapport à d'autres quantités, parvenant à une notion très proche de celle de corps engendré par un ensemble fini de nombres algébriques. Il démontre – ce qu'Abel avait affirmé – que le corps engendré par les racines d'une équation algébrique est une extension simple du corps des coefficients (ne considérant, bien sûr, que des corps de caractéristique 0).

Son idée profondément originale est alors de mettre en évidence le groupe des automorphismes de ce corps. Étant donné :

l'équation irréductible proposée dont les racines toutes distinctes sont x1, x2, ..., xn et θ la quantité à partir de laquelle ces racines s'expriment rationnellement d'après le résultat précédent, on aura, pour chaque entier i ≤ n, xi = ϕi (θ). En remplaçant successivement θ par chacune des racines de l'équation irréductible dont θ est solution, les quantités ϕi (θ) s'échangent entre elles, et les permutations ainsi obtenues forment un sous-groupe du groupe des permutations des n racines x1, ..., xn. Galois le nomme groupe de l'équation proposée. Il a l'intuition géniale de faire correspondre, à chaque corps K intermédiaire entre le corps A des coefficients et le corps B engendré par les racines de l'équation, un sous-groupe du groupe de l'équation (sous-groupe formé des permutations qui laissent invariants les éléments de K exprimés rationnellement en x1, ..., xn) qui le caractérise entièrement. Il traduit ainsi les propriétés des corps intermédiaires en propriétés équivalentes des sous-groupes ; par exemple, la propriété d'être engendré par toutes les racines d'une équation auxiliaire (c'est-à-dire d'être une extension normale du corps des coefficients) est équivalente à celle d'être représenté par un sous-groupe distingué du groupe de l'équation. Grâce à cette correspondance, Galois – qui chemin faisant approfondit considérablement la théorie des groupes – arrive à une condition pour qu'une équation algébrique soit résoluble par radicaux : il faut et il suffit que son groupe C soit résoluble, autrement dit qu'il possède une suite de composition :
telle que tous les quotients Gi+1/Gi soient commutatifs. Galois obtient alors, en les généralisant, les résultats de ses prédécesseurs comme corollaires de sa théorie [cf. corps (mathématiques), chap. 3]. Ainsi, l'équation générale de degré n > 4 n'est pas résoluble par radicaux parce que le groupe[...]

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Pour citer cet article

Jean-Pierre AZRA et Robert BOURGNE. GALOIS ÉVARISTE (1811-1832) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Évariste Gallois - crédits : Archives de la ville de Bourg-la-Reine

Évariste Gallois

Autres références

  • GROUPES DE GALOIS

    • Écrit par Bernard PIRE
    • 178 mots

    L'unique mémoire d'Évariste Galois (1811-1832), Sur les conditions de résolubilité des équations par radicaux, présenté à l'Académie des sciences en 1831, reçut un avis défavorable de son rapporteur Siméon-Denis Poisson ; pourtant, l'importance de ce travail dans le développement...

  • ALGÈBRE

    • Écrit par Jean-Luc VERLEY
    • 7 143 mots
    ..., mais la notion de groupe n'apparaît pas formulée avec netteté avant Cauchy. En 1830, dans ses travaux sur la résolubilité des équations algébriques, Galois ramène l'étude d'une telle équation à celle du groupe (fini) de permutations de ses racines ; à ce propos, l'auteur introduit les notions fondamentales...
  • CORPS, mathématiques

    • Écrit par Universalis, Robert GERGONDEY
    • 6 190 mots
    Jusqu'à Abel et Galois, le problème central posé par les équations algébriques était celui de leur solution par radicaux, c'est-à-dire l'expression des racines au moyen d'opérations rationnelles et d'extractions de racines. Les Grecs connaissaient déjà des cas particuliers de la formule ...
  • WEBER HEINRICH MARTIN (1842-1913)

    • Écrit par Jeanne PEIFFER
    • 806 mots

    Universalité. C'est le mot qui caractérise peut-être le mieux le mathématicien allemand Heinrich Weber. Esprit souple, il était capable de travailler dans des domaines très divers des mathématiques. Mais il concentra surtout ses recherches sur l'analyse et ses applications à la physique...

Voir aussi