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CRÉATION La création dans les synthèses philosophico-religieuses

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Le commencement

Principe et commencement ont souvent été liés dans la spéculation théologique comme dans l'enseignement religieux traditionnel. Le terme grec Archè cumule les deux sens. Il importe cependant de les bien distinguer, comme s'y efforce saint Thomas qui remarque que l'idée de création n'implique pas nécessairement celle d'un commencement du monde. « Le monde, fût-il éternel, requiert cependant un principe. » Mais « que le monde ait commencé, cela est une vérité de foi chrétienne », philosophiquement indécidable, au même titre que l'affirmation de l'éternité du monde. Encore faut-il bien entendre ce commencement. Il ne s'agit point d'un commencement dans le temps : le temps n'est pas un milieu absolu qui précéderait les choses, milieu où elles seraient plongées. Il est donc simultanément créé avec le monde qui « consiste », de ce point de vue, dans une série finie d'êtres ou d'événements. On comprend que cette réflexion sur le commencement se soit développée en de subtiles recherches sur la possibilité d'une multitude infinie, en acte ou en puissance ; recherches qui ne furent peut-être pas étrangères à la naissance de la pensée moderne de l'infini, mathématique et métaphysique. Il ne semble pas toutefois que les théologiens catholiques d'aujourd'hui lient aussi étroitement que saint Thomas l'idée d'un commencement du monde ainsi conçu à l'affirmation de foi sur la création du monde. En ce sens, les deux acceptions de l'Archè seraient dissociables. Le commencement ne serait dès lors que le schème du principe, sa projection dans l'entendement dont le temps serait la forme fondamentale d'intuition ou de représentation.

En dehors du contexte chrétien, le problème du commencement ne paraît pas s'être imposé d'une manière aussi aiguë : soit que l'éternité du monde allât de soi ; soit que le « commencement » fût conçu non plus comme un « point d'origine » mais comme un pouvoir infini de « dissémination ». Principe et commencement, dans la pensée d'un Shankara par exemple, sont, l'un à l'égard de l'autre, dans le rapport de la lumière à son rayonnement. Les vocabulaires se recouvrent difficilement. Le terme « commencement » n'a pas exactement, selon le lieu d'origine, la même résonance. Mais, par une association inévitable, il évoque aussi une sorte de mystérieux contact avec le néant originel.

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, docteur en philosophie, docteur en théologie, professeur honoraire aux Instituts catholiques de Paris et Lyon

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Pour citer cet article

Stanislas BRETON. CRÉATION - La création dans les synthèses philosophico-religieuses [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Autres références

  • ABRABANEL (1437-1509)

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    Le conflit entre les théories philosophiques universalistes et un attachement plus proprement religieux à la tradition existait depuis plus de deux siècles chez les penseurs juifs. La philosophie sous sa forme averroïste admettait généralement que la vérité philosophique ne différait de la vérité...

  • ABRAHAM IBN EZRA (1089-1164)

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    Commentateur, grammairien, philosophe et astronome, Abraham ibn Ezra, né à Tudela, est l'une des plus grandes figures de la pensée juive du Moyen Âge. Sa carrière se divise en deux périodes bien distinctes. Pendant la première, jusqu'en 1140, il vit en Espagne, où des liens d'amitié le lient à...

  • ADAM

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